Textes sur les mines du Bassin
A Les réactions
après la catastrophe de 1952
A La presse locale
du Bassin à la Libération
A Combien
coûtait le charbon ?
ADHL : Archives Départementales de la Haute-Loire
ADPD : Archives Départementales du Puy-de-Dôme
ADHL S 042
Ministère 14
Juillet 1854
des Travaux publics
Mines
Arrondissement minéralogique
de Monsieur le Préfet
Clermont-Ferrand
aux mines de La Combelle
Procès-verbal
J'ai l'honneur de
vous adresser le procès-verbal d'un accident survenu le 14 juin dernier aux
mines de La Combelle.
Un malheureux
ouvrier, le nommé …….., descendant dans les travaux debout sur le bord de la
tonne, contrairement à l'arrêté préfectoral du 24 août 1849 et aux
prescriptions de la direction de la mine a été précipité dans le Puits d'Orléans
par un choc de la benne contre les parois de ce puits et a payé de la vie une
infraction que partageaient en ce moment avec lui deux autres mineurs, les
nommés ….. et ……..
M. l'Ingénieur
Tournaire dans son avis du 22 juin a conclu à ce que des poursuites judiciaires
soient dirigées contre ces derniers et fait remarquer que la responsabilité de
la direction de la mine n'est entièrement couverte ni par les ordres donnés aux
ouvriers, ni par les amendes imposées à divers contrevenants, maîtresse qu'elle
est de couper court à toute contravention de cette nature en ne laissant
descendre les bennes chargées d'hommes qu'autant qu'elles le sont de la façon
réglementaire.
J'estime avec cet
ingénieur qu'il y a lieu de poursuivre les deux ouvriers dénommés mais cela
sans préjudice des poursuites à exercer contre la direction de la mine, à
laquelle je ne saurais reconnaître dans l'espèce d'autre bénéfice que celui de
circonstances atténuantes.
Je suis avec
respect, Monsieur le Préfet, votre très humble et obéissant serviteur
L'Ingénieur en
chef des mines,
Baudin.
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ADPD S 044
À son excellence Monsieur le Ministre des travaux publics
Monsieur le Ministre
Daignez permettre aux
ouvriers mineurs du bassin houiller de Brassac de vous exposer le funeste
accident qui vient de jeter une malheureuse famille dans le désespoir.
Le 23 juillet
dernier, le sieur ……. âgé de 42 ans,
habitant et originaire de la commune d'Auzat-sur-Allier, canton de Jumeaux,
père de cinq enfants, en bas âge, dont l'un a un bras et une jambe estropiés,
travaillait aux mines de La Combelle dans le Puits dit de La Verrerie,
lorsqu'il a été frappé par un bloc de
charbon qu'il cherchait à abattre. Ce malheureux ouvrier est mort le lendemain
de l'évènement.
La classe ouvrière
a pu dans plusieurs occasions semblables apprécier la bonté inaltérable, la
générosité inépuisable de Leurs Majestés, notre bien-aimé Empereur et notre
bonne Impératrice qui aiment tant à soulager le malheur : précieuses qualités
qui leur ont légitimement attiré et mérité, à jamais, notre reconnaissance,
notre respect, notre fidélité et notre dévouement.
Aussi, Monsieur le
Ministre, nous venons, pleins de confiance dans votre sollicitude pour les
malheureux, vous supplier de présenter notre supplique à leurs Majestés et
d'intercéder un secours pour cette famille nécessiteuse.
Monsieur le
Ministre, dans cette douloureuse circonstance, nous nous estimerons heureux si
vous daignez nous servir ; si notre faible voix est entendue de leurs Majestés
; si notre démarche porte tout le fruit que nous osons en attendre.
Dans cette
attente, Monsieur le Ministre, veuillez agréer nos profonds sentiments de
respects et présenter nos sentiments de soumission et d'attachement à leurs
Majestés Impériales.
43 signatures,
dont celles du Médecin des Mines, du curé, de l'Ingénieur des Mines de La
Combelle, et du contrôleur.
Vu à la mairie
d'Auzat-sur-Allier pour la légalisation des signatures apposées d'autre part,
et certifions de plus que les faits exposés dans la pétition sont d'une
parfaite sincérité.
Auzat-sur-Allier,
le 10 Août 1860, pour le Maire, empêché, l'adjoint, Ribeyre.
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ADHL S 042
3e division, Du
21 9bre 1895
n°1409.D.
Mines de La Combelle. M.
le Ministre des Travaux Publics
Accident du 23 8bre 1895
L'ouvrier ……. tué
J'ai l'honneur de
vous transmettre le procès-verbal d'un accident
arrivé, le 23 octobre dernier, dans les mines de La Combelle, et qui a coûté la
vie à l'ouvrier remblayeur …….
Cet accident ne
comporte, d'après le rapport ci-joint de MM. les Ingénieurs aucune suite
judiciaire et la responsabilité de l'Exploitant ne paraît pas devoir être
engagée.
Mais, au point de
vue administratif, il serait à souhaiter, Monsieur le Ministre, que des
précautions plus sérieuses viennent éviter le retour de pareils malheurs.
Depuis 4 mois, c'est la quatrième accident grave que nous avons à déplorer.
Avec les plans inclinés à forte pente la vie du mineur mal protégée est à la
merci de la moindre distraction ; et cependant est-il possible de ne pas
oublier un danger avec lequel on est toujours en contact ?
Si la part de
l'imprudence n'est jamais nulle, du moins dans aucun de ces accidents elle
n'est la seule cause et dans tous on doit constater l'insuffisance de tel ou
tel moyen préventif.
Je vous serais
donc très reconnaissant, Monsieur le Ministre, de vouloir bien réserver une
suite effective aux conclusions du rapport de MM. les Ingénieurs des Mines,
afin de donner aux ouvriers plus de sécurité et aux familles plus de confiance.
Veuillez...
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ADHL S 630
Projet d' Arrêté
Nous, Préfet de la Haute-Loire,
Vu la loi du 21 avril 1810-27 juillet 1880 (article 50) ;
Vu les observations formulées par M. le Ministre des
Travaux Publics au sujet de la mine de Mège Coste, dans une dépêche du 31 mars
1896 ;
Sur la proposition des Ingénieurs des Mines ;
Arrêtons :
Article 1er.
M. le Directeur de
la mine de Mège Coste est prévenu qu'il est question de lui imposer, par voie
d'arrêté préfectoral :
1° le remplacement, dans le délai d'un mois, des
barrières mobiles fermant les recettes du puits Denière, (mais ne remplissant
pas toutes les conditions désirables), par d'autres barrières satisfaisant
exactement aux prescriptions de la circulaire ministérielle du 2 mai 1892,
c'est-à-dire disposées de telle sorte que leur fermeture soit assurée tant que
la cage n'est pas à la recette ;
2° l'installation,
pour le 15 juin au plus tard, d'un aérage efficace par le moyen d'un
ventilateur ;
le tout, avec
avertissement que si, dans les délais impartis, les mesures prescrites
n'étaient pas réalisées, les contraventions correspondantes seraient déférées
aux tribunaux, et qu'en outre les travaux d'abatage pourraient être, soit dans
leur ensemble, soit pour partie mis en interdit par mesure administrative.
Article 2ème.
Un délai de 10
jours est assigné à M. le Directeur de la mine de Mège Coste pour produire, au
sujet du précédent article, telles observations qu'il jugerait utile de
formuler.
Article 3ème.
Le présent arrêté
sera notifié à M. le Directeur Basiaux dans le moindre délai, par M. le Maire
de Sainte-Florine.
Ampliation sera
transmise à M. l'Ingénieur en Chef des Mines.
Fait au Puy le 21
avril 1896,
Le Préfet
Proposé par
l'Ingénieur des Mines.
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43 mines, 34
carrières souterraines, 684 carrières à ciel ouvert continues, 2 855
temporaires, 6 établissements industriels dépendant des mines et des carrières :
3 622 exploitations.
219 exploitations
visitées
271 enfants de 13
à 16 ans au jour, 160 garçons de 16 à &_ ans au fond, 263 au jour, 74
filles de 16 à 18 ans au jour, 307 femmes de plus de 18 ans, 7 976 hommes au
fond, 2 627 au jour.
Toutes les mpines
ont été visitées.
112 visites par
les contrôleurs, 32 par les ingénieurs, toutes de nuit.
«Il n'a pas été
constaté d'infraction... Autant que le Service des Mines a été en mesure de le
vérifier...»
Rapport de
l'ingénieur en chef des Mines Aubert de 1909. Pénalités : néant.
Sources : Rapport sur l'application des lois, Bibliothèque
de Montpellier.
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Jean Marion,
Délégué Mineur aux mines de La Combelle écrit au citoyen Chantagrel, rédacteur en
chef de La République
socialiste et sénateur (extraits)
Comité socialiste.
- Un seul accident survenu aux mines de La Combelle (Cie
Commentry-Fourchambault) a été signalé au délégué mineur, fin février 1903. Cet
accident de peu d'importance occasionné par un coup de massette que M. [...],
de Solignac, s'était donné suir un doigt a été communiqué.
Depuis cette
époque il est arrivé d'autres accidents bien plus graves. Ceux-là la Compagnie
les a passé sous silence.
Qu'il suffise ici
de citer la loi (avis de l'accident doit être donné sur le champ au
délégué-mineur par l'exploitant).
Par conséquent,
depuis le mois de février, il est arrivé beaucoup d'accidents, sans compter
ceux arrivés antérieurement à cette date, nous ne retenons que le présent, on
peut juger que cela est suffisant tant la liste est grande. Pendant le mois de
décembre 1903, voici les accidents qui ont eu lieu. Au puits de Basse Combelle
[cinq blessés]. Au puits de Cellamines [deux blessés].
Le délégué mineur
Marion a écrit plusieurs fois à M. le préfet pour signaler cet état de choses
après s'être lassé d'attendre en vain des réponses aux lettres envoyées à M.
l'ingénieur en chef, il a cru bon de s'adresser à son chef hiérachique, mais
hélas ! on eu dit qu'il y avait entente entre eux, et de modification à la
situation, point. Que cela vous étonne, aussi les Compagnies en prennent à leur
aise étant assurées d'avance de la bienveillance de ceux dont elles devraient
craindre le châtiment.
Il en résulte que la
Compagnie se soucie peu de la vie des ouvriers, attendu qu'elle ne craint
aucune poursuite et la sacrifie dans ses propres intérêts montrant une fois de
plus que les capitalistes assoifés d'or se jouent des souffrances des
prolétaires. [...]
La République socialiste,
10 janvier 1904
Les réactions après
la catastrophe de 1952
CGT, extrait de Le Travailleur du sous-sol,
mai-juin 1952.
«ASSEZ DE
MASSACRES AU FOND DES PUITS !
Mineurs, luttez
pour assurer votre sécurité
Encore une. Après
Courrières et Vuillemin (Moselle) en 1948, Liévin en 1949, Saint-Éloi-les-Mines
en 1950, Bruay en 1951, une catastrophe s'est produite au puits du
Gros-Mesnil (Haute-Loire) le 20 mai. 12
mineurs ont péri laissant 12 veuves et 36 orphelins.
Chaque jour, le
sang coule dans nos bassins miniers.
Du 1er janvier
1952 au 25 mai on compte :
56 tués dans le
Nord-Pas-de-Calais.
20 tués dans les
mines de fer de l'Est.
5 tués dans les
mines de la Loire.
Depuis le 1er
avril jusqu'au 25 mai, il y a eu 10 tués dans le Gard et l'Hérault.
Il faut noter en
plus les accidents dans les autres bassins et peites mines, ainsi que les
centaines de blessés graves. Il s'agit en fait d'un véritable massacre au fond
des puits.
Que l'on ne vienne
surtout pas invoquer la fatalité. Ce qui tue les mineurs, c'est la politique de
charbon au plus bas prix.
La catastrophe du
puits Gros-Mesnil eût pu être évitée.
Dans un manifeste,
notre syndicat de la Haute-Loire démontre l'entière responsabilité des Houillères
et de l'État-patron et du service des mines.
1° La mise en
chantier du plan à chariot n°3, où s'est produit le dégagement instantané
n'aurait pas dû être effectuée à proximité d'une zone dangereuse connue par
l'exploitant par les divers dégagements survenus antérieurement au niveau
supérieur, et y compris au niveau 620 où eut lieu un dégagement à environ 6
mètres du lieu de la mise en chantier du plan ;
2° La mise en
chantier du plan à chariot n°3 a été effectuée en montant, malgré la
connaissance dangereuse de son emplacement, alors que le réglement des mines à
dégagement instantanné prévoit que les travaux doivent être conduits de manière
à réaliser le desserrage progressif des terrains. Tenant compte de ces
dispositions, les travaux auraient dûs être entrepris en descendant, comme
d'ailleurs ils le furent constamment dans ce puits du Parc ;
3° Comment se
fait-il que lors du changement des
terrains du front de taille du plan à chariot n°3, des sondages n'ont pas été
effectués afin de reconnaître la qualité des terrains suspects de dégagements
instantannés ? Vu cet état de fait, pourquoi des mesures de précautions
n'ont-elle pas été prises en rapport avec la connaissance de cette zone
dangereuse ?
4° De plus, les
tirs réglementaires ne furent pas effectués la veille ni au front de taille de
l'avancement qui est dans des terrains de schistes charbonneux, ni au plan à
chariot n°3. Les derniers tirs de l'avancement ayant été effectués le 12 ou 13
mai, celui du plan à chariot n°3 le 17 mai ;
5° Les sorties de
secours du personnel étaient négligées, en particulier le puits intérieur du
niveau 620 à 515 muni d'une seule cage sans contrepoids (rat) et démuni
d'échelles, ce qui aurait permis, malgré le manque de pression au moment du
dégagement de remonter les ouvriers parvenus à la recette 620 ;
6° De plus, les
travaux de l'avancement ne devaient pas s'effectuer aux mêmes postes ni en même
temps que les travaux du plan à chariot n°3, ce qui est contraire au réglement
;
7° L'ingénieur du
puits avait, paraît-il, demandé de faire un bure (puits intérieur) au lieu d'un
plan à chariot ; un refus lui fut signifié par la direction des houillères du
bassin d'Auvergne avec ordre de faire le plan à chariot en montant ;
8° L'ingénieur du
service des mines aurait déclaré, lors de son enquête, qu'il préférait être
dans sa peau que dans celle des ingénieurs, que le plan à chariot n'aurait pas
dû être fait à cet endroit ;
Comment se fait-il
que des dispositions n'aient pas été prises avant, le service des mines étant bien
au courant de tous les travaux effectués au puits du Parc :
La Commission
d'enquête réclamée par le syndicat des mineurs s'impose d'urgence, afin que
toutes les responsabilités soient établies et que soient châtiés les coupables.
Le lendemain de la
catastrophe, en signe de protestation et pour exiger plus de sécurité, tous les
mineurs et les ouvriers des usines du bassin de la Haute-Loire débrayèrent 24
heures.
Par milliers, ils
se retrouvèrent le lendemain lors de la cérémonie officielle.
Là, nos camarades
Kléber Loubert, secrétaire de la Fédération régionale du centre et Victorin
Duguet, secrétaire général de la Fédération du Sous-Sol qui représentait notre
Fédération avec Achille Blondeau, secrétaire fédéral, firent le procès des
responsables de la catastrophe.
Dans un discours
émouvant qui fit venir les larmes aux yeux de l'assistance, Loubert retraça la
terrible tragédie.
«Nous n'avons pas
le droit, conclut-il, de discuter de la fatalité quand les mineurs se dressent
contre l'abandon des règles de sécurité, quand on leur vole leurs délégués.
Nous exigeons qu'une commission d'enquête soit constituée avec la participation
des ouvriers.»
Prenant ensuite la
parole, Victorin Duguet rend aux victimes de l'État-Patron un dernier hommage au
nom de tous les mineurs de France. Il situe ensuite les responsabilités et
dresse un véritable réquisitoire.
«Ce qui tue les
mineurs, déclare Victorin Duguet, ce qui provoque les catastrophes, ce sont les
méthodes d'exploitation, les cadences infernales de travail, la négligence trop
souvent, et même l'abandon total des mesures de sécurité, l'insuffisance ou la
mauvaise qualité du matériel et des installations, l'insuffisance des pouvoirs
des délégués mineurs, le non-respect de leurs rapports, une loi de voleurs qui
empêche les travailleurs de la mine de se donner les délégués mineurs de leur
choix.
Ce qui tue les
mineurs et provoque la catastrophe, c'est le refus d'appliquer leur statut et
son article 12, c'est cette course au charbon au plus bas prix pour les besoins
de la politique de guerre qui fait que les mineurs soit brimés, bafoués, qui
veut que les prix de tâche soient constamment abaissés, qui fait que les
réclamations et les avis des mineurs et de leurs syndicats sont
systématiquement repoussés.
Voilà ce qui tue
les mineurs, voilà ce qui provoque les catastrophes.
Voilà ce qui jette
le deuil, la misère, la désolation dans nos foyers, voilà ce qui fait
qu'aujourd'hui nous pleurons douze des nôtres, ici, tandis qu'à la Grand-Combe,
nos frères pleurent aussi deux des leurs, tués eux-aussi par le gaz carbonique.
C'est cela qui tue
les mineurs et de cela il y a des responsables.
Oui, c'est vous
messieurs les ministres, qui êtes responsables des malheurs qui frappent notre
corporation, par votre politique de rendement au plus bas prix, innovée par le
socialiste de droite Lacoste et ses néfastes décrets, et continuée par le
républicain populaire Louvel, ministre du pétainiste Pinay.
Oui, c'est vous,
monsieur le directeur, messieurs les ingénieurs, qui portez une lourde part de
responsabilité, lorsque vous appliquez servilement les consignes d'une pareille
poplitique de malheur et votre responsabilité est d'autant plus engagée que
vous connaissez les souffrances et les misères de notre corporation, comme vous
connaissez le danger et la dureté du métier de mineur.
N'est-ce pas une
honte que parmi les victimes que nous pleurons aujourd'hui, l'une d'elles a dû,
la quinzaine dernière, se présenter quatre fois au bureau pour réclamer son dû
?
N'est-ce pas une honte
que ces hommes aient eu leur salaire diminué de près de 200 francs par jour
depuis le premier mai ?»
Et répondant aux
discours hypocrites que ceux qui parlent de respect des morts, Duguet indique :
«Le meilleur moyen
de respecter des morts, c'est de de dénoncer les responsables de leur mort et
de lutter tous ensemble pour que pareille tragédie ne se renouvelle pas.»
Auparavant, un
employé des Houillères, dénommé Travers, avait pris la parole au nom de la
CFTC. Son discours avait vraisemblablement été préparé dans les bureaux de la
direction.
Il parla de la
fraternité qui unit le directeur des Houillères et les ouvriers. Il s'indigna
que la CGT dénonce les responsables de la catastrophe, couvrant ainsi la
politique d'insécurité dans les mines pratiquée par les Houillères.
Il fut
naturellement félicité le lendemain par le Figaro nazi et le journal fasciste
l'Aurore.
Le préfet, lui,
prit la parole après notre camarade Duguet. Parlant au non du gouvernement, il
tenta de défendre l'État-Patron, prostestant contre les accusations formulées
par Loubert et Duguet.
Comme s'il
suffisait de venir verser des larmes de crocodiles sur les cercueils de ceux
que la politique de charbon au plus bas prix a assassiné.
Le préfet a pris
l'engagement national d'assistance et de réparations envers les victimes. A
l'heure où nous écrivons ces lignes, rien n'a encore été fait par le
gouvernement. Qu'attend-il pour faire voter le projet de loi du groupe
communiste demandant 10 millions pour les victimes ?
C'en est assez de
victimes. Il faut en finir avec la politique du charbon au plus bas prix qui
tue au fond des puits. Il faut en finir avec les cadences infernales à la mode
américaine. (C'est aux USA qu'il y a le plus de tués dans les mines). Il faut
accorder de meilleurs salaires et prix de tâche. Il faut que toutes les règles
de sécurité soient observées. Le projet de loi communiste sur l'extension des
pouvoirs des délégués-mineurs doit être voté de suite [le PCF demandait que le
délégué puisse arrêter les travaux dangereux, voir l'annexe : «Les délégués
mineurs»]. En outre, les mineurs doivent avoir le délégué de leur choix. C'est
un mal-élu avec 25 % des voix qui fonctionne au puits Gros-Mesnil. Depuis
quatre jours il n'était pas descendu à ce puits. Lors de sa dernière descente,
il n'a même pas signalé l'existence du gaz. Et pourtant, tous les ouvriers
savaient que l'on approchait d'une poche de gaz.
Nous l'avons déjà
dit et nous le répétons, un délégué élu avec une minorité de voix, qui n'a pas
la confizance des ouvriers, n'a pas d'autorité. De ce fait, il ne peut pas
défendre convenablement la sécurité et la vie des ouvriers.
Assez d'assassinats.
Mineurs et similaires, refusez de travailler dans des conditions d'insécurité.
Refusez de travailler pour de bas prix à la tâche. Ripostez avec force quand on
vous inflige une brimade, quand il y a un tué ou un blessé grave dans votre
puits. Exigez plus de pouvoirs aux délégués-mineurs qui doivent être élus par
la majorité d'entre vous. Luttez dans l'union pour plus de sécurité, pour
préserver votre vie.
La Fédération du
Sous-Sol.
extrait de Le Figaro, 23 mai 1952
«C'est alors que
deux représentants de la CGT prirent la parole. Ce fut pour se livrer à une
manifestation communiste, manifestation d'autant plus indécente qu'elle se
déroulait devant des cercueils.
M. Léon Travers,
secrétaire local de la CFTC, sut donner ensuite aux deux syndicalistes
extrémistes la leçon d'élémentaire
correction qu'ils méritaient.
- Pourquoi
faut-il, déclara-èt-il avec émotion, que la douleur des familles soit troublée
par des dissensions savamment entrenues ?»
extrait de L'Aurore, 23 mai 1952
«Les émouvantes
obsèques des douze victimes de la catastrophe de Frugères ont été troublées par
d'indécents discours communistes.
[...] Après quoi, M. Kloubert Loubert, secrétaire de la
Fédération CGT des mineurs du Centre, avec un manque de délicatesse qui fut
sévèrement apprécié par les mineurs, profita de son tour de parole pour
prononcer un discours de propagande politique. Cette exploitation indécente du
deuil qui frappe douze familles de travailleurs créa un dur malaise parmi les
assistants de cette cérémonie qui, jusqu'alors, avaient communié dans la même
émotion et dans le même deuil.
M. Louis Travers,
secrétaire local de la CFTC, parlant ensuite, déplora que des paroles de
discorde aient été prononcées en de pareilles circonstances.
Mais quand vint le
tour du secrétaire national de la Fédération
des syndicats du sous-sol, M. Victorien Duguet, celui-ci n'hésita pas
pourtant à renouveler les accusations indécentes portées par M. Loubert et à
rejeter les responsabilités de la catastrophe sur le gouvernement.
Enfin, M.
Carcasses, préfet de la Haute-Loire, représentant le gouvernement, s'élève
fermement contre la polémique déplacée que venaient de soulever certains
orateurs au seuil du cimetière.»
CGT-FO, extrait
de Le Réveil des
Mineurs, n°25, Mai 1952
À la trop longue
liste des victimes, que dans tous les pays du monde et à travers tous les âges,
elle a déjà dressée, la mine homicide vient encore d'ajouter des noms. En
quelques jours, seize hommes, descendus le matin pleins de vigueur et de santé,
ont trouvé une mort atroce dans les profondes galeries. Ils sont tombés : 12 à
Frugères-les-Mines, 2 à la Grand-Combe, un à Bruay et un autre à
Loos-en-Gohelle, en moins d'une semaine. Sachant bien qu'ils risquaient leur
vie chaque fois qu'ils mettaient pieds dans la cage de descente, ils l'ont
courageusement sacrifiée pour que
d'autres hommes puissent vivre du produit de leur travail.
Un drame horrible
vient de se consommer à Frugères-les-Mines ; conscients de ce qui les attendait,
12 mineurs se sont héroïquement effacés pour donner la vie sauve aux 8 plus
jeunes d'entre eux. Comprendra-t-on jamais ce qu'il y avait de noble dans les
paroles de ces braves gens qui disaient, à leurs cadets, «partez et renvoyez la
cage vite, bien vite». Ils savaient cependant qu'elle reviendrait trop tard.
Courageusement, ceux qui restaient ont prononcé ces paroles d'espoir ;
«renvoyez la cage bien vite» pour que ceux qui partaient n'aient pas trop de
regrets d'avoir été choisis pour survivre.
Encore une fois la
corporation minière est en deuil. En fait, elle l'est toujours, car il ne se
passe pas de semaine qu'ici ou là, isolément ou en groupe, le sous-sol ne se
venge de ceux qui ont voulu violer son secret et lui enlever ses richesses. Au
sujet de tous ces morts, des enquêtes ont été ordonnées dont il ne vous
appartient pas, pour l'instant, de préjuger les résultats.
Y a-t-il eu faute
d'exploitation ? Y a-t-il eu imprudence ? Nous souhaitons que la vérité soit
dite, sur les causes de tels drames, car nous nous refusons à croire, toujours
et encore, à la seule fatalité.
Les représentants
du patronat et des Pouvoirs publics sont allés s'incliner devant les dépouilles
de ces braves gens. Ils ont prononcé des mots qu'à ce moment ils pensaient. Ils
ont rappelé combien cette profession était pénible et surtout dangereuse. Ils
se sont associés au deuil des veuves, des mères et des enfants. Nous sommes
certains qu'à ce moment là ils étaient sincères. Ce que nous voudrions, c'est
qu'ils n'oublient pas trop vite ce qu'ils exprimaient devant les cercueils des
victimes. A l'heure même où se produisait à Frugères ce dégagement
catastrophique, les représentants des des mineurs discutaient avec les
représentants patronaux et ceux des Pouvoirs publics. Hélas ! au cours de cette
discussion, nous dirons même de ces marchandages, seuls les représentants des
syndicats pensaient à ce que le métier de mineur comportait de dangereux.
Les autres
estimaient qu'il était un métier comme un autre et ceci constituait une escroquerie
morale. Ce n'était pas une profession comportant un grand besoin de spécialité
et de connaissances particulmières. Partant, on marchandait leurs salaires et
leurs conditions humaines. On oubliait que la spécialité du métier de mineur
était surtout d'avoir à affronter la mort à tous les instants et que, pour
l'éviter, ils avaient à calculer et à peser tous leurs gestes.
Cette même
commission nationale doit se réunir à nouveau le 4 juin. Nos interlocuteurs du
20 mai auront-ils gardé le souvenir de ce que la réalité de Frugères, de la
Grand'Combe, de Bruay et de Loos-en-Gohelle devrait leur rappeler ? Nous
voulons l'espérer, en tous cas nous raviverons leurs souvenirs et saurons
défendre, comme il convient, les droits de nos camarades, de ceux qui risquent
leur vie tous les jours.
On s'est plaint
que certains propos malséants aient été tenus à l'occasion des obsèques des
victimes de Frugères. Une certaine presse a écrit des insanités contre des
ministres, des ingénieurs, des agents de maîtrise, voire même des délégués
mineurs qui ne sont pas de leur bord. Elle appelle crime volontaire une
catastrophe qui se produit en France, tandis que, selon elle, celles qui se
produisent derrière le rideau de fer sont dues à la seule fatalité, sans doute
parce qu'elles sont plus fréquentes.
Plaignons les
malhonnêtes gens qui tiennent de tels propos ou font de tels écrits, mais de
grâce, qu'on n'agisse pas toujours pour leur donner, auprès des masses
laborieuses, un semblant de raison dont ils ont tellement besoin.
La Fédération des
Mineurs F.O.
La presse locale du Bassin à la
Libération
La Bataille du
Charbon
organe du Comité
Local de Libération
Samedi 21 Octobre 1944.
Le 30 septembre, à
20 heures, les mineurs du Bassin de Brassac, réunis en Assemblée Générale, ont
adopté à l'unanimité l'ordre du jour suivant :
«Les ouvriers du
bassin minier de Brassac-Sainte-Florine, réunis en Assemblée Générale de 30
septembre 1944, conscients des responsabilités qui leur incombent dans le dommaine
de la production, s'engagent à poursuivre leur tâche sans défaillance mais
demandent instamment une amélioration immédiate du ravitaillement qui
risquerait, si elle ne recevait pas une solution immédiate d'entraîner un arrêt
total du travail.
Ils demandent que
les Milices Patriotiques soient habilitées à prendre en main le contrôle du
ravitaillement et la lutte contre le Marché Noir, afin que soient mis
définitivement hors d'état de nuire tous les trafiquants saboteurs de la
Libération».
Samedi 10 mars
1945
SABOTAGE A LA
PRODUCTION
aux Mines du
Bassin de Brassac
Nous manquons de
combustible tant pour le chauffage domestique que pour nos industries. Voyons
d'où vient ce sabotage :
Frein à la production.
- Les mineurs P... et M... travaillant dans un chantier à La Taupe ont retiré
le 16 février, 3 (nous dison trois) bennes de charbon et 9 bennes le 17, alors
que dans ce chantier on peut retirer de 20 à 25 bennes dans une journée normale
; la cause de ce manque à produire provient du manque de bennes disponibles.
Mais pourquoi les
bennes qui arrivaient normalement au temps de l'occupant manquent-elles
maintenant ?
Souvent la
pression manque, ce qui a pour conséquence d'entraver tous les chantiers.
Pourquoi ?
Il y a du brai pour fabriquer les
boulets. Pourquoi les presses sont-elles au repos ? Est-ce la manque de
main-d'œuvre ? Alors pourquoi refuse-t-on d'embaucher ?
Frein à
l'expédition. - La gare d'Arvant fournissait de 800 à 900 tonnes de wagons par
jour. Il se charge 300 tonnes environ. Les rames de wagons qu'une machine vient
chercher quelque fois de Clermont ne sont jamais complètes, alors que le parc
contient encore plusieurs centaines de tonnes et qu'il s'en ajoute chaque jour.
Il manque de la main-d'œuvre ; pourquoi alors les wagons chargés sur
l'embranchement de La Taupe sont-ils déchargés au parc au lieu d'être expédiés
directement comme avant ?
Les expéditions
journalières qui étaient de 700 tonnes en décembre 1943 et janvier 1944, sont
tombées à 340 tonnes en décembre 1944 et janvier 1945 pour La Taupe et Le
Grosménil.
M. ..., Directeur
des Houillères de la Haute-Loire, M. de …., Ingénieur, vous n'aimez pas le
régime actuel qui laisse trop de libertés aux ouvriers ; vous ne pouvez pas les
brimer comme vous l'avez fait au temps de Vichy, c'est pour cela, uniquement
pour cela que vous sabotez la production. Nous vous tenons pour responsables du
régime du manque de chauffage dans les usines et les les foyers domestiques.
Vous aurez un jour des comptes à rendre.
---
Est-il vrai qu'un
géomètre de la mine a été pris alors qu'il transportait des fromages
soit-disant pour les mineurs, qu'il a été arrêté par les services du
ravitaillement et relâché sans histoires ?
Est-il vrai qu'un
ingénieur de la mine fait entretenir deux vaches avec le foin et le personnel
de la mine pour avoir du lait pour ses enfants ; a-t-il une déclaration de
cheptel ? Le propriétaire est-il tenu de livrer 25 litres de lait par mois au
Ravitaillement ?
Et pourtant deux
vaches qui sont bien nourries, qui ne travaillent pas, doivent certainement
donner assez de lait pour une famille.
[NB : dans le n°
du 17 Mars 1945, Le Brivadois fait état d'une protestation des Houillères contre cet
article, et promet une enquête approfondie «pour la recherche de la vérité».]
8 septembre 1945
Samedi 18 août, à
16 heures 30, à Brioude, un camion transportant 4 tonnes de charbon et appartenant
à M. D...., était appréhendé à la barrière de Clermont par deux gendarmes et
quelques hommes de la Résistance. Aucun papier n'autorisant le transport du
charbon, le camion et son contenu furent mis en fourrière chez M. G..., à
Brioude. Le chauffeur interrogé déclara que le combustible était destiné à M.
D..., cité Veysserre. (Voici un Monsieur qui voudrait bien instituer un
règlement pour la pêche du saumon, mais qui voudrait ignorer celui qui existe
sur le charbon).
Drôles de
principes, M. D... ! mais mettez-vous bien dans la tête une fois pour toutes,
que le temps de Vichy est passé et qu'il n'y a plus place en France pour les
saboteurs de l'économie nationale.
Mais arrivons au
vif du sujet : le camion qui était en fourrière chez M. G..., sur les ordres de
la Préfecture, a été retiré avec son contenu par son propriétaire. Ainsi, il y
a donc en France deux poids et deux mesures : les riches, les «pognonistes»,
les anciens collaborateurs, les saboteurs, les profiteurs de tous les régimes
ont, eux, le droit de bien manger, de se chauffer et de ne pas mourir du froid
et de la faim, ainsi que l'ensemble des pauvres types qui forment la majeure
partie de la population française.
Eh bien !
savez-vous pourquoi M. D... a le droit de retirer du charbon à la mine pour en
livrer aux gens de son espèce ? Simplement parce que M. D... fournit des bois à
la mine. Et que diable ! en faisant cela, M. D... ne fait que son métier et ce
métier ne donne pas droit, que nous sachions, à une faveur qui lui permet de retirer
du charbon à volonté, d'autant plus que M. D... dispose de bois à brûler en
quantité.
Il nous semble que
le paysan, l'ouvrier qui, eux, travaillent uniquement pour leur pays ; le
commerçant, le petit fonctionnaire qui, eux aussi, font leur possible par ces
temps de crise ; en un mot, tous ceux qui peinent et souffrent pour gagner leur
vie sans s'enrichir (M. D...) peuvent prétendre, comme certains gros, à se
chauffer et à se nourrir.
Et nos
tout-petits, se gèleront-ils encore cet hiver en classe. Serons-nous, comme
l'hiver dernier, réduits à les garder à la maison à cause du froid et du manque
de chauffage, tandis que MM. D... et consorts seront bien tranquilles, les
pieds devant le feu ?... Non, cela ne sera pas.
Nous, les vrais
anciens de la réistance, les vrais des maquis, nous ne tolèrerons pas cela :
nous voulons un responsable, des responsables car il y en a.
Il y a M. le
Directeur des mines de Brassac qui a livré du combustible sans autorisation.
Il y a M. D... qui
transporte du charbon sans en avoir l'autorisation. (Le charbon est toujours
contingenté et M. D... a seulement une autorisation de transport pour le bois).
Il y a M. D...
qui, d'après les dires du chauffeur, devait recevoir le charbon.
Que les pouvoirs
publics s'interressent à cette affaire s'ils ne veulent pas que la Résistance
se mette à faire la police contre tous les trafiquants (avec le concours de la
gendarmerie, nous nous entendons).
Mais là, nous
faisons confiance à M. le Préfet qui, lui, doit nous comprendre, maus qui, par
contre, ne doit guère comprendre que de tels scandales se passent tous les
jours et que personne n'y mette ordre ; et M. le Préfet, pour bien faire voir
aux gens de notre département que vous méritez leur confiance, que vous vivez
près d'eux, prenez des sanctions avant qu'il ne soit trop tard, car le peuple
en a ssez et vous savez bien que lorsque le peuple bouge, on ne sait jamais où
il s'arrêtera... Parfois au-delà des frontières, comme il y a un an. [allusion
à l'Épuration]
M. le préfet, nous
attendons votre verdict. Mais nous disons aussi : Véritables résistants,
maquisards, sympathisants : ouvrez l'oil ; rien de ce qui touche le gros trafic
ne doit vous échapper. Il faut sortir de l'ornière.
Fédération
Nationale des Anciens des Maquis. (Section de Brioude).
6 Avril 1946
BASSIN MINIER
Les ménagères
protestent contre le manque de viande, les ménagères ont raison. Les
travailleurs protestent contre le prix trop élevé de la viande, les
travailleurs ont raison. Les consommateurs rouspètent. Et d'incriminer les
services du ravitaillement, le contrôle des prix, la C.G.A., la C.G.T., le
ministre, les députés et que sais-je encore ? Mais ménagères ou travailleurs
cherchent quelquefois le bâton pour se faire battre, et à ce sujet je vais vous
raconter une petite histoire.
Il était une fois
(ce n'est pzas un conte de fée), il était une fois un boucher qui avait reçu
une «cheville» entendez par là que le contrôle des prix lui avait dressé un
procès-verbal avec amende substantielle à la la clef, et comme une cheville ne
doit pas normalement diminuer les bénéfices de ce pauvre malheureux, il trouva
une excellente solution pour récupérer, tout en restant en apparence dans la
légalité. Marquer le poids régulier et le prix de la viande sur le papier, mais
exiger une somme supérieure. C'est simple, mais il fallait y penser.
Et les ménagères,
ces braves ménagères qui savent si bien crier et critiquer à tout propos, eh
bien les ménagères payèrent, en maugréant bien sûr, mais pas une seule n'eut
l'idée de prévenir la police ou le service du contrôle des prix. Que
voulez-vous, il vaut mieux avoir un peu de viande et la payer un peu plus cher
que de ne pas avoir de viande du tout !
Quand je vous
disais que les consommateurs donnaient quelquefois le bâton pôur se faire
étriller. Et que de fois se reproduisent
des faits semblables !
Et si le marché
noir reste encore roi, c'est surtout grâce à l'égoïsme de chacun.
Samedi 24 Novembre 1945
DEMAIN A
BRIOUDE
GRAND MATCH DE
GALA
La Combelle-1
contre Brioude-1
Les mineurs sont
en ce moment en tête du championnat d'honneur et gagneront vraisemblablement ce
championnat. Dimanche dernier, ils ont encore remporté la victoire sur Le Puy par
4 buts à 0, c'est dire la valeur du onze Combellois, dont l'avant-centre
Sachaire constitue le point fort, avec les Bonnafoux, Grama, Domingo, Delort,
tous excellents joueurs, sous la conduite de Bourdier, ex-pro de St-Étienne.
En face de cette
pléïade de vedettes que feront nos Brivadois ? Rappelons seulement que l'an
dernier ils tinrent tête aux rapides Combellois. Ce sera pour eux une dernière
mise au point avant le match dur contre messeix, et nous espérons qu'un public
nombreux viendra applaudir les deux équipes.
El lever de
rideau, les équipes 2 et 3 s'affronteront en une partie d'entraînement.
Mémoire relatif à l'exploitation des mines de charbon
d'Auvergne, 1737.
1737 : l'Intendant a fait suspendre l'exploitation
commencée par le Sr Sauvat de Ste-Florine, «parce que l'héritage où il a fait
l'ouverture de sa charbonnière est d'une trop petite étendue, et que, se
trouvnt contigu à une mine de charbon nouvellement abandonnée, il ne sçauroit
pénétrer dans une profondeur suffisante sans être inondé par les eaux de cette
mine. Il faudra nécessairement pour une bonne exploitation qu'il se concilie
avec les propriétaires des héritages plus éloignéz, où l'on pourra dans la suite,
en réunissant l'intérest de tous les co-propriétaires, établir une charbonnière
capable de fournir des charbons de la seconde classe ; mais pour le présent, il
me paroist de l'intérest génral de différer cet établissement, parce que les
mines déjà ouvertes peuvent fournir au-delà de la consomation ordinaire, et
d'ailleurs le particulier dont il s'agit, étant à son aise, ne souffre point de
ce délai.»
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ADPD
C 6978
[dans la marge] Monet A garder 1768
Relation d'un accident funeste causé par écroulement dans
une mine de charbon de houille en la paroisse de Ste-Florine en Auvergne.
Le jeudi 17 novembre 1768, le nommé ……, âgé de 62 ans et
….. son fils cadet âgé de 22 ans, charbonniers de Ste-Florine, s'étant trouvés
dans la mine du S. Crassin appelée Chambeleve le haut située sur territoire de
Ste-Florine et dans la galerie de ladite mine où se tire actuellement le
charbon de la profondeur de 275 pieds avec le nommé …… homme marié âgé de 21
ans aussi charbonnier à Ste-Florine,
qu'à la pointe du jour étant à commencer leur tache ledit ……. s'est aperçu que
la partie la plus éloignée de ladite galerie du puits d'entrée s'était enfoncée
la nuit précédente, que craignant que la suite du menu corridor ou galerie où
ils travaillaient en fit de même, il en averti les Maîtres Charbonniers,
lesquels ont fait jeter dans l'enfoncement quelques fagots et ont assuré les
ouvriers qu'ils pouvaient continuer sans crainte leur travai ; qu'un instant après que ledit ……. a eu
pioché le premier sac de charbon, pendant qu'il en remplissait le sac que lui
tenait ouvert ledit …….. ; ……. père étant heureusement pour lors éloigné d'une
toise deux (?) du côté de l'entrée dans ladite galerie, il a vu que le charbon
s'est enfoncé sous les pieds des nommées ……… et ………, et qu'ils ont été
ensevelis avec les étais et plus de 20 toises de massifs de charbon ... (?) dans les galeries ... (?) inférieures
de ladite mine, dont le fillon est presque droit, et perpendiculaire, qu'à
l'instant ledit ……. père et d'autres ouvriers qui étaient dans la mine se sont
le reste du jour vainement occupés de retirer du gouffre de charbon et marrain
(?) pour entreprendre de trouver dans les décombres ces deux malheureux, plus
ils retiraient du charbon plus il en descendait des hauteurs ; qu'enfin lesdits
ouvriers et ledit ….. père se sont retirés sans aucun espoir de ne plus revoir
lesdits ….. et ………...
Le lendemain 18 novembre, ledit …… père et la femme dudit
……. ont fait faire les honneurs funèbres et le sr. curé de Ste-Florine à ce
qu'on assure, a déjà chargé son registre des actes mortuaires de ces deux
malheureux.
Ce jourd'hui 23 novembre après-midi ledit …….. accompagné d'…….. son père a comparu devant
moi soussigné, lequel …….. m'a lui même déclaré ce qui suit ; qu'ayant été
enterré et enfoncé avec l'éboulement conjointement avec ledit ……… étant
descendu au moins de 20 pieds d'hauteur il s'est trouvé dans un vieux passage
couché la face contre terre la tête et la moitié du corps sous un vide
qu'avaient formé en forme de triangle deux jambes ou poteaux de bois, son bras
gauche pris sous une de ces pièces de bois, le surplus de son corps, ses
cuisses, et ses jambes, enterrés et pris entre les décombres et grosses pierres
de charbon, qu'il a été occupé au moins 3 heures à se détacher des décombres
que pendant ce temps il a entendu sous lui dans un plus bas passage ledit ………
qui a crié Adieu mes amis, adieu ma Mie, jamais plus je ne te vois, que l'ayant
ensuite entendu lamenter quelques temps, il l'a appelé mais ledit Guérin n'a
rien plus dit, que ledit …….. s'étant trouvé enfin dégagé de sous les décombres
dans une partie de ce vieux passage, tombant de faiblesse et manquant d'air,
s'est assis et a dormi quelques heures, que s'étant réveillé en tatonnant dans
cette partie du passage, il a trouvé qu'à sin issue, il y avait un puits comblé
de rocailles et de décombres par lequel on descendait autrefois dans ce
passage, lequel est environ de quatre pieds carré sur plus de 30 pieds
d'hauteur, que s'étant imaginé que s'il pouvait tirer dans ce passage les
décombres de ce puits, il pourrait recouvrer la liberté, ce qu'il a entrepris
et a été occupé à débarrasser ledit puits, le reste du jour de jeudi 17
novembre, toute la nuit suivante, tout le jour du vendredi 18 novembre, toute
la nuit suivante, et le lendemain samedi 19 novembre jusqu'à deux heures
après-midi, qu'étant monté par le puits et arrivé au fond du puits principal de
ledite mine, malgré qu'il a eu le poignet gauche démis par la chute, de
l'écroulement, ne trouvant personne dans la mine, il est monté sans corde dans
le principal puits jusqu'à 30 pieds d'hauteur, par le moyen des étais ; mais
étant parvenu à cette hauteur, le puits s'étant trouvé à cette hauteur dans le
roc, il a été contraint de rester suspendu ledit jour samedi 19 novembre depuis
deux (?) après-midi jusqu'à 4 heures aussi du soir, les jambes tournant le
puits et ses mains tenant la plus haute hausse de l'étai ; que pendant ce temps
et dans cette fatiguante attitude il a crié plusieurs fois au secours, qu'enfin
heureusement le sr. Chabillon marchand de Ste-Florine étant venu se promener
jusqu'au bord du puits il l'a entendu et tout de suite des ouvriers, des
charbonniers voisins là y ont descendu une corde par le moyen de laquelle il
est sorti de la mine, m'a aussi déclaré ledit ……. que pendant tout ce temps il
n'a eu ni faim ni soif, qu'au bord de la mine on lui avait présenté à boire et
à manger, qu'il n'a pu y rien avaler, qu'il s'est rendu après chez lui et
qu'après quelques moments de repos il avait mangé un peu de potage ; qu'il n' a
eu depuis d'autre incommodité que celle de souffrir de son poignet démis et
d'avoir des rétentions d'urines ; fait au Pont de
Lempdes le 26 novembre 1768.
Robert, Châtelain de Léotoing et correspondant du
subdélégué de Lempdes.
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Histoire de l'Académie Royale des Sciences : année 1769. -
Paris : Imprimerie Royale, 1772.
«Ce fait, & celui que l'Académie a rapporté en 1761,
font bien voir combien il est essentiel de ne pas se rebuter dans le secours
qu'on entreprend de donner aux malheureux qui sont dans le cas que nous venons
de rapporter, & combien il est contraire à l'humanité de se figurer trop
légèrement qu'ils sont péris. La Nature a, comme on voit dans de certaines
circonstances, plus de ressources qu'on oserait ordinairement en supposer».
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ADHL 1 C 2873
Extrait d'un proces verbal fait a la mine de La Combelle,
et de Celle La Barre sur le territoire de La Roche paroisse Dauzat sur allier
en auvergne, a la réquisition du Sieur Jean Feuilland Lainé proprietaire et
concessionnaire de partie des mines de cette province.
Ledit proces verbal daprès la minutte en datte du 31
octobre 1787
Aujourd'huy trente et un octobre mil sept cent quatre vingt
sept avant midy, a la requisition de M. Jean Feuilland Lainé négociant habitant
de Brassaget parroisse de Brassac acquereur & concessionnaire de partie des
mines de charbon de terre de la province d'auvergne, et notamment de celles de
La Combelle et de La Barre sur le territoire de La Roche paroisse d'auzat sur
allier
nous Jean Robert et François Reynard notaires royaux en la
Senechaussée d'auvergne aux résidances de Lempdes et de Ste-Florine soussignés
nous sommes rendus sur laditte mine de La Combelle territoire de La Roche
Brisin (?) paroisse Dauzat sur Allier a leffect non seulement de constater
l'état actuel de la valleur de ladite mine de La Combelle et celle de La Barre.
Mais encore dy prendre soit des commis principaux, soit des maîtres
charbonniers et des ouvriers les declarations des ouvrages qui ont été faits
sur et dans lesdites mines, des causes de limproduction ordinaire des charbons,
a raison des dépenses immenses qui y ont été faittes dans l'espace de quatre
mois a compter du vingt juin dernier jusquau tems actuel ;
1° avons vacqué a la visite de l'état actuel desdites sur
la partie inférieure de la mine et a laspect du couchant, y avons vu deux
cabanes attenantes couvertes, y etant entrés y avons trouvé dans chacunes un
puit pour la sortie des eaux, chacun desquels s'est trouvé garni d'une susnommé
machine a chevaux, nous avons vu extraire par un cheval a chaque machine des
barils tenants chacun cinq pots mesure du local qui font chaque pot vingt
pintes de quarente huit pouces cubes chaque mesure de paris contenant pour
chaque barril quatre mille huit cents pouces cubes qui forment cent bouteilles
de paris et pour les deux puits deux cents bouteilles chaque trois minutes et
pour chaque jour quatre vingt saize mille pintes, chacun de ces puids se sont
trouvés etre de la profondeur de quaente trois brasses, et a lextraction
desquelles eaux lon y occupe douze chevaux servis nuit et jour par la quantité
de douze a quinze ouvriers, lequel ouvrage se continue depuis quatre ans sans
aucune interruption suivant la déclaration que nous ont faitte le sieur
Guillaume Grimardias chef commis, honoré arnaud second commis, marc portonnier
troisième commis sur les mines et visiteurs des ouvrages dans les mines ainsi
que Jacques Creyssent, pierre Lapeyre, michel Senese, antoine Crose, Etienne
Mareuge, Jean Guerin, Robert Gauttard, Jean Duclos, maitres mineurs, habitants
de la paroisse Dauzat sur allier et de Ste florine ;
Ensuitte avons passé dans la cabane qui est a la distance
de soixante dix pas desdits premiers puids ou nous avons vu extraire du charbon
aussy par un cillindre a chevaux, lequel puid s'est trouvé de la profondeur de
trente brasses, ainsy que les commis et mineurs nous lont déclarés et que ce
puid est servi par trente trois ouvriers et par deux chevaux relayés de deux
heures en deux heures, auquel puid repont deux petits puids dont le superieur a
onze brasses et le plus bas a six brasses et qui font monter le charbon de
quarente sept brasses audevant duquel
puid sy est trouvé du charbon extrait de bonne qualité ;
avons ensuite passé au second puid qui est a cent dix pas
audessus du dernier que nous avons trouvé egallement exploité par un cillindre
a chevaux, duquel on extrait egallement du charbon de bonne qualité lequel puid
est de la profondeur de quarente deux brasses ainsy que nous lont déclarés des
commis et mineurs et servi par vingt neuf ouvriers et deux chevaux relayés de
deux heures en deux heures, auquel puid repont un petit puid de trois brasses
et dont le charbon s'extrait sur le fillon qui en descendant y opère encore un
descente assés rapide de dix brasses de longueur audevant duquel puid sy est
aussy trouvé du charbon de bonne qualité, duquel puid en remontant sommes
arrivés sur la partie de la mine appelée de la Barre qui est a la distance
d'environ cent pas du dernier puid, ou avons vu un puid par lequel les hommes y tirent du charbon par un tour a
bras, que lesdits commis et maitres mineurs nous ont déclarés etre de la
profondeur de quarente cinq brasses, pour arriver au fillon de la mine,
audevant duquel nous avons aussy trouvé du charbon de meme qualité lesdits
commis nous onts aussy declare que ledit puid est servi par six hommes
au midy duquel dernier puid et a la distance de neuf pas
avons observé que ledit Sieur Feuilland y a etably un cillindre pour en
extraire du charbon par une flèche a deux chevaux sur lequel sera employé le
triple des chevaux des puids ordinaires et egallement relayés de deux heures en
deux heures, attendu que le nouveau puid, quil y fait actuellement pratiquer
est ouvert de forme carrée long de cinq pieds de largeur sur sept de long, que
nous avons trouvé très bien etallonné, les autres precedents puids n'etant
ouverts que de quatree pieds en carré, lesdits commis et mineurs nous ont aussy
declatrés que sous tres peut de jours, lont pretend extraire de ce nouveau pud
du charbon, etant de la profondeur de cinquante brasses et dja arrivé au
fillon, et par lequel on espère elever et extraire le double de charbon des
autres puids en egard a sa grandeur.
nous dits notaires en continuant de replir notre mission
relative aux requisitions dudit Sieur Feuilland remontran (?) avons enquis
lesdits trois commis et tous les maitres mineurs susdits de nous déclarer
quelle etait la quantité de charbon que lon sortait des puids de laditte mine
de La Combelle dans le courant du mois de juin dernier et avant le départ du
Sieur Feuilland pour paris nous ont répondu, que lon sortait vingt deux a vingt
trois voyes par jour qui formait une quantité de cinq cents cinquante voyes par
mois que peu apres le départ dudit Sieur Feuilland, la suppression de l'air par
l'effet de grandes chaleurs et différents ecroulements qui ont bouché les
passages ont empechés les ouvriers dapprocher des fillons de charbon dans
ladite mine au point qu'il en a résulté dans le tirage desdits charbon un
deficit réel d'environ douze cents voyes pour ces quatre mois de la quantité
ordinaire quon en extrayait avant
laccident de cette suppression de lair et ecroullement ce qui opere une perte
de dix huit mille livres pour ce deficit de charbon, et en outre celle de vingt
mille livres pour le payement des
ouvriers, travaux et reparations faittes dans les mines pour detruire la cause
desdites suppressions du defaut d'air ecroullement opérés par le defaut de
pouvoir pratiquer, etayer, etallonner les longs et differends vuides o l'air
etait supprimé ou enfin pour le tirage continuel des eaux, , depenses des
chevaux, cordages, huilles et autres agraix pendant lesdits quatre mois, ayant
eté obligé de garder et doccuper pour lesdites reparations le meme susdit
nombre d'ouvriers de maniere que ce defaut de charbon et ces depenses extraordinaire
portent sur les resources des entreprises dudit Sieur Feuilland une perte de
trente huit mille livres ;
nous ont aussy declarés lesdits commis et mineurs que pour
arriver au produit courant de la valleur desdittes mines sur le pied qu'elles
le donnaient avant ledit accident, il faut encore un delay de trois mois, ce
qui causera la même depense au prorata de celle cy devant et a peut pres le
meme defdicit en charbon qui iront a pres de vingt huit milles livres etant
indispensable de fournir a ces depenses pour en conserver et en avoir le
produit que lon a lieu dattendre et dont le tout ira a pure perte pour ledit
Sieur Feuilland a environ soixante milles livres,
toutes lesquelles declarations lesdits commis et mineurs
susnommés nous ont attesté contenir verité et dont dutout avons octroyé
acteaudit Sieur Feuilland pour luy servir ce que de raison ;
fait et dressé, clos et recité sur laditte mine de La
Combelle auquel ont signés avec ledit Sieur Feuilland, lesdits Sieur
Grimardias, arnaud, et portonnier commis, lesdits ouvriers mineurs de ce enquis
ont déclaré ne scavoir signe lesdits jours et an apres midy : a la minutte ont
signés, feuilland, arnaud, portonnier, Grimardias, Reynard et Robert notaires
royaux, et plus bas y a controllé a Ste florine le premier novembre 1787 reçu
quinze sols et signé Creyssent commis
expedié audit Sieur feuilland requerant, et signé Robert
notaire royal chargé de la minutte.
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ADHL S 624
Mémoire pour la demande en concession du terrain houiller
de Marsanges, commune de Langeac, arrondissement de Brioude, département de la
Haute-Loire. (1820)
... On ignore l'époque à laquelle on a commencé à fouiller
ces affleurements houillers, sur lesquels un grand nombre de percements
irréguliers ont été faits par les propriétaires de la superficie, afin
d'exploiter les couches houille, qui souvent sont extrêment rapprochées du
jour. dès lors ces percements n'ont pu avoir que très peu de profondeur , par
suite de l'exiguité
des propriétés ou héritages qui sont à la superficie, et
des moyens de ceux qui entreprenaient ces travaux. Cette manière d'exploiter a
été signalée par les agents de l'Administration des Mines, pour le second
bassin houiller, qui est au-dessous de Brassac, au point que le Conseil des
Mines crut de son devoir de la faire connaître au gouvernement, par son avis du
3 ventose an 5 ; avis qui a formé les arrêtés des 3 et 19 floréal an 5 et 3
nivose an 6.
Il est impossible de dire jusqu'à quel point ces
exploitations sont vicieuses ; parce que ceux qui les font n'ont aucune
connaissance dans la sciences des mines, ils se contentent de percer un puits,
toujours mal boisé ou une petite galeriefort basse et étroite ; quand c'est
dans la rampe d'une des collines ; la houille en est détachée par un picotage
exécuté de haut en bas, par un ouvrier qui est presque toujours assis ; la
houille qui en provient est extrêment menue ; elle est portée au jour dans des
sacs (?) en toile, par de jeunes gens, ou au bas du puits ; d'où elle est
enlevée par un treuil, que deux hommes mettent en jeu. Ceux qui exploitent les
houillères sont des ouvriers qui s'associent plusieurs ensemble à cet effet,
afin de pouvoir payer le fermage au propriétaire du sol, qui, ordinairement
leur fournit le bois nécessaire. Dela l'origine des nombreux percements qui
existent à la superficie du sol, qui presque tous aujourd'hui sont empoisonnés
ou plein d'eau.
Cet épouvantable gaspillage n'est que la suite naturelle de
la misère des hommes qui entreprennent ce genre de travail, parce qu'ils ne
peuvent rester plus de 4 à 5 jours sans obtenir le résultat de leurs travaux ;
alors ils sont forcés de les abandonner, parce que leurs facultés pécuniaires
et intellectuelles ne leur permettent pas de parer aux accidents et aux besoins
qu'exigent un travail suivi"
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ADHL S 630
Noël Sauvat, Négociant, Entrepreneur d'exploitation de
Mines, habitant de la Commune de Ste-Florine, Département de la Haute-Loire,
Au citoyen Ministre de l'Intérieur,
Citoyen Ministre,
Suivant l'article 1e de la Loi du 28 juillet 1791, les
mines de charbon ne peuvent être exploitées que du consentement & sous la
surveillance du gouvernement. Suivant l'article 9, cette permission est
subordonnée aux facultées & aux moyens d'exploitation de l'entrepreneur, de
manière que ce commissionnaire contracte l'obligation de se conformer aux
règles de l'art & d'adopter tous les procédés qui tendent à l'amélioration
de la mine & peuvent la garantir du dépérissement.
Au mépris de ces dispositions, le citoyen Renard, de
Ste-Florine, département de la Haute-Loire, exploite la mine de Fondary, sans y
être autorisé par nulle concession. Plus occupé d'un bénéfice journalier que du
succès de son exploitation, il néglige les travaux qui peuvent l'améliorer. Au
lieu de s'occuper de l'épuisement des eaux qui l'inondent, il se contente de
l'exploiter en remontant. Déjà le feu introduit dans cette mine y fait des
ravages considérables ; elle sera bientôt embrasée, s'il néglige d'intercepter
des courants d'air qui lui donnent beaucoup d'activité. Il est même dangereux
qu'il se communique aux mines voisines. Il est urgent d'y pourvoir pour en
prévoir les suites funestes.
Je réclame, Citoyen Ministre, au nom du Commerce, la
suspension de cette exploitation jusqu'à ce que le gouvernement y ait pourvu
par les moyens qu'il jugera convenables.
Et néanmoins attendu que le Citoyen Renard profite des
travaux que j'ai exécuté dans la mine que j'exploite en vertu d'autorisation
provisoire, & que ses opérations vicieuses portent un préjudice notable à
mon exploitation.
Il vous plaise d'ordonner qu'il sera dressé procès-verbal
de l'état de sa mine par tel commissaire qu'il vous plaira d'assigner.
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ADPD S 043
En 1850, un rapport officiel s'alarme de la situation du
Puits d'Orléans à La Combelle :
«Les eaux y affluent avec abondance, on exploite au-dessous
d'anciens travaux inondés, le gaz inflammable s'y montre en quantités
considérables. Et cependant, la descente et la remonte des ouvriers,
l'extraction de la houille, l'épuisement des eaux et l'aérage s'effectuent par
un puits unique, profond de 330 m. A plusieurs reprises et de nouveau en 1849,
les concessionnaires ont été invités à ouvrir un second puits, dans le but
d'améliorer l'aérage, et surtout afin qu'en cas d'accidents qui empêcheraient
de parvenir au puits actuel, les ouvriers eussent une issue pour sortir des
travaux».
Le fait que la mine n'ait qu'un seul accès est
particulièrement grave : en 1862, 204 mineurs et 40 mineurs périssent à
Newcastle -en Grande-Bretagne- par suite d'un effondrement dans le puits unique
de leur mine.
Un an plus tard, la situation n'est pas meilleure :
«Partout dans la mine... règne une température excessive et les ouvriers
quoique travaillant nus sont inondés de sueur.»
En 1851, le IIe accès, prévu par une extension des travaux
jusqu'au vieux puits de La Verrerie n'est toujours pas fini.
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BARKER, Edward ; LA CONTERIE, Françoise de, trad. - A pied
à travers l'Auvergne, le Velay et le Vivarais en 1883. - Brioude : Watel, 1979.
«Nous entrions dans une région minière. La route était fort
noircie par les fragments de charbon que les chariots laissaient tomber ; et
chaque individu croisé semblait plus barbouillé que le précédent. Les champs
eux-mêmes paraissaient noircis. Nous montions de nouveau et au sommet de la
colline devant nous se trouvait le village de Charbonnier, qui tire son nom de
sa principale industrie.
Un endroit bizarre et retiré du monde ce Charbonnier, où
Cérès danse avec les noirs Cyclopes. Comme nous le traversions, toutes les
femmes et les enfants étaient devant les maisons vannant le blé. Une seule
batteuse servait pour tous et celle-ci était le vent, le premier vanneur qui
vint au secours de l'homme en quête de pain. Le procédé était la simplicité
même. Les femmes et les enfants saisissaient des poignées d'herbe et de balle
àleur sortie de l'aire à battre et le grain tombait à terre. Le village
ressemblait à une immense grange. La balle volait partout et s'amassait en
congères comme de la neige. Tout ceci délicieusement rustique, mais les gens étaient
pour la plupart nu-pieds et affreusement sales. Un groupe de mineurs à peine
vêtus, accroupis au soleil sur un tas de fumier avait autant l'air de sauvages
que ceux d'une quelconque Terre de Feu. Au milieu du village, il y avait une
ignoble mare où le bétail venait boire.»
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BMIU de Clermont-Ferrand, Manuscrit n°717
[...] Il n'y a pas dans le pays des mines qui produisent d'aussi
excellente houille que celle du Gros-Menil. On la recherche pour les travaux de
la forge, parce qu'elle est peu pyriteuse, et qu'elle colle bien.
La découverte du Gros-Menil est fort ancienne.
L'affleurement a d'abord été attaqué par une multitude d'exploitations
superficielles. Dans la suite, la houille acquérant de la valeur, et étant plus
recherchée, il se forma des entreprises plus importantes. On forma des puits
sur la couche, et on descendit jusqu'à la profondeur de 80 à 90 mètres.
Cependant ces entreprises prospérèrent peu, parce qu'elles
se génèrent mutuellement. Les travaux furent ravagés par l'eau et par le feu,
et les propriétaires ruinés par des procès. Il résulta de là un bouleversement
total du terrain jusqu'à la profondeur atteinte par les extracteurs.
Tout fut à peu près abandonné jusqu'au moment où les
propriétaires réunirent dans un même établissement la masse entière et toutes
celles qui l'environnent. Dès lors, délivrés des entraves qui naissent d'une
multitude de prétentions particulières, ils firent le projet d'exploiter
régulièrement et avec ensemble toute la couche. Les obstacles étaient sans
nombre, il fallait vider les immenses excavations qui étaient remplies d'eau,
se précautionner contre les éboulements qui devaient avoir lieu, contenir et
éviter les incendies qui devaient se manifester dans les parties asséchées,
traverser des espaces remplis d'air méphitique, y établir des corants salubres.
On vint à bout de vaincre toutes ces difficultés. Mr
Lamothe Jeune seul persévéra dans son projet, et Mr Richard Directeur
l'exécuta. Malheureusement le défaut de plans et de renseignements exacts ne
permit pas toujours de proportionner les moyens aux effets à produire, et l'on
consomma un temps considérable. Enfin depuis deux ans les travaux préparatoires
sont achevés et l'exploitation est en pleine activité.
On peut juger par la description de la couche de
l'importance du résultat. Il est aisé de faire apprécier les avantages qu'en
retire le Commerce et par conséquent le Propriétaire. [...]
Il est clair maintenant que l'idée de rouvrir et de
rétablir la mine de Gos Ménil est bien conçue et qu'elle est particulièrement
profitable à l'État auquel l'entrepreneur assure pour longtemps une récolte de
combustibles abondante. [...]
Quelques vastes et riches que soient les mines,
l'exploitation ne sera durable et fructueuse qu'autant qu'on prendra des
précautions rigoureuses et continuelles pour la conservation des travaux.
L'accident le plus terrible qu'on ait à redouter est le
feu. Il dévore des masses énormes de combustible, occasionne des éboulements
qui lui donnent la facilité de se propager, et menace sans cesse la vie des
ouvriers. Presque toujours c'est à la conduite imprudente des entrepreneurs ces
bouleversements. C'est pour vouloir récolter outre mesure en un seul jour
qu'ils se ruinent quelques fois pour jamais.
Le feu prend à la houille lorsque les débris légèrement
humectés en fermentation reçoivent le contact de l'air. C'est toujours dans les
vieux travaux où l'on rentre qu'il se manifeste. Il faut donc se garder de
donner accès à l'air dans les travaux sans une absolue nécessité. A plus forte
raison de chercher à en extraire la houille qui y est restée, si l'on n'a pas
les moyens d'apporter remède aux accidents possibles. C'est le cas où l'on
serait si sans ordre ni mesure, on entreprenait d'attaquer les massifs qu'on
laisse entre les différents niveaux. D'après le faux calcul d'un grand bénéfice
momentané, un éboulement ou le feu entraînant la chute des puits ruinera
l'établissement sans retour.
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BMIU, Manuscrit n°618
Orthographe moderne
Cahier de doléances, plaintes et remontrances de la
paroisse de Brassac pour être remis à leurs députés.
Les habitants de la paroisse de Brassac, réduits à
l'impuissance le plus absolue, par l'excès et l'inégalitédes impositions ;
apprenant avec effroi que les besoins de l'état causés par le désordre de ses
finances exigerait d'eux de nouveaux sacrifices, tel paraît être essentiellement
l'objet de la convocation des États Généraux dont la Nation s'occupe en ce
moment à former les éléments.
Le montant du rôle des impositions de la paroisse excède le
tiers du produit total de ses fonds, pour en convenir, il suffira d'observer qu'ils ne comprennent
pas l'entière surface du vallon où elle est située ; quoique son (sic) longueur
n'excède pas huit cents toises et sa largeur quatre cents.
Les vicissitudes éventuelles du commerce de la rivière
d'Allier dont s'occupent une partie de ses habitants ne permettent pas de
supposer que les bénéfices puissent être pris pour base d'une si énorme
contribution, la construction des bâteaux, partie jadis principale et la plus
sûre du commerce a été depuis nombre d'années attirée sur la rive opposée par
les habitants de la paroisse de Jumeaux plus avantageusement placée pour
l'achat, la conduite de ce bois et la navigation ; l'incertitude, la suspension même, [mot illisible] de la
plupart des mines de charbon de terre. L'abandon et l'inaction de plusieurs
autres ont nécessairement borné les spéculations et arrêté l'activité de ce
genre de commerce, pour comble des malheurs occasionnés cette année par la
glace, ont réduit presque à la détresse le petit nombre de ceux qui
s'occupaient du transport de ce combustible.
Les droits de péage, la pelière et autres barrages de
rivière indépendamment des dangers qu'ils multiplient sont un obstacle souvent
insurmontable, par le retard forcé qu'ils apportent à la navigation ; lorsqu'il
serait urgent de profiter des courts intervalles où les crues d'eau la rendent
favorable.
L'inégalité et l'arbitraire de la répartition des
impositions en rend plus pénible le fardeau, par le sentiment d'une injustice ;
comment ne pas s'indigner de voir les meilleurs fonds soustraits aux charges
publiques, à la faveur de privilèges abusifs qui en rejettent tout le poids sur
la classe la plus pauvre ;
Les abus exagérés ont paru devoir faire un objet essentiel
de leurs plaintes.
Cette cruelle position a souvent été exposée sans succès,
leurs justes réclamations n'ont pas été écoutées.
Ils attendent avec confiance l'amélioration de leur sort du
concours des lumières de l'auguste assemblée qui va s'occuper du bonheur
public.
Il parait indispensable pour atteindre ce but désiré que
les impôts actuellement existants soient supprimés pour être remplacés par
d'autres qui frappent sans d'ordre ni de personne sur tous les genres de
propriété et ce sur un rôle commun à tous indistinctement.
Comme les meilleures institutions ne sont point à l'abri de
la presse des hommes, pour donner aux nouvelles institutions une existence
inébranlable, les députés ne consentiront l'impôt que pour trois ans à l'effet
de former pour le même terme par le rapport des mêmes besoins l'assemblée
périodique des États Généraux, qui demeurera avant toutes choses invariablement
fixé par le décret national, qui en déterminera la forme, le régime et
l'organisation.
Pour opérer avec plus de facilité dans l'administration
intérieure des provinces, toutes les améliorations de détail dont elles seront
susceptibles qu'il y soit crée des états provinciaux dans la forme la plus
utile qui soit lié même à la constitution de l'état.
La création d'une cour souveraine qui connaîtrait de toutes
les causes civiles et criminelles sans exception apparut un objet important
pour la province.
Fait et délibéré à Brassac le deux mars
mil-sept-cent-quatre-vingt-neuf.
Vernière, Vernière, Lamothe, Bruat, Feuilland, Portanier,
Courghon, Brugière, .
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Observations d'histoire naturelle faites dans les provinces
méridionales de la France pendant l'année 1739, par M. Le Monnier, médecin. In
: La Méridienne de Paris, Suite des Mémoires de l'Académie Royale des Sciences,
année 1740. - Paris, 1744
BMIU, 16 868
Des mines de l'Auvergne
Description des Mines de Charbon de Terre de la Compagnie
Royale d'Auvergne, & des Effets singuliers d'une Vapeur qui s'y trouve
quelquefois
Ces Mines sont situées dans la Paroisse de Brassac entre le
chemin qui conduit d'Issoire à Brioude & la Rivière d'Allier : c'est sur le
bord de cette Rivière qui n'est éloignée des Mines que d'une demie-lieue, que
la Compagnie a établi son magasin, afin de transporter plus facilement le
Charbon à Paris & autres lieux de sa destination ; car la plus grande
consommation ne se fait pas dans la Province. La Presqu'île que forme en cet
endroit la Rivière d'Allier, est presque toute établie sur un banc de Charbon
de terre qui a plus de six lieues de longueur. Plusieurs Particuliers qui des
Terres en ce canton, y ont aussi des Mines qu'ils font exploiter à leurs dépens
: mais ce ne sont que des trous en comparaison des Mines de la Compagnie :
& comme ces Particuliers ne sont pas la plupart en état de faire les
dépenses nécessaires pour parvenir jusqu'aux meilleures veines de Charbon ;
celui qu'ils tirent, pour ainsi dire, à la superficie étant presque tout
terreux & de mauvaise qualité, ne sert qu'à décrier le Charbon de la
Province, qui, à ce que je crois, vaut bien tout autre.
Je me suis attaché à observer les Mines de la Compagnie,
tant parce qu'elles sont plus vastes, plus profondes, & qu'elles
fournissent du Charbon plus parfait, que parce qu'elles sont plus sûres &
moins sujettes aux écroulements, par la grande attention qu'on apporte à les
étayer & à creuser à propos. D'ailleurs j'étais invité par la politesse de
MM. les Députés qui veillent à l'exploitation de ces Mines, & qui m'ont
fourni tous les secours dont j'ai eu besoin pour faire mes observations.
On descend dans ces Mines par différents puits qui sont sur
une petite éminence au-dessus du Village de Brassac, dont les uns servent à monter
les sacs de charbon qu'on a tiré des galeries, les autres à épuiser les eaux de
la Mine : ceux-ci ont plus de 250 pieds de profondeur, & sont creusés avec
tant d'art, qu'ils reçoivent toutes les eaux de la Mine, en sorte que le
Charbon est parfaitement sec dans les galeries. L'épuisement des eaux est un
travail continuel, & qui cause de grandes dépenses : on élève
alternativement, par le moyen d'une machine à roues dentées qu'un Cheval fait
mouvoir, deux grands seaux qui versent en dehors les eaux de la Mine. On mesure
avec grand soin chaque jour l'abaissement de l'eau dans les puits ; & quand
le temps est sec, on fait baisser l'eau de 6 pouces en 24 heures : mais on
observe des crues bien sensibles après les temps de pluies ; car une pluie un peu
abondante détruit quelquefois le travail de plusieurs jours. Cette Observation,
pour le dire en passant, est bien contraire au sentiment de ceux qui prétendent
que les eaux de la pluie ne sauraient pénétrer les terres assez avant, pour
entretenir les Fontaines, & qui se prévalent d'une Expérience de M. de la
Hire, qui n'est conséquente que pour certaines terres fortes, & non pas
pour celles qui sont sabloneuses ou pierreuses ; car il est clair, par les
mesures prises journellement dans nos puits, que les eaux de la pluie pénètrent
fort bien jusqu'à la profondeur de 250 pieds.
On se sert du tourniquet simple pour monter le Charbon par
les autres puits ; & c'est au bas de ceux-ci qu'aboutissent les galeries.
Les grandes galeries ont, autant qu'il est possible, des puits à chacune de
leur extrémité, par où l'air entre continuellement dans la Mine, & supplée
à celui qui est détruit par les vapeurs & la respiration des Ouvriers : ces
puits sont carrés & d'une largeur raisonnable : comme ils sont étayés dans
toute leur étendue avec des chevrons de Pin, & que ce futage est partout
garni de rames, il ne m'a pas été possible d'avoir un état bien exact des
différentes matières qui sont au-dessus du Charbon, ni de mesurer les
dimensions de leurs lits. Voici cependant ce que j'ai pu apercevoir : Les
premières couches sont d'une terre noirâtre, légère & bitumineuse ; ensuite
on trouve un banc de roc grisâtre & très dûr, qui a bien 7 ou 8 toises
d'épaisseur, suivant le rapport des Ouvriers : Au-dessous de ce Rocher reparaît
la terre noirâtre, mais bien plus bitumineuses ; après cette terre suit un lit
de schistes, au-dessous duquel on trouve enfin le Charbon dont il y a de
plusieurs qualités.
Le Charbon n'est
pas ici disposé par lits, veines ou Filons, comme les matières métalliques ;
c'est une masse homogène telle que les carrières à sable, en sorte qu'on peut
creuser en tout sens avec profit : mais on observe que le Charbon superficiel
est d'une moindre qualité ; qu'il est terreux, peu flambant, & n'échauffe
que médiocrement ; au lieu que celui qui se tire à une plus grande profondeur
est bien plus parfait ; le plus beau Charbon en mottes sèches, fragiles,
légères & brillantes s'appelle le Puceau ; il ne se trouve qu'à une grande
profondeur, où les Particuliers qui ont des mines, ne s'embarrassent pas
d'atteindre ; les Mines de la Compagnie fournissent déjà du Puceau en quelques
endroits.
Quand je dis que la Mine de Charbon est une masse homogène,
j'en excepte cependant quelques veines de Schistes ou fausse Ardoise, qui la
traversent : mais ces veines sont assez rares, & n'ont pas beaucoup
d'étendue. Quand on les rencontre, en suivant une galerie, on en est quitte
pour les casser au pic, afin de passer outre. Ce Schiste est très dur au fond
de la mine ; mais quand il a été exposé pendant quelques jours à l'air, il
s'effeuille & se réduit en poussière. M'étant amusé à considérer les
morceaux de ce Schiste, qui avait déjà éprouvé l'action de l'air, j'ai aperçu
les impressions de plusieurs espèces de Fougères, qui me sont presque toutes
inconnues ; je crois cependant avoir
remarqué l'impression des feuilles de l'Osmonde Royale dont je n'ai jamais vu
un seul pied dans toute l'Auvergne.
Quelquefois, pour ne pas interrompre le travail de ceux qui
sont occupés à monter le Charbon en haut des puits, on a plutôt fait, pour se
débarrasser des fragments de Schistes, de faire une espèce de cul-de-sac, &
d'y brouetter ces rocailles : cette raison a principalement donné lieu à
plusieurs de ces culs-de-sac que l'on rencontre de temps en temps dans les
galeries. Or dans les grandes chaleurs de l'Été ces endroits sont souvent
remplis d'une vapeur qu'on appelle la Pousse, & qui devient quelquefois
funeste aux Ouvriers qui travaillent aux Mines. On dit que si un homme y
restait pendant quelques minutes, il serait bientôt suffoqué. Cette vapeur ne
se borne pas seulement aux culs-de-sac, elle infecte aussi quelquefois les
galeries, & même les puits de descente ; mais elle ne règne avec tant de
violence, que dans les plus grandes chaleurs de l'Été, & alors il faut
absolument cesser les travaux de la Mine, on y courrait risque de la vie. On
observe que plus les Mines ont de puits, plus les galeries sont larges &
sont proprement entretenues, moins la Pousse est dangereuse, & plus
aisément dissipée ; c'est pour cette raison sans doute que les Particuliers
sont obligés de fermer leurs mines pendant l'Été, à cause du petit nombre de
puits dont elles sont percées, & de la mal-propreté de leurs galeries.
La nature & le cours de la Pousse présentent des
phénomènes bien singuliers ; elle s'élève de 5 à 6 pieds dans les culs-de-sac,
elle passe rarement deux pieds dans les galeries, souvent elle rampe à terre,
& s'élève à peine de six pouces ; & un Mineur me mena une fois dans un
coin au bas d'un puits, où il ne paraissait point y avoir de Pousse ; il fit un
trou qui avait à peine neuf pouces de profondeur, il en fut aussitôt rempli.
Elle n'abandonne pas ordinairement le parterre des galeries ; mais j'ai été
fort surpris d'en trouver une lame épaisse d'un pied & demi, & qui
traversait une galerie ; en sorte que le haut et le bas de cette même galerie
étaient absolument vides de Pousse.
Elle ne présente rien à la vue, au toucher ni à l'odorat ;
elle n'est point inflammable ; on n'aperçoit non plus aucune humidité ; mais l'usage
a appris un moyen sûr & facile de le reconnaître. On ne descend jamais dans
les Mines sans avoir plusieurs lampes allumées ; aussitôt que la lampe est dans
un endroit oùil y a de la Pousse, elle s'éteint comme elle ferait si on la
mettait sous le récipient de la machine pneumatique. La vivacité & la
promptitude avec laquelle la lampe s'éteint fait juger de la force ou de la
qualité de la Pousse ; & en promenant cette lampe successivement en
différents endroits, on détermine son étendue & sa direction. On a grand
soin, quand quelqu'un descend dans les puits, de regarder avec attention la
lumière de la lampe que tient celui qui descend, & on ne manque pas de
retirer la corde aussitôt qu'on l'aperçoit s'affaiblir ou s'éteindre. Ceux qui
vont dans les galeries dans les temps où l'on craint la Pousse, portent
toujours une lampe en avant, & dès qu'elle s'éteint, ils cessent d'avancer
& viennent la rallumer à d'autres qui sont fixées d'espace en espace pour
cet usage.
Des Phénomènes aussi étonnants excitaient ma curiosité,
& l'envie de découvrir quelque moyen de dissiper cette vapeur, ou du moins
de garantir les Ouvriers de ses funestes effets, ne m'engageait pas moins à les
approfondir. J'hazardai d'entrer dans un cul-de-sac rempli de Pousse, j'y
restai près d'une demi-minute, & voici ce que j'éprouvai. Je sentis tout
aussitôt une difficulté de respirer, comme si on m'eût serré fortement la
poitrine : le visage et la gorge se gonflèrent considérablement, les yeux
devinrent cuisants, & je versai quelques larmes ; j'eus des tintements dans
les oreilles ; enfin je sortis quand je m'aperçus de quelques étourdissements :
quand j'eus respiré à mon aise au bas d'un puits, je commençai à réfléchir sur
chacun de ces accidents ; ils me parurent être les mêmes que ceux qui
surviennent, quand on s'abstient de respirer, en se bouchant la bouche & le
nez : en effet je me mis aussitôt dans cette situation, & je trouvai une
entière conformité dans les effets, à cela près que les yeux ne me cuisaient
pas tant. J'allai porter par hazard la lampe dans la Pousse dont je srtais,
& par la lenteur avec laquelle je la vis s'éteindre, je la jugeais beaucoup
diminuée : les Charbonniers dirent que je l'avais bue, & j'appris d'eux
qu'en s'obstinant à travailler dans des endroits où il n'y en avait qu'une
petite quantité, ils venaient souvent à bout de la boire toute : mais ils ne se
hazardent jamais à faire cette dangereuse Expérience, qu'ils n'aient auparavant
bien éprouvé avec la lampe si elle n'est point trop forte. Étonné de cette nouvelle
Expérience, je me fis conduire aussitôt à un autre endroit oùil y avait un peu
de Pousse ; elle n'était élevée qu'à deux pieds de terre, mais elle était très
vive ; car la lampe s'y éteignait, comme si on l'eût soufflée. Comme je ne
courais aucun risque à cause de son peu d'élévation, j'y entrai avec plusieurs
Charbonniers, & j'y restai un bon quart-d'heure à leur faire différentes
questions : nous avions les jambes & le bas de nos habits dans la Pousse,
mais non pas le reste du corps : en sorte que nous ne pouvions pas absorber la
vapeur par la respiration. Au bout de ce temps, je posai la lampe dans la
Pousse, elle s'éteignit), mais très lentement. Je la fis rallumer, & je
restai dans la Pousse encore un quart-d'heure, après quoi y ayant mis la lampe,
elle s'y conserva sans s'éteindre, ni même s'affaiblir. Je me mis ensuite
vis-à-vis d'un petit cul-de-sac tout rempli de Pousse, & qui éteignait la
lampe fort vivement : je m'arrêtai directement vis-à-vis de l'orifice de ce
cul-de-sac ; en sorte que je n'étais point dans la Pousse, mais je n'en étais
éloigné que de deux ou trois pieds ; j'y restai quelques temps, & la lampe
que je tenais dans mes mains s'affaiblissait, & allait s'éteindre si je
n'eus reculé quelques pas ; je rapportai la même lampe dans le cul-de-sac,
& la Pousse me parut considérablement dissipée : il semblait que nos habits
l'eussent attirée ; les Charbonniers m'apprirent à cette occasion que
lorsqu'ils voulaient épuiser la Pousse qui les empêchait de travailler en
quelque endroit, ils mettaient vis-à-vis un grand réchaud de feu qui la
détournait en l'attirant.
Il paraît par ces Observations que la POusse est du genre
des Vapeurs qui ont la propriété de fixer & de détruire l'élasticité de
l'air, telles que celles qui s'élevaient des caves du Boulanger de Chartres
dont il est parlé, dans l'Hist. de l'Acad. Année 1710. telles que sont encore
celles qui s'élèvent du Charbon de bois allumé, qui suffoquent ceux qui en
brûlentdans des lieux étroits & bien fermés : enfin celle de la vapeur d'une
chandelle, d'une mèche de soufre, & d'une infinité d'autres matières qui
tuent sur le champ les animaux qu'on y enferme ; du moins la conformité des
effets de la Pousse avec ceux que produit la vapeur des matières dont je viens
de parler, semble autoriser ce sentiment : cependant je ne saurais dissimuler
que l'air dans lequel se trouve la Pousse, m'a paru avoir autant de ressort que
celui qu'on respire hors la Mine ; car y ayant mis mon baromètre, j'ai trouvé
la hauteur du Mercure dans la Pousse de 26 p 8 l 7/12, tandis qu'au haut du Puy
de la Forge il n'était suspendu qu'à la hauteur de 26 p 6 l 7/12.
De plus le Thermomètre qui, au haut du même Puy de la
Forge, était dans l'air libre à 22 degrés au-dessus du terme de la congélation,
n'était plus qu'à 16 1/2 au fond de la Mine & dans la Pousse : Ainsi donc
la plus grande élévation du Mercure dans le Baromètre, & le plus grand
abaissement du Thermomètre, prouvent que l'air dans lequel nage la Pousse, est
plus dense que l'air extérieur.
Voici maintenant les Expériences que j'ai faites pour
détruire cette Vapeur ; elles sont fondées sur ma conjecture, qu'elle détruit
l'élasticité de l'air. J'ai fait descendre un bon réchaud de feu avec une
bouteille de vinaigre ; j'ai fait mettre ce réchaud dans un cul-de-sac où il y
avait beaucoup de Pousse ; & comme le feu s'y éteignait rapidement, je
m'empressais de verser dessus quelques cuillerées de vinaigre qui achevèrent de
l'éteindre, & ne dissipèrent point la Pousse : elle me parut, quand j'y mis
la lampe, presque aussi vive, qu'avant que j'y eusse fait mettre le réchaud. Je
remontai à terre, & je fis allumer de grosses mottes de charbon que
j'enfermai dans une cage de fer : je fis aussi rougir à la forge une douzaine
de gros cailloux, & je pris des morceaux de toile à faire des sacs, avec
une bonne provision de vinaigre. Dès que je fus arrivé en bas avec tout cet
appareil, j'allai à un endroit où il y avait de la Pousse ; après avoir fait
l'essai avec la lampe j'y jetais deux ou trois de mes pierres enveloppées dans
de la toile imbibée de vinaigre ; il s'éleva aussitôt une vapeur épaisse d'une
odeur forte de vinaigre que j'eus soin d'entretenir en y versant quelques
autres cuillerées. Quand je remis la lampe, sa lumière se conserva très vive,
& sans s'éteindre : j'allais faire la même Expérience à divers endroits,
qui me réussit de même, & j'en chassais la Pousse assez promptement ; mais
au bout d'une heure et demie, quand je vins à l'endroit où j'avais fait la
première Expérience, je trouvai qu'elle commençait à revenir, & le
lendemain il y en avait autant que la veille, avec cette différence seulement
qu'elle paraissait moins vive ; j'ai projeté du Tartre en poudre sur des
charbons ardents que j'avais mis dans la Pousse ; mais elle est pareillement
revenue au bout d'un certain temps. Je crois qu'on trouvera toujours cet
inconvénient, quelque matière qu'on emploie pour dissiper cette vapeur ;
savoir, qu'on chassera bien celle qui est présente, mais qu'on ne pourra pas
empêcher qu'il en vienne d'autre à la place. Comme je n'avais pas dans ce
Village quantité d'autres choses que j'aurais pû éprouver, je m'en suis tenu à
ces expériences.
MAURIN, Jean (Capitaine Cobra). - Résistance en val
d'Allier : petites histoires de la grande histoire. - Brioude, 1992.
«Un sabotage efficace en gare d'Arvant
Le 3 août au matin, on me fait savoir que des wagons
partent pour l'Allemaghne, en provenance de l'Espagne. Ils ont dû arriver par
la ligne de Bézier, car la ligne Paris-Nîmes est interdite au trafic
marchandises en raison des coupures, le trafic voyageurs s'effectuant par
transbordements successifs aux coupures. Je décide d'accompagner l'équipe de
sabotage, la protection étant assurée par le Corps Francs d'Arvant.
Comme pour les sabotages des voies, les gardes-voies se
laissent facilement neutraliser, pour la forme. Il y a sur une voie de garage
quatre wagons destinés à l'économie allemande : deux wagons de spath-fluor, un
wagon de peaux de moutons nopn tannées et de grosses balles pressées de poil de
chameau ou autres ; le quatrième wagon contient des plantes médicinales, des
capsules de liège, de gros fagots de racines de réglisse. Cette marchandise ne
doit pas arriver à destination. Les
sacs de spath sont éventrés et partiellement déversés sur le ballast, les deux
autres wagons sont incendiés. Avant d'y mettre le feu, je demande à deux gars
de porter deux bottes de réglisse sur le talus de la gare qui borde la route de
Vergongheon, ce «bois doux» fera le bonheur des gosses et permettra même de
parfumer l'eau de boisson sur les tables privées de vin (quatre litres par
mois).
Je ne pensais pas que ça ferait aussi le bonheur des
fumeurs privés de tabac, et l'un de ceux-ci, fumeur enragé, chargea un de mes
camarades de me remercier. Par contre, les habitants du coin furent empuantis
pendant plusieurs jours par l'odeur des peaux et des poils brûlés.»
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Rapport des Renseignements Généraux (5 août 1944)
«Les nombreux attentats perpétrés par le maquis contre les
voies ferrées et ouvrages d'art ont largement contribué à une diminution du
trafic... le matériel hors d'usage est irremplaçable... comme la majorité des
transports est accordée à l'armée
d'occupation, le trafic marchandises devient de plus en plus difficile et
précaire.»
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La Voix du Peuple, organe régional du PCF, 27 Avril 1946
Discours de Robert Paul prononcé à l'enterrement des
victimes de l'accident du Puits Bayard
Mesdames, Messieurs,
Il y a à peine trois mois nous accompagnions à sa dernière
demeure notre camarade ……, quelques semaines plus tard, c'était le corps du
jeune ……, deuxième victime du travail que nous suivions dans ce même cimetière.
Nous pensions alors que l'adversité qui, dès ce début
d'année 1946, s'était abattue sur notre cité minière nous serait alors plus
clémente.
Hélas ! il n'en était rien et, à quelques semaines
d'intervalle, la mort, violente et aveugle, vient une fois encore, d'apporter
la douleur et la consternation dans notre corporation minière et d'endeuiller
les familles ……. et ………
Aux mines de Brassac et Charbonnier, où tous les ouvriers,
comme dans tous les puits de mines de France, travaillaient pour que sorte
toujours plus de charbon, base du relèvement de toute l'activité économique de
notre pays, où chacun, avec sa conscience de patriote, de fils de France, qu'il
soit Italien, Espagnol, Portugais, Yougoslave, Polonais -quoi qu'en disent certains
esprits pessimistes, doublés de défaitistes, signant leurs manifestes de la
formule de vrais Français- tend son effort pour un rendement toujours accru.
Soudain, le mercredi 3 avril, vers 9 h 30, au Puits Bayard,
une rumeur se répand dans la mine. Un éboulement vient de se produire à la
taille n°503.
Deux ouvriers piqueurs, nos camarades ……., 22 ans, …………, 26
ans, sont ensevelis sous l'éboulement.
Aussitôt, les équipes de sauveteurs, composées dans leur
majorité de volontaires, se mettent au travail.
La tâche est rude, périlleuse, les recherches rendues
difficiles, car l'on ne peut avoir aucune indication sur la partie de la taille
où peuvent être ensevelis nos camarades.
Pendant 11 jours sans une seule minute d'arrêt, c'est la
lutte dans des conditions de travail rendues chaque jour plus dangereuses par
le terrain qui ne cesse de travailler.
Plus pénible par la décomposition des corps.
L'on ne louera jamais assez quelle preuve de courage et
d'abnégation ont fait montre les équipes de sauvetage tant ouvriers qu'agents
de maîtrise.
Vendredi 12, après 10 jours de recherches, un premier corps
est retiré, c'est celui de notre jeune camarade André Martin, que nous avons
accompagné hier à sa dernière demeure.
Pendant que nous accompagnions au champ de repos ……., le
corps de notre cher camarade …………, que nous pleurons tous aujourd'hui, est
retrouvé et ramené à la surface.
Des causes de l'accident, et sur un chapitre aussi
douloureux, nous n'avions aucunement l'intention d'ouvrir une polémique.
Mais devant la relation de l'accident par une certaine
presse, présentant l'éboulement comme l'accident type -banal-, où l'on laisse
entendre que nos malheureux camarades ont pu commettre une erreur, voire une
faute, qui peut leur avoir été fatale.
La conscience de tous les mineurs -de tous ceux qui,
quotidiennement, vivent le dur et dangereux métier de mineurs de fond- s'est
révoltée devant de pareilles insinuations.
Il est trop facile de rejeter certaines responsabilités sur
ceux à qui la mort a pour toujours clos la bouche.
Et c'est pour cela, qu'en tant que représentant de la CGT,
dûment mandaté, je me dois de venir ici, sur cette tombe, prendre la défense de
nos deux camarades.
En ma qualité de délégué-mineur de la division
Bayard-Charbonnier, je tiens à apporter ici -publiquement- les constatations
que j'ai pu faire et qui seules peuvent être causes de la mort de nos deux
camarades.
L'éboulement de la taille N°503 peut être imputable à
différents facteurs :
A l'emploi de matériel de boisage (principalement, les bois
qui sont défectueux, à moitié pourris, n'offrant donc aucune résistance en cas
de charge du terrain).
A l'exploitation par taille de certains quartiers
Bayard-Charbonnier où les terrains sont très accidentés, avec toit et mur très
friables, n'offrant aucun élément de sécurité. Cette sécurité en est d'autant
plus compromise, lorsque les tailles, et c'est ici le cas de la 503, sont
prises en retrait avec section de 3.50 m passant sous une double voie où
s'effectue un roulage continuel, ce qui ne peut qu'aider au tassement du
terrain .
A ce que plusieurs tailles et une remonte étaient en
exploitation et ce sur une distance non réglementaire.
Seul est et doit tenu pour responsable de l'accident le
mode d'exploitation effectué à Bayard.
Cette mise au point faite.
Je me fais l'interprète de la Fédération Nationale des
Travailleurs du Sous-Sol, de l'Union des Syndicats Ouvriers du Puy-de-Dôme, de
la Fédération des Mineurs du Centre, de l'Union Locale des Syndicats, ouvriers
d'Issoire, de l'Union des Femmes Françaises de Saint-Germain-Lembron ; de tous
les ouvriers, employés et agents de maîtrise syndiqués des mines de Brassac et
Charbonnier, pour prier Mme veuve ……, la famille …….. et …….. de bien vouloir
accepter nos condoléances attristées.
A toi, mon cher Roman, que nous aimions pour ta droiture,
ton esprit compréhensif du devoir de la classe ouvrière dans la lutte présente.
Au nom de tous, je te dis dors en paix et adieu.
(Les mineurs tués étaient d’origine polonaise).
Le calcul des Charbonnages de France -en 1980, 416 F de
prix de revient pour la tonne de charbon français contre 300 F pour le charbon
importé- ne tient pas compte de tous les paramètres. Examinons les.
Les 300 F par tonne du charbon importé n'incluaient pas les
éléments suivants :
- l'amortissements des achats de mines à
l'étranger : 78 F par tonne ;
- mise en
place d'une flotte charbonnière : 16 F par tonne ;
- coût des
infrastructures portuaires nécessaires pour l'importation du charbon : 8 F par
tonne ;
-
indemnisation des mineurs - 3 000 emplois directs- et autres travailleurs - 6
000 emplois induits- réduits au chômage suite à la fermeture des mines : 216 F
par tonne ;
- manque à
gagner des cotisations sociales des travailleurs réduits au chômage : 244 F par
tonne ;
- perte de
ressources fiscales car les Charbonnages de France, ayant moins d'activité,
paient moins d'impôts : 11 F par tonne ;
- perte de
ressources fiscales au titre de l'impôt sur le revenu, car les chômeurs paient
moins d'impôts que les actifs : 23 F par tonne ;
- perte de
ressources fiscales au titre de la TVA, car les chômeurs consomment moins que
les actifs : 50 F par tonne.
La section économique du PCF, auteur de ce calcul, arrivait
à un total de 946 F par tonne de charbon importé, plus du double du charbon
français !
MAZAURIC, Claude et DARTIGUE, Jacques. - Ladrecht. -
Éditions Sociales, 1982.
Dumas,
Louis. - Horizons noirs : Tome II, La Fosse commune. - 1969.
L’auteur raconte son enfance dans le bassin de
Saint-Étienne, et à La Combelle. Pages 24-27
« Il n'y a pas qu'à la mine qu'on gagne des sous,
disait aussi mon père !...
Bien sûr, s'il n'y avait pas eu la guerre, tu aurais pu
apprendre un bon métier, un métier où tu serais été ton petit patron, moi,
j'aurai bien voulu, mais on était neuf à la maison, neuf gosses, plus le père
et la mère. A sept ans, je gardais les vaclhes, et à dix ans, je labourais
déjà; avec le père, de l'aube jusqu'à la nuit, presque sans arrêt, juste
pendant l’heure des repas, un repas vite avalé, car il ne s'agissait pas de
flâner à table, et de s'endormir !
La tête enfouie dans les mains, mon père ressassait sans
cesse les histoires de sa jeunesse, neuf gosses à la rnaison, et neuf qui ne
mangeaient pas toujours à leur faim ; on couchait au fond de l'écurie, sur des
paillasses bourrées de feuilles de chêne, les trois vaches chauffaient la pièce
l'hiver, une pièce basse et sombre, que le lumignon éclairait à peine, le menu
ne variait jamais : pain noir et pommes de terre rondes, et fromage sec, sec et
dur, si dur, que notre père était obligé de le couper avec une hachette, les
lames de couteaux ne pénétraient pas dans la croûte ! et on rognait ça des
heures durant, en gardant les vaches et les moutons ! et on ne buvait que de
l'eau claire, le vin, c'était pour les gros fermiers, et pourtant, les gens
vivaient plus vieux qu'aujourd'hui, et puis à treize ans, on s'en allait gagner
sa vie, c'était pourtant dur, de quitter sa famille et son village, moi, je
suis parti de la Haute‑Loire dans le Puy‑de‑Dôme à pied, avec
juste un petit casse‑croûte dans la musette, juste de quoi faire la
route. Après, tu te débrouilleras, avait dit mon père !
Oui ! de Barsac à La Combelle, à pied ! Dans notre pauvre village, IlOUS n’étions qu'une pauvre famille et
notre ferme était entourée de pauvres terres, si pauvres, que malgré des
labours successifs, elles ne parvenaient pas même à assurer la nourriture
d'une famille, encore moins bien sûr, si elle était en nombre comme la nôtre !
Neuf gosses, plus le père et la mère, ça faisait onze personnes à table, onze
personnes à l'appétit solide, aiguisé par le dur labeur, et par l'air pur de
nos montagnes !
A treize ans, je suis parti, comme mes frères plus âgés que
moi ; seules, les filles sont restées à la
maison, pour aider la mère usée par le travail et les maternités. Mes frères
aînés sont partis à Paris, deux ont réussi à attraper le balai, ce balai qu'on
jette en l'air, pour savoir qui aura la place de balayeur. Les autres sont
morts, comme meurent les pauvres, souvent ignorés, et comme on n'avait pas les
moyens de faire revenir leurs corps, ils sont enterrés là‑bas, je ne sais
pas mêIne où !
Et à cet instant du récit, les larmes coulaient le long des
joues de mon père. Qui n'a pas vu ça, n'a rien vu !
Mes soeurs sont restées au village, et se sont mariées avec
de pauvres paysans comme nous, avec comme seule distraction, un gosse qui tombe
chaque année sur les bras !
Moi, je suis venu travailler à la mine, la Taupe, Brassac
!. ..
Frugières-les-Mines, La Combelle, Saint-Eloy, je les ai
tous fait ; les puits, et c'est partout pareil, on risquait sa peau pour gagner
juste de quoi ne pas crever. Au début, je mangeais chez la tante de Jumeaux,
mais après, à dix-sept, dixhuit ans, j'ai voulu sortir, comme les autres, faire
sonner les sous dans ma poche, le jour de la paye. Les samedis, on s'en allait
à pied, après la journée, une journée pourtant bien dure, eh bien, on allait
danser à Largelier, à Coudes, à Issoire, on buvait sec, parfois, toute la paye
y passait !
Mon père aussi, disait toujours, il n'y a qu'à la mine
qu'on gagne des sous. J'aurais dû me faire mineur, au lieu de faire paysan,
remuer la terre toute une année, du matin au soir, et même après la nuit
tombée, quand il y avait un beau clair de lune, suivre la charrue des journées
entières, et puis, au moment de ramasser la récolte, subir la grêle, ou une
gelée précoce !
Oui, il n'y a qu'à la mine qu'on gagne des sous !
Il n'y a qu'à la mine, qu'on travaille comme des forçats,
au fond des galeries, presque à plat ventre, comme les taupes, ou attaquer le
« massif » nus comme des vers, couverts de sueur, avec parfois, des gouttes
d'eau glacée qui suinte entre le boisage et qui vous coule dans le dos !
Qui n'a pas vu ça, n'a rien vu ! ajoutait mon pere.
Tu en sais du chapitre aujourd'hui, lançait par
intermittence ma mère, en clignant de l'œil, les jours de paye, Monsieur a la
langue déliée, c'était vrai, et un verre de plus permettait à mon père de
poursuivre son récit d'une voix pâteuse !
Oui, tu peux me croire, on allait danser à Largelier, à
Coudes, à Issoire, et si on avait fait une bonne quinzaine, on allait manger la
soupe aux choux jusqu'à Brioude !
Qui n'a pas vu ça, n'a rien vu !
Quand l'heure du régiment a sonné, il me restait trois
francs, j'avais eu juste pour payer ma pension. Heureusement, j'allais pas
loin, à Clermont-Ferrand, et puis un jour, on est allé jusqu'à Marvejols, on
avait fait du chemin, en couchant toutes les nuits à la belle étoile !
Marvejols ! c'est là, que j'ai connu votre mère !
On s'est dit vous longtemps après s'être maries, reprenait
ma mère, en essuyant une larme furtive qui perlait toujours au coin de ses yeux
! On s'est marié un peu à la sauvette, avant la fin de son régiment, et puis
quand il est parti à la guerre, j'avais encore la gosse sur les bras ! et pas
un sou dans la poche ! La guerre ! des années d'attente, des nuits et des nuits,
longues et angoissantes ! »
La Liberté, 13 Février
1952
Contre la fermeture de la mine de La Taupe
M. Jean-Michel Flandin intervient à l'Assemblée Nationale
Voici, d'après le «Journal Officiel», le compte-rendu de la
séance de l'Assemblée Nationale du 8 février, au cours de laquelle M.
Jean-Michel Flandin, député du Puy-de-Dôme, est intervenu contre la fermeture
de la mine de La Taupe (Haute-Loire).
M. le président. - M. Jean-Michel Flandin expose à M. le
Ministre de l'Industrie et de l'Énergie que l'annonce de la fermeture prochaine
de la mine de La Taupe (Haute-Loire) a provoqué une légitime émotion parmi
toutes les couches de la population de la région minière. De nombreuses
démissions de municipalités unanimes, tant dans la Haute-Loire que dans le
Puy-de-Dôme, départements intéressés par cette fermeture éventuelle, témoignent
de l'atteinte grave à la vie économique de cette région que serait une telle
mesure. Il lui demande comment il envisage de revenir sur cette décision
inopportune.
La parole est à M. le Ministre de l'Industrie et de
l'Énergie.
M. Jean-Marie Louvel, ministre de l'Industrie et de
l'Énergie. - La question qui m'est posée par M. Jean-Michel Flandin me donne
l'occasion de préciser, une fois de plus, devant l'Assemblée Nationale, la
politique suivie par les Charbonnages de France et approuvée par le ministre de
tutelle, en ce qui concerne la production charbonnière.
Cette politique, mes chers collègues, ainsi que j'ai déjà
eu l'occasion de vous l'exposer à plusieurs reprises, vise à augmenter la
production avec un prix de revient minimum. Elle consiste à donner au personnel
des mines la possibilité de concentrer tous ses efforts avec le maximum
d'efficacité.
Cette politique a conduit à la fermeture d'un certain
nombre de puits de mine dont le gisement était pratiquement épuisé et où la
productivité était insuffisante. Mais je précise que, dans la quasi-totalité
des cas, les mineurs des puits ainsi fermés ont été employés dans des puits
voisins à meilleur rendement.
Par conséquent, cette politique n'a nullement conduit,
comme on l'a dit à tort, à augmenter les besoins d'importation, mais elle a
permis d'accroître, au contraire, la production nationale et, partant, de
diminuer les importations.
Je rappelle d'ailleurs les résultats qui ont été obtenus.
En 1951, la production nationale a dépassé 55 millions de
tonnes contre 41 millions en 1946. En 1951, le rendement a atteint 1 350
kilogrammes par mineur de fond contre 926 kilogrammes en 1946.
Sur le plan légal et juridique, la gestion des mines
n'appartient pas au ministre de tutelle : elle appartient à la direction et au
conseil d'administration des Charbonnages de France et des Houillères de
bassin. Cela résulte de l'article 2 de la loi de nationalisation des
combustibles minéraux, qui précise que les Charbonnages de France et les
Houillères de bassin sont «des établissements publics nationaux, de caractère
industriel et commecial, dotés de la personnalité civile et de l'autonomie
financière».
Le ministre de l'Industrie et l'Énergie, tuteur des
Charbonnages de France, ne peut donc se substituer à cet organisme pour un acte
individuel de gestion, ni revenir sur une décision qui a été adoptée par le
conseil d'administration responsable.
Le ministre de l'Industrie et de l'Énergie dispose bien du
pouvoir de contrôle sur la politique générale -et j'ai dit que j'approuvais
celle-ci- mais il ne dispose, à l'occasion d'une décision particulière
concernant la fermeture d'un puits de mine, que des pouvoirs que lui donne la
loi minière. Ceux-ci lui permettent seulement de s'assurer qu'une décision ne
compromet pas l'utilisation rationelle, à longue échéance, des gisements de
charbon qui constituent une richesse nationale, et qu'elle ne risque pas d'être
préjudiciable à la satisfaction des besoins des consommateurs.
Je tiens une fois de plus à affirmer qu'aucune des
fermetures de puits de mines qui sont déjà intervenues n'étaient critiquable de
ce double point de vue.
J'en viens maintenant au cas particulier de la mine de La
Taupe.
La fermeture de cette mine a été précédée d'une enquête
minutieuse qui a confirmé que le gisement était en voie d'épuisement et que
l'exploitation des lambeaux restants ne pouvait se faire qu'avec un rendement
sans cesse décroissant.
A la suite des démarches des parlementaires qui, à maintes
reprises et fort légitimement, sont venus ne trouver, j'ai tenu à envoyer sur
place des missions d'enquête d'ingénieurs des Mines et les renseignements que
je viens de vous donner m'ont été confirmés.
Le rendement de ce puits est déjà très mauvais puisqu'il se
situe aux environs de 600 kilogrammes contre 1 100 pour la moyenne du bassin
d'Auvergne et plus de 1 300 pour l'ensemble des mines françaises. La perte à la
tonne marchande peutêtre évaluée aux environs de 2 000 francs. L'exploitation
des ces puits de mines de traduirait donc par un déficit de près de 200
millions de francs par an.
La fermeture de cette mine a donc été décidée, mais les
ouvriers mineurs du fond -je vous en donne assurance- ne seront pas licenciés.
Ils seront tous, s'ils le désirent, réemployés au puits voisin du groupe de
Brassac, distant de 5 kilomètres.
En outre, pour répondre au désir exprimé par les
parlementaires de la région, j'ai demandé aux Charbonnages de France d'atténuer
les inconvénients que présentent les mutations indispensables, en opérant
celles-ci par petits groupes et au fur et à mesure que les chantiers de Brassac
sont en mesure d'accueillir les mineurs de La Taupe. J'ai également obtenu des
Charbonnages de France que la fermeture de ce puits, qui avait été initialement
prévue pour le premier janvier 1952, ne soit pas effectuée avant la fin du mois
de juin de cette année.
Quant au personnel de jour, j'en conviens volontiers une
partie de celui-ci ne pourra pas être réutilisée dans la mine. L'effectif du
personnel du jour dans toutes nos mines, par suite des concentrations, devient
trop important et il nous faut, là aussi, nus préoccuper de l'emploi de cette
main-d'oeuvre. Je précise que les services locaux de la main-d'oeuvre s'occupent
de son reclassement.
Enfin j'ai demandé aux Charbonnages de France d'éviter les
mutations pendant la période d'hiver et je puis dire que, pendant tout le mois
de février, aucune mutation n'interviendra.
Je pense que ces explications convaincront M. Jean-Michel
Flandin que la fermeture du puits de mine de La Taupe ne porte pas vraiment une
atteinte grave à la vie économique de la région puisque toute la main-d'oeuvre
productive de cette mine sera employée dans les puits voisins.
M. le président. - La parole est à M. Flandin.
M. Jean-Michel Flandin. - M. le ministre, je tiens d'abord
à vous remercier de m'avoir donné ces explications, pendant qu'il en est temps,
quoique je puisse dire que ces mutations dont vous me promettez qu'elles
n'auront pas lieu se produisent encore. En effet, le 11 janvier, à midi, dix de
ces ouvriers ont été mutés à Brassac.
Mais vos explications ne peuvent me satisfaire, pas plus
que n'ont pu me satisfaire les explications et éclaircissements que vous avez
donné au Conseil de la République, en décembre dernier, à M. le sénateur
Auberger, sur la fermeture de Bert-Moncombroux, dans l'Allier.
Ce n'est ni une cause spécifiquement locale, ni une
mauvaise cause que je veux plaider. Une émotion légitime s'est emparée de toute
une population et les magistrats municipaux la soutiennent puisque les
dernières élections n'ont pu avoir lieu et que toutes les municipalités vont
donner leur démission définitivement.
Je laisse de côté -car ce n'est pas l'aspect qui peut
toucher le plus- l'aspect moral et je dirais presque sentimental de la
question. Il s'agit de mines ouvertes depuis près de 300 ans. Je ne parle pas
non plus du transfert obligatoire des gens, à dix kilomètres seulement, il est
vrai ; mais ce sont surtout des hommes âgés, puisque l'âge moyen des mineurs
que l'on transfère est 37 ans.
Ils sont amenés d'une mine saine, si l'on peut dire, à une
mine où règne la silicose : presque tous les mineurs de Brassac sont atteints de
cette maladie. Ces hommes n'ont pas l'habitude de travailler dans ces mines
nouvelles pour eux. Ils ont l'habitude de travailler par tranches plates et ils
n'apprennent guère après 40 ans à travailler dans des conditions différentes.
(Très bien ; très bien ; à l'extrème-droite).
Mais, je le répète, pourquoi cette fermeture ?
Contrairement à ce que l'on dit, il y a encore du charbon dans cette mine.
Le plan établi par le programme de cinq ans de 1949 n'a
reçu qu'un commencement d'exécution, car les crédits pour travaux neufs et pour
travaux de recherche ont été supprimés à partir du premier janvier 1951, au
moment où ces recherches se révélaient fructueuses.
De toute façon, le Bure, ce puits tout neuf, tout équipé,
qui va du plan 510 au niveau 610, révèle qu'il y a près d'un million de tonnes
exploitables et l'on espère qu'il y en aura trois fois plus. La Taupe donne du
bon charbon, du type fines à coke dont nous manquons. Je rappelle qu'il y avait
autrefois une cokerie qui a fonctionné avant 1914 et jusque vers 1926. Ce puits
donne une qualité de charbon très demandée, un charbon de forge réputé.
Contrairement à ce que l'on a dit, le charbon de La Taupe
ne donne pas 50 % de bas produits. En novembre 1951, à l'analyse, sur 1 000
kilogrammes extraits, on trouvait 250 kilogrammes de stérile, 450 kilogrammes
de charbon se vendant de 6 500 à 7 000 francs la tonne, en gros, 300
kilogrammes de mixtes et schlams se vendant à un prix moyen de 1 800 à 2 500 F
la tonne.
Si l'on en croit la «Revue du Génie Civil» d'août 1951, le
charbon brut extrait du bassin du Pas-de-Calais contient plus de matières
étrangères qu'autrefois : 370 kilogrammes de stérile pour 1 000 kilogrammes, ce
qui nécessitera une rénovation des installations de lavage.
Le rendement des ouvriers mineurs est bon. Le système qui
consiste à enlever proportionnellement plus de mineurs de fond que de mineurs
de surface fausse complètement les statistiques.
Mais je relève, dans la note même fournie par les
Charbonnages de France, que jamais le rendement n'a jamais été aussi bon.
Contre 822 kilogrammes au fond en 1933, le rendement est passé à 993
kilogrammes dans les premiers mois de de 1951, dans une mine où l'on a négligé
systématiquement de faire des investissements depuis des années.
Mais surtout, M. le Ministre, et c'est là que se pose le
plus nettement le problème, que penser des techniciens qui ont installé à moins
de 900 mètres à vol d'oiseau, de l'autre côté de la rivière, une centrale
électrique, celle de Vézezoux, pour laquelle on va dépenser plus d'un milliard
de francs, destinée à utiliser spécialement le charbon des mines de La Taupe,
centrale électrique dont le démarrage est, sauf imprévu, envisagé pour le
milieu de 1952, c'est-à-dire au moment même où l'on va fermer la mine qui est
chargée de l'alimenter, et qui consommera environ 500 tonnes de charbon par
jour ? On avait même prévu et construit un pont en ciment armé qui a cûté
extrêmement cher pour la relier directement à cette mine désormais fermée !
D'où viendra le charbon ? A quel prix reviendra-t-il avec
les frais de transport et de transbordement ?
Les mines de Champagnac, dont le rendement n'est guère
meilleur, qui se trouvent à 150 kilomètres de là et qui pourraient l'alimenter,
recevront un lavoir moderne au début de 1953 et ne pourront plus fournir de
charbon à un prix satisfaisant.
Brassac, avec son charbon anthraciteux de très bonne
qualité -c'est la rapport des Charbonnages de France que je cite-, ne produit
ni mixtes, ni schlams et n'a pas d'intérêt à en faire. Enfin la fermeture de cette
mine entraîne, en plus, la disparition de l'usine d'agglomérés et de briquettes
de la S.N.C.F. à Mégecoste, comme celle de la verrerie installée à proximité.
En résumé, par un décret absolument arbitraire, sur lequel
vous ne pouvez rien, avez-vous dit, Monsieur le Ministre, on détruit la vie
économique de cette région.
Nous vous demandons, dans ces conditions, à quoi sert
l'autorité de tutelle. L'intérêt français se trouve-t-il véritablement défendu
et y trouve-t-il son compte ?
Je sais bien que la «plan Schuman» envisage d'un cœur léger la fermeture de toutes ces mines. On
avait pourtant dit que les mines du Centre n'avaient pas grand-chose à
redouter, étant donné surtout qu'elles étaient éloignées de la plupart des
mines dont le rendement serait meilleur.
En admettant que la perte à la tonne marchande soit de 1
500 francs et même de 2 000 francs, comme vous venez de l'indiquer, est-ce
qu'un investissement ne serait pas rentable et ne diminuerait pas cette perte ?
Que nous coûte le transport du charbon importé ?
A l'heure où, comme le disait, hier, M. Edgar Faure, le
manque de dollars devient angoissant et tragique et où des importations de
charbon américain risquent de cesser, ne serait-il pas bon d'accorder une
subvention à cette mine ?
En admettant qu'elle ne soit pas immédiatement rentable,
elle serait cependant moins onéreuse que les dollars à payer à l'étranger. Il y
a des investissements fructueux. Dans le cas actuel, ce serait de bonne et
saine politique économique.
Comme le disait hier M. le président Edgar Faure, il faut
savoir d'abord dépenser pour économiser ensuite. Enfin, si vous ne pouvez pas
exploiter ces mines économiquement, rendez-les à l'industrie privée qui saura
alors les exploiter et en tirer des bénéfices. (Applaudissements à l'extrême-droite).
ADHL S 625
Langeac,
le 9 avril 1848
Les
citoyens voituriers de Langeac
Au
Citoyen Commissaire du département de la Haute-Loire,
Citoyen,
Nous apprenons par une voie indirecte que l'ancienne administration
du département, volontairement induite en erreur par les actionnaires de la
Mine de La Chalaide, a voulu anéantir, autant qu'il a été en son pouvoir,
l'entreprise de la mine de Vaurette.
Nous venons protester contre une pareille tentative, la
mine de La Chalaide, jusqu'à présent, ne nous a fourni aucun produit tandis que
celle de Vaurette a constamment, depuis son exploitation, alimenté nos
transports par des productions de houille, dont la qualité suivant l'opinion
des connaisseurs surpasse même la qualité des charbons tirés de la mine de
Marsanges, qui est en pleine exploitation depuis longtemps.
En foi de quoi nous attestons la présente, afin de valoir
ce que de droit, auprès de l'Administration du département.
Les citoyens soussignés, voituriers de Langeac et des
environs.
Pagès, Martial, Rousset, Joubert, Séjalon, Roche, Gallier,
Mardieu, Séjalon, Bayol
Comme consommateur je déclare que le charbon est de bonne
qualité.
Costet.
Pour légalisation des signatures ci-dessus, les membres de
la Commission Provisoire de la Commune de Langeac.
Pradel, ?, ?, ?
---------------------------------------------------------------------
ADHL S 625
Langeac, le 8 avril 1848
Freidier Florentin, Jourjon Jean-Louis et Clair
Jean-Baptiste, exploitants de mines à Langeac
Au Commissaire du Département de la Haute-Loire,
Citoyen,
Les soussignés ont l'honneur d'exposer que par une pétition
inscrite le 11 mai 1844 à la préfecture de la Haute-Loire, sous le n°194, ils formèrent
une demande en concession d'une mine de houille dont le principal puits
d'exploitation est situé à Vaurette, canton de Langeac, et dont le périmètre et
la superficie sont indiqués dans la même demande.
Les pétitionnaires firent soumission dans leur demande de
se conformer aux voeux des articles 6 et 42 qui règle la matière ; et offrirent
une rente annuelle de 10 centimes par hectare aux propriétaires du sol enclavé
dans le périmètre de ladite concession.
L'avis de ces diverses propositions fut affiché d'après les
prescriptions de la Préfecture dans tous les communes indiquées.
Des oppositions mal fondées, s'étant révélées pendant le
délai fixé, les Ingénieurs des Mines statuèrent négativement et le préfet dut
faire un rapport sur la demande en concession formulée par les soussignés.
A peu près à la même époque, la Préfecture dut encore
s'occuper d'une seconde demande en concession de mine de houille formée par M.
Genestet ; dans le principe, cette demande fut explicitement restreinte dans
son périmètre, et ne touchait nullement au périmètre indiqué par les exposants.
Mais lorsque cette pétition eût passé par voie de
succession aux héritiers de M. Genestet, ces derniers, enhardis par leur
position vis-à-vis de l'administration supérieure donnèrent à leur demande en
concession des prétentions telles que celle des exposants se trouvaient
absorbée.
A cette époque les héritiers Genestet avaient d'excellentes
raisons pour compter sur le succès. De leurs prétentions, ils appartenaient
tous de corps et d'âme à l'infâme gouvernement dont le peuple de Paris a si
héroïquement fait justice. Tandis que les exposants appartenaient au contraire
à une opinion diamétralement opposée, c'est-à-dire à l'opinion républicaine.
Dans cette situation, les préférences du Préfet Chopin
Darnouville ; qui comme vous ne l'ignorez pas, a laissé de beaux souvenirs dans
notre département furent bientôt fixés ; et fidèle à ses scandaleuses
traditions de corrompus et de corrupteurs, il n'hésita pas à signaler au
Ministère des Travaux Publics que la demande en concession formée par MM.
Souteyran, Laroule, Goni et Compagnie devait être accueillie, à l'exclusion de
celle de MM. Freidier, Jourjon et Clair.
Si cette détermination n'eût été que le fruit d'une
appréciation saine des faits, et conforme à l'utilité publique, si une enquête
soigneusement et loyalement dirigée eût démontré que les travaux accomplis par
les héritiers Genestet présentaient des résultats ou même des expérances
infiniment plus avantageuses à l'utilité publique, nous n'aurions pas hésité à
accepter notre exclusion comme une conséquence conforme aux règles de l'équité
et du bon sens.
Mais par une fatalité qui, comme nous avons eu l'honneur de
l'insinuer, la condition qu'on nous a faite ne trouve son explication, que dans
l'indigne dépravation du Préfet, qui a renversé les rôles de la manière la plus
perfide et la plus mensongère.
Pour arriver à cette preuve, les exposants ne craignent pas
d'en appeler à la conscience et à la connaissance de tous leurs concitoyens,
ils ne craignent pas de s'adresser à vous qui représentez à un si haut degré la
pureté et la loyauté républicaine, pour vous prier un nouveau travail et s'il
le faut une nouvelle enquête sur le position des deux exploitations, et nous
sommes assurés que le rapport à venir vous démontrera jusqu'à l'évidence que
l'exploitation de La Chalaide malgré tous les efforts des actionnaires n'a
jusqu'à présent absolument amené aucun résultat statisfaisant, tandis que
l'exploitation de Vaurette a depuis longtemps découvert des filons abondants,
et mis en circulation du charbon de la plus belle qualité.
Nous avons trop de respect pour nous-même et de l'intérêt
général pour demander au Gouvernement Républicain un acte de faveur, nous
demandons seulement un acte de justice.
Et c'est dans la certitude, Citoyen Commissaire, que votre
esprit de justice et d'équité vous fera prendre en considération les démarches
que nous avons l'honneur de faire auprès de vous que nous nous vous prions
d'agréer l'hommage de notre parfait dévouement.
Les citoyens exploitants
Freidier, Pour Jourjon et Clair leur mandataire : J.B.
Callet.
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Annuaire de l'Industrie Minérale, 1913-1914
Houillères de Marsanges, à Langeac (Haute-Loire)
M.G. Laprunière, propriétaire, avenue du Trocadéro, 17,
Paris ; M. J.-B. Paret, fondé de pouvoirs à Villars (Loire)
Production en 1912 : 31 033 tonnes
Houillères et verreries de Mègecoste
Compagnie fermière de l'établissement thermal de Vichy.
24 boulevard des Capucines, Paris.
Société anonyme au capital de 12 000 000 de francs.
Production en 1912 : 17 000 tonnes.
Verreries : 12 000 000 de bouteilles de production
annuelle.
Houillères de la Haute-Loire
Société anonyme au capital de 2 600 000 francs.
Siège social : à Paris, 57, rue de l'Arcade (8e).
Conseil d'administration. - MM. Émile Halphen, président,
57 rue de l'Arcade, Paris (8e) ; baron Maurice Gérard, 2, rue Rabelais, Paris
(2e) ; baron A. Girod de l'Ain, 153, boulevard Haussmann, Paris (8e) ; Arthur
Pernolet, 56 rue de Londres, Paris ; Léon Renié, au Grosménil, par
Sainte-Florine (Haute-Loire).
Production en 1912 : 156 186 tonnes.
Mines de Charbonnier
Compagnie des charbonnages du Centre.
Société au capital de 1 750 000 francs.
Siège social : Paris, 41, rue de Provence.
Conseil d'administration. - MM. Jules Bernard, président du
Conseil d'aministration des usines métallurgiques de la Basse-Loire, président,
13, rue Lafayette, Paris ; Mathieu Goudchaux, administrateur des forges et
aciéries du Nord et de l'Est, administrateur-délégué, 41 rue de Provence, Paris
; Eudore Progneaux, ingénieur, administrateur des usines métallurgiques de la
Basse-Loire, 13 rue Lafayette, Paris ; Eugène Lattes, ingénieur à la Banque de
Paris et des Pays-Bas, 3 rue d'Antin, Paris ; L. Daubrée, 26 avenue Duquesne,
Paris ; Raoul Simon, ingénieur, ancien élève de l'École Polytechnique, 1, rue
Beaujon, Paris ; R. Mascart, ancien officier de la marine, 55, rue de Lille,
Paris.
Production en 1912 : 28 000 tonnes.
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BMIU de Clermont-Ferrand, Manuscrit, suit les Cahiers de
Doléances de Brassac
Faits
Au mois de frimaire an 7, le Sieur Rabusson de Lamothe en société
avec son frère et un Sieur Berthon a obtenu du gouvernement la concession d'une
mine de houille appelée le Grosménil, il paraît que le Sieur Berthon et le
frère du Sieur Rabusson de Lamothe se sont retirés dans un temps assez
rapproché, ce qui aurait obligé le Sieur Rabusson de Lamothe à leur passer des
sommes plus ou moins considérables, en même temps qu'il demeurait ainsi chargé
de tout le poids de l'entreprise. Il a fait tous les efforts pour la mettre en
activité, la soutenir et l'améliorer. On conçoit aisément que les seules
dépenses nécessaires pour commencer une exploitation de cette nature et la
continuer durent être considérables.
De plus, le Sieur Rabusson de Lamothe a été dans la
nécessité d'acquérir divers terrains indispensables pour la facilité de
l'exploitation, de passer des indemnités plus ou moins fortes à des
propriétaires riverains, d'acheter plusieurs autres mines voisines, enfin de se
rendre propriétaire d'un domaine appelé Frugères d'une vfaleur assez
considérable.
Après de tels sacrifices, le sieur Rabusson de Lamothe
voyait son exploitation prospérer et se croyait sur le poinr de recueillir
enfin le fruit de ses travaux, de ses peines, de ses veilles, lorsqu'il s'est
vu tout à coup plongé dans la plus grande gêne, dans des embarras inextricables
par la baisse subite des charbons : le naufrage de plusieurs bâteaux, le défaut
de rentrées, la somme des intérêts des capitaux empruntés et l'impossibilité de
pourvoir suffisamment aux besoins de l'exploitation.
Il n'y avait d'ailleurs aucun reproche à faire au Sieur
Rabusson de Lamothe, ses créanciers l'ont reconnu formellement à différentes
époques.
Le 29 juin 1810, les créanciers de Sieur Rabusson de
Lamothe se sont réunis en l'étude d'un notaire (?) à La Résidence du Puy,
département de la Haute-Loire. Le mandataire du Sieur Rabusson de Lamothe leur
a mis sous les yeux l'état de la situation active et passive. Ils en ont
reconnu la sincérité.
On remarque dans l'exposé des faits par le mandataire du
Sieur Rabusson de Lamothe et non critiqué par les créanciers que le passif du
Sieur Rabusson de Lamothe s'élève à la somme de 850 à 900 000 fr, que de
cepassif il a été employé suivant qu'il est justifiéen pièces authentiques 30
000 fr. pour achats de terrains ou indemnités à divers propriétaires pour
remboursements d'avances et indemnités à divers propriétaires dans
l'exploitation des mines, 150 000 fr ont été absorbés par les dépenses
nécessaires pour monter l'exploitation, à quoi il faut ajouter les intérêts des
capitaux empruntés pendant douze ou treize années.
Déterminés par ces considérations, les créanciers ont
adopté des mesures qui n'étaient que provisoires et qui ont été modifiées par
un 2e acte dont il va être parlé.
En effet une partie seulement des créanciers du Sieur
Rabusson Lamothe avait concurru à cette délibération du 29 juin 1810, il y en avait au Puy-de-Dôme et à Paris dont il
fallait détenir le concours et l'assentiment. On s'en occupa d'une manière
efficace.
Les créanciers du Puy-de-Dôme, ceux de Paris se
réunirent, se choisirent des
mandataires et le 2 octobre 1810, une nouvelle réuniuon des créanciers eut lieu en l'étude du même
notaire.
On y voit figurer un certain nombre de créanciers
individuellement, d'autres en assez grand nombre par des fondés de pouvoirs.
Cette fois on se propose de prendre une détermination de
justice.
Les créanciers ont considéré que le Sieur Rabusson de
Lamothe, concessionnaire des mines de houille de Grosménil et dépendances,
acquéreur de celle de Grigues avait par l'entreprise importante de l'exploitation
de ces mines, par les acquisitions de la terre de Frugères et de divers
terrains de surface et des accessoires jugés nécessaires à l'utilité de son
entreprise, été entraîné des dépenses extraordinaires, qu'après avoir absorbé
sa fortune, l'ont forcé de recourir à des emprunts, qu'au moment où l'état de
ses exploitations lui permettait de recueillir les fruits de ses travaux, il
s'est par une circonstance imprévue trouvé paralysé dans son crédit et placé
dans l'impossibilité de répondre à la foi à ses engagements.
Qu'après avoir examiné la situation du Sieur Rabusson de
Lamothe, ils ont reconnu d'une part qu'elle était due aux avances considérables
, aux frais d'acquisitions, aux avances considérables, au paiement d'indemnités
qu'avait nécessité son entreprise, d'autre part qu'il y avait fait emploi de
tous les capitaux et de ceux empruntés et que le tout était représenté par les
travaux des exploitations, les acquisitions faites pour les mines et les
accessoires qui s'y rattachent, qu'est avéré ? .... ? le Sieur Lamothe n'avait
les moyens de libération que dans les divers objets composant son actif et que
dans la position où le plaçait l'épuisement de ses ressources, de ne plus
pouvoir désormais soutenir seul le poids de son entreprise , le parti le plus
avantageux pour les créanciers était de s'unir à lui, pour faire marcher les
exploitations utiles et rassurantes pour l'avenir, d'organiser un mode
d'administration économique et combiner dans l'intérêt respectif , de faciliter
... à la liquidation .... dues.
Entrainés par des motifs aussi puissants, les créanciers
ont arrêté un mode définitif d'administration et de liquidation dont voici
l'analyse.
On forme un Conseil d'administration composé d'un
surveillant et de quatre administrateurs pris parmi les créanciers.
Le surveillant est le Sieur Rabusson Lamothe, aux
appointements de 4 000 fr. et son logement à Frugères, les produits, bureaux,
ceux des exploitations doivent être versés dans la caisse de cetta
administration ... ils sont destinés au passement des frais, au service
d'intérêts des créances et le surplus à former un fonds d'amortissement à
l'aide duquel on éteindra à mesure les capitaux.
Le conseil d'administration pourra délibérer au nombre de 3
de ses membres, il aura le régime intérieur, la nomination des agents et
employés, la liquidation, la répartition des sommes à distribuer, il stipulera
dans tous les cas les intérêts de la masse.
Les commissaires devant avec le Sieur Rabusson de Lamothe
composer le Conseil d'Administration ont été nommés et les exploitations n'ont
pas été suspendues. Elles se sont soutenues au même degré d'activité.
Mais tous les créanciers du Sieur Rabusson de Lamothe n'ont
pas ... figuré au contrat du 2 8bre 1810 et plusieurs d'entre eux, les uns
porteurs d'obligations notariées, les autres n'ayant que des simples billets ou
reconnaissances, d'autres même des lettres d'échange (?) montrent de l'humeur
et menacent le Sieur Rabusson de Lamothe de poursuites rigoureuses. Les
commissaires n'ont rien encore rien fait pour obtenir l'exécution du traité du
2 8bre 1810 contre les créanciers non signataires.
ADHL S 042
Préfecture du Puy-de-Dôme
Rapport des Ingénieurs des mines.
Nous soussignés, Ingénieur en chef et Ingénieur ordinaire des
mines, nous sommes transportés dans la matinée du mercredi 21 janvier 1863, de
concert avec MM. le Sous-Préfet, le Procureur impérial et le capitaine de
gendarmerie d'Issoire, sur l'exploitation de houille de La Combelle appartenant
à la Compagnie des mines de Brassac, où la plus grande partie des ouvriers sont
en grève depuis lundi, nous avons assisté à l'enquête dirigée par M. le
Procureur impérial, et avons nous-même conversé avec les Directeurs de la mine
et avec quelques ouvriers.
Dans cette visite, nous avons pu constater que la grève
n'avait pris jusqu'ici aucun caractère dangereux ou inquiétant pour l'ordre
public. Les ouvriers chargés de la conduite des machines étaient tous à leurs
postes. Un certain nombre de mineurs étaient même descendus dans les travaux
souterrains. A notre arrivée on ne voyait point d'attroupements sur les
carreaux des puits. Enfin les ouvriers qui ont été appelés ou qui sont venus
d'eux-mêmes s'expliquaient sans violence et sans beaucoup d'animosité.
La cause du débat est une modification que les Directeurs
de la mine ont voulu introduire dans les conditions de travail.
Précédemment, à La Combelle, comme dans les autres mines du
bassin de Brassac, les outils tels que pics, pelles, fleurets étaient fournis
par les exploitants. Les ouvriers qui quittaient la mine étaient tenus de les
remettre au garde-magasin ; ils devaient aussi payer ceux qu'ils perdaient,
sauf le cas de force majeure. D'ailleurs les réparations et l'entretien étaient
à la charge de l'exploitation.
Dorénavant les ouvriers devront se procurer les outils à
leurs frais, en laissant dans la caisse de la mine le montant de ceux qu'on
leur livrera, si, n'en ayant point déjà, ils sont obligés d'en demander au
magasin. La Compagnie, comme par le passé, pourvoiera aux frais d'entretien.
Lorsqu'un ouvrier partira, son avance lui sera remboursée contre restitution
des outils.
Cette mesure avait été annoncée dans la seconde quinzaine
de décembre, et n'ayant point, paraît-il, provoqué de protestation générale. Le
dimanche 18 février, jour de paye, on a voulu la mettre à exécution. Tous les
ouvriers qui n'étaient pas à même de se passer des outils fournis par la
Compagnie devaient donc subir une retenue, qui pour les uns ne s'élevait qu'à 5
ou 6 francs, qui pour les autres pouvait monter à 25 ou 30 francs. Afin de
rendre l'ordre donné plus applicable, la somme qui devait être prélevée sur ces
derniers était répartie en 3 ou 4 payes, de manière à ce que l'on ne fit point
d'une seule fois une retenue supérieure à 7 ou 8 francs. Quelques hommes même,
en très petit nombre, devaient, nous ont dit les Directeurs, recevoir certains
outils gratuitement.
D'après les explications données par les exploitants, le
but de la mesure est de mettre fin à divers abus, tels que vols d'outils commis
par des ouvriers qui quittent la mine, sans prévenir, le lendemain du jour de
paye, tels que détérioration du matériel par manque de soins.
Sur ce dernier point, si, dans le nouvel ordre de choses
comme dans l'ancien, la Compagnie se charge des réparations, on ne voit pas
pourquoi les ouvriers auraient plus d'intérêt que par le passé à soigner les
outils.
Au premier motif allégué, les ouvriers répliquent par des
raisons qui ne nous ont nullement paru dépourvues de justesse. La Compagnie,
disent-ils, est toujours amplement garantie contre ce danger des vols ; car la
solde des journées dues dans chaque mois est seulement réglée le 3e dimanche du
mois suivant, et la seconde paye, qui se fait le 1e dimanche, n'est qu'un
à-compte. De la sorte les ouvriers sont tojours en avance d'une quinzaine de
jours de travail au moins. Les mineurs ne peuvent d'ailleurs, sous peine
d'amende, quitter les chantiers sans prévenir leur chef. La garantie ne ferait
donc défaut que si par hasard un ouvrier s'était absenté du 1e au 3e dimanche ;
alors les exploitants le sauraient aisément, et il leur serait facile d'exiger
que les outils fussent montrés ou de retenir jusqu'au prochain à-compte le prix
de quelques journées.
Les exploitants nous ont marqué le désir d'arriver à ce
résultat que les ouvriers fussent possesseurs et responsables de leurs outils,
ils simplifieraient ainsi la surveillance et diminueraient les déchets et les
pertes de matériel. Mais pour cela il faudrait, ce nous semble, d'autres
mesures supplémentaires ; et par leurs objections, les ouvriers manifestent
précisément la crainte de voir surgir des exigences nouvelles qui leur seraient
encore préjudiciables.
La Compagnie possède dans le même bassin de Brassac, mais
dans le département de la Haute-Loire, une autre mine dite de Bouxhors ou des
Barthes, plus importante que celle de La Combelle par le nombre des hommes
qu'elle occupe. La même mesure y a été simultanément appliquée et n'a point
causé ce chômage général. D'après ce que nous ont dit les Directeurs des travaux,
un grand nombre des ouvriers de Bouxhors ont restitué, pour éviter la retenue,
les outils de la Compagnie, et se sont rendus à leurs chantiers avec d'autres
outils dont ils étaient possesseurs. Il n'y a rien d'étonnant en effet à ce que
beaucoup de pics et de pelles soient entre les mains des mineurs, dans un pays
où les exploitations sont très anciennes, où plusieurs compagnies d'industriels
se sont succédées, et où un ordre parfait n'a pas toujours régné dans les
travaux.
Quoiqu'il en soit, on comprend fort bien que ceux des
ouvriers qui n'ont pas cette ressource soient très sensibles à une avance
obligatoire de 10 à 12 francs en moyenne, prélevée sur le salaire d'une
quinzaine ou d'un mois, et réduisant d'une manière trop appréciable le gain qui
doit suffire à eux et à leur famille.
Si l'on veut admettre qu'il y eût des réformes à
introduire, nous ne pouvons nous empêcher de trouver assez rigoureux et assez
mal combiné le moyen dont les exploitants ont fait choix, et la diffuclté
qu'ils ont provoquée semble d'autant moins opportune que leur plainte
habituelle est de manquer d'un nombre de bras suffisant.
Il est d'ailleurs incontestable qu'ils étaient dans leur
droit en rendant les conditions de travail moins favorables aux mineurs. Mais
si le chômage se prolongeait, ils éprouveraient certainement eux-mêmes un
préjudice supérieur à l'avantage qu'ils peuvent attendre de leur réforme.
Nous espérons néanmoins que la grève aura prochainement un
terme et que la plupart des ouvriers rentreront bientôt dans leurs chantiers.
L'exemple de ce qui s'est passé à Bouxhors et l'état assez calme des esprits le
font présumer.
Nous passons sous silence d'autres réclamations incidentes
que certains ouvriers ont fait entendre, telles que demande d'un réglement
général, plainte sur le nombre excessif des heures de travail, sur l'aérage
insuffisant de la mine. Il était bien évident que ce n'était là ni la cause, ni
le fond du conflit.
Clermont-Ferrand,
le 23 Janvier 1863
L'ingénieur en chef, signé : Baudin L'ingénieur ordinaire, signé Tournaire
Pour copie conforme, le Conseiller de Préfecture,
Secrétaire Général.
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ADHL 3 U 262
Audience du 10 janvier 1872.
En la cause de Mr le Procureur de la République près le
Tribunal de Première Instance de l'arrondissement de Brioude, poursuivant,
Contre 1° Jean Bardy , âgé de 29 ans, né à Vergongheon le
24 octobre 1842, fils de Gabriel et de Catherine Borrel, marié à Marie
Vernière, père de trois enfants, mineur demeurant à Vergongheon , prévenu
comparant,
2° Jean Jalla dit Gardel, âgé de 21 ans, né à Brassac
(Puy-de-Dôme) le 19 aôut 1850, fils de Jean et de Anne Gardel, célibataire,
ouvrier mineur à La Taupe, demeurant à Brassac, prévenu comparant,
3° Antoine Rigaud, âgé de 28 ans, né à Marayes, le 25
novembre 1843, fils de Pierre et de Louise Beauvallot, marié à Marie Bony, père
de deux enfants, mineur demeurant à Brassac, prévenu comparant,
4° Antoine Chambe dit Badauclos, âgé de 23 ans, né à Ste-Florine
le 15 octobre 1848, fils de Pierre et de Marguerite Pradon, célibataire,
ouvrier mineur demeurant à Ste-Florine, prévenu comparant,
5° Claude Libeyre, âgé de 40 ans, né à Auzon le 26 novembre
1831, fils de Pierre et Marie Fournier, marié à Jeanne Nugier, sans enfants,
ouvrier mineur, demeurant à Vézezoux, prévenu comparant,
6° Pierre Matthieu dit Nigon, âgé de 31 ans, né le 21
février 1840, à Solignac commune ? de Brassac (Puy-de-Dôme), fils d'Annet et de
Françoise Nigon, marié à Catherine Raymond, père d'un enfant, ouvrier mineur
demeurant à Solignac (Puy-de-Dôme), prévenu comparant,
7° Claude Loyer, âgé de 26 ans, né à Ste-Florine le 15
octobre 1845, fils de Guillaume et de Catherine Nicolas, marié à Florine
Ollier, père d'un enfant, prévenu comparant,
8° Jean Istre, âgé de 29 ans, né à Ste-Florine le 23 août
1842, fils de Pierre et de Marie Travers, célibataire, mineur, demeurant à
Ste-Florine, prévenu comparant,
9° François Challet, âgé de 29 ans, né à Ste-Florine le 14
février 1842, fils de Jean et de Radegonde Ventadour, marié à Annette
Portanier, mineur demeurant à Ste-Florine, prévenu comparant,
10 ° Jean-Baptiste Tardy, âgé de 40 ans, né à
St-Paul-en-Jarret, canton de Rive-de-Gier (Loire) le 8 juillet 1831, fils de
Sébastien et de Catherine Joly, marié à Marie Fombonne, père de trois enfants,
mineur, demeurant à Ste-Florine, prévenu comparant,
11° Pierre Robert, âgé de 28 ans, né à Brenat commune de
St-Just, le 30 avril 1844, fils de Martial et de Jeanne Astier, marié à Marie
Victorine Portanier, sans enfants, manoeuvre à Bouxhors, demeurant à
Ste-Florine, prévenu comparant,
12° Noël Andraud, âgé de 24 ans, né à Ste-Florine le 30
juin 1848, fils de Guillaume et de Marie Jouvet, marié à Angèle Ollier, sans
enfants, ouvrier mineur à Bouxhors, demeurant à Ste-Florine, prévenu comparant,
13° Antoine Lauby, dit Maury, âgé de 30 ans, né à
Frugères-les-Mines le 30 novembre 1841, fils de Jacques et de Magdeleine Jury,
marié à Marie Leyreloup, père d'un enfant, ouvrier mineur à Bouxhors, demeurant
à Frugères-les-Mines, prévenu comparant,
14° Marie Demathieu, épouse de Jacques Dieu, âgée de 27
ans, née à Auzon, fille de Jean et de défunte Marie Curabet, mère de deux
enfants, ménagère demeurant à Vergongheon, prévenue comparante,
Lecture faite à l'audience d'une ordonnance rendue par M.
le juge-suppléant remplissant les fonctions de juge d'instruction près ce
siège, M. le Procureur de la République a exposé qu'il en résultait contre tous
les susnommés sauf Marie Demathieu, charges suffisantes d'avoir depuis moins de
trois ans, dans les communes de Vergongheon, Frugères-les-Mines et Ste-Florine
à l'aide de violences, voies de fait, menaces ou manoeuvres frauduleuses amené
ou maintenu, tenté d'amener ou de maintenir une cessation concertée de travail
dans le but de forcer la hausse des salaires et de porter atteinte au libre
exercice du travail et de l'industrie.
Et contre Marie Demathieu femme Dieu, charges suffisantes
d'avoir depuis moins de trois ans, en la commune de Vergongheon commis des
violences ou voies de fait sur la personne d'un agent de la force publique dans
l'exercice de ses fonctions,
Qu'à raison de ces délits les prévenus avaient été cités à
cette audience ; que des témoins avaient aussi été cités,
En conséquence Mr le Procureur de la République a requis
qu'il fut procédé à l'audition des
témoins et à l'interrogatoire des inculpés,
Et de suite les témoins ont été entendus séparément l'un de
l'autre après avoir prêté le serment de dire toute la vérité et rien que toute
la vérité,
Le commis-greffier de service en a tenu note ainsi que de
leurs noms, prénoms, âges, professions et domiciles, ainsi que de leurs
principales déclarations,
Les prévenus ont été interrogés. Leurs réponses et
déclarations ont été consignées par écrit.
Mr. le Procureur de la République a ensuite résumé
l'affaire et donné ses conclusions tendant à ce qu'il fut fait aux prévenus
application des articles 414, 230, 228 du Code Pénal avec dépens.
Sur quoi le Tribunal,
Après avoir entendu Monsieur le Procureur de la République
dans l'exposé de l'affaire et dans ses conclusions et les prévenus dans leurs
interrogatoires et leurs moyens de défense,
Après en avoir délibéré,
Attendu en droit que si les coalitions entre ouvriers d'une
part et les patrons d'autre part pour obtenir une augmentation ou une
diminution de salaires, ont été autorisées par la loi, c'est sous la condition
expresse que la violence, les voies de fait et les menaces en seront
complètement bannies ;
Attendu en fait et en général qu'il résulte des dépositions
de presque tous les témoins entendus à cette audience, que les faits qui se
sont passés dans le bassin houiller de la Haute-Loire, à l'occasion de la
dernière grève, portent le caractère de la violence et des menaces prévues par
l'article 414 du Code Pénal ;
Attendu en effet que des bandes de grévistes arrêtaient sur
les chemins aboutissant aux différents centres d'exploitation ceux d'entre eux
qui voulaient continuer de travailler ; qu'il est certain qu'après
l'interruption du travail au Puits de La Taupe, si des groupes d'ouvriers que
les uns évaluent à cent et d'autres à deux cents ne s'étaient point transportés
sur les autres chantiers notamment au Grosménil et à Mège-Coste, pour intimer
l'ordre d'éteindre les feux, le travail eut continué sur ces différents points
;
Attendu en ce qui touche chaque accusé en particulier que
1° Bardy a été vu armé d'un bâton en tête des groupes,
criant : «Allons à la scierie. Il faut que le travail cesse. Il faut que les
ouvriers montent.» ; qu'il était, ainsi que Jalla et Rigaud à la tête de la
bande qui le lundi, au Puits de Coincy avait un aspect tellement menaçant,
qu'un employé de la mine crut devoir faire sortir par un souterrain les
ouvriers qui avaient continué à travailler, crainte qu'il ne leur fut fait un
mauvais parti ;
2° Que Jalla a été vu, armé d'un bâton, également à la tête
des bandes, criant : «Marche, il faut arrêter la machine» donnant des ordres
pour éteindre les feux ;
3° Que Rigaud était aussi armé d'un bâton ; qu'il criait :
«Il faut éteindre les feux» ; qu'il s'est fait remarquer par son exaltation ;
4° Que Loyer a été désigné par tous les témoins comme le
chef des bandes, partout où il s'est trouvé ; qu'il était très animé, qu'il a
engagé une rixe avec Nicolas qui voulait lui faire des observations ; qu'il a
dit à Arveuf, ouvrier qui continuait à travailler : «Tu mériterais qu'on te
cassât les reins» ;
5° Que Chambe à Fondary, coiffé d'un bonnet rouge a été
reconnu parmi ceux qui poussaient à les suivre les ouvriers qui se cachaient ;
6° Que Libeyre a été reconnu au milieu des groupes, criant
: «Allons couper les câbles» ;
7° Que Mathieu dit Nigon, à Coincy, a été reconnu parmi
ceux qui criaient : «Enlevons les barreaux des grilles» ;
8° Que le nommé Istre a été signalé parmi les plus ardents
criant :«Qu'on laisse au repos les machines et les câbles sinon nous les
coupons» ;
9° Que Challet demandant à l'Ingénieur la permission
d'éteindre les feux répondait à ce dernier : «Si vous ne la donnez pas nous la
prendrons» ;
10 ° Que Tardy, pendant que la bande des grévistes dont il
faisait partie, se rendait à Bouxhors, a fait huer plusieurs fois par la foule
Mr. Sauveur Casati, qui se rendait à son usine de Mège-Coste et qu'il a dit à
cet industriel : «Pas tant de bien que ça, vieil aristo, il nous tarde de démolir
ta cambuse.»
11° Que Robert a cherché à éteindre les feux en essayant de
tirer un des barreaux des grilles à Bouxhors ;
12° Que le sieur Audrand a tiré deux barreaux des grilles
pour obtenir le même résultat ;
13° Que Lauby dit Maury était à la tête de la bande qui
s'est rendue au Puits de Mr. de St-MaurICE pour faire cesser le travail.
Attendu que tous ces faits constituent le délit prévu et
puni par l'article 414 du Code Pénal ainsi conçu :
Article 414. - «Sera puni d'un emprisonnement de six jours
à trois ans et d'une amende de seize francs à trois mille francs ou de l'une de
ces deux peines seulement , quiconque à l'aide de violences, voies de fait,
menaces ou manoeuvres frauduleuses aura amené ou maintenu, tenté d'amener ou de
maintenir une cessation concertée de travail dans le but de forcer la hausse ou
la baisse des salaires ou de porter atteinte au libre exercice de l'industrie
ou du travail.»
En ce qui concerne Marie Demathieu épouse Dieu
Attendu que cette prévenue, faisant partie d'une bande
d'environ deux cents femmes qui s'étaient portées sur les centres
d'exploitation, criant qu'elles voulaient couper les câbles, a ramassé une
pierre qu'elle a lancée à un gendarme ;
Attendu que ce fait constitue le délit prévu et puni par
les articles 230 et 228 du Code Pénal ainsi conçus :
Article 230. - «Les violences de l'espèce exprimée en
l'article 228, dirigées contre un officier ministériel, un agent de la force
publique ou un citoyen chargé d'un ministère de service public, si elles ont eu
lieu pendant qu'ils exerçaient leur ministère ou à cette occasion seront punies
d'un emprisonnement d'un à six mois».
Article 228. - «Tout individu qui, même sans arme et sans
qu'il en soit résulté de blessures, aura frappé un magistrat dans l'exercice de
ses fonctions ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, sera puni d'un
emprisonnement de deux à cinq ans. Si cette voie de fait a eu lieu à l'audience
d'une cour ou d'un tribunal, le coupable sera en outre puni de la dégradation
civique.»
Attendu qu'il existe en faveur de la prévenue des
circonstances atténuantes qui permettront de faire à la prévenue application de
l'article 463 du Code Pénal ainsi conçu :
Article 463. - «Dans tous les cas où la peine de
l'emprisonnement et celle de l'amende seront prononcées par le Code Pénal, si
les circonstances paraissent atténuantes, les Tribunaux Correctionnels sont
autorisés même en cas de récidive à réduire l'emprisonnement même en dessous de
six jours et 'amende même au dessous de
seize francs. Ils pourront aussi prononcer séparément l'une ou l'autre de ces
peines et même substituer l'amende à l'emprisonnement sans qu'aucun cas elle
puisse être au dessous des peines de simple police».
En ce qui touche le degré de culpabilité de chacun des
autres détenus
Attendu que Loyer, Bardy, Jalla et Rigaud ont, d'après les
dépositions des témoins entendus à cette audience dirigé et animé les groupes,
Loyer surtout ;
Attendu qu'il y a lieu de tenir compte de la sincérité du
prévenu Andraud pendant les débats et de la manifestation de son repentir ;
Par ces motifs, déclare tous les prévenus, à l'exception de
Marie Demathieu épouse Dieu, coupables du délit de coalition prévu et puni par
l'article 414 du Code Pénal dont lecture a été donnée et les condamne savoir
1°Loyer à sept mois d'emprisonnement, 2° Bardy, 3° Jalla et 4° Rigaud à six
mois de la même peine, 5° Chambe, 6° Libeyre, 7° Mathieu dit Nigon, 8° Istre,
9° Challet, 10° Tardy, 11° Robert, et 12° Lauby dit Maury, à trois mois de la
même peine, 13° Andraud à un mois de la même peine et tous les susnommés
ensemble solidairement aux dépens taxés à la somme de six-cent-soixante-et-un
francs quinze centimes.
Déclare Marie Demathieu femme Dieu coupable du délit qui
lui est reproché et par application des
articles 230, 228 et 463 ci-dessus visés dont lecture a été donnée la condamne
à un mois d'emprisonnement et aux dépens en ce qui la concerne, taxés à la
somme de huit francs quinze centimes.
Chassaing, Delatre, Gilbert
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ADPD 10 M 46
Grève de 1884 à Brassac
Préfet et Ingénieur des Mines à Ministre des Travaux
Publics.
Principales Revendications des mineurs sont :
Travail à tâche supprimé
Salaires mineurs et piqueurs : six francs 50 - boiseurs six
francs - manoeuvres du fond quatre francs 50 - ouvriers du jour quatre francs.
Durée du travail intérieur huit heures compris repos d'une
demie-heure et temps de descente et montée.
Travail du jour dix heures compris une heure de repos.
Responsabilité de la lampe supprimée, retenue de l'huile
supprimée.
Reprise des ouvriers renvoyés ou signalés.
Les précédentes revendications sont repoussées par les
exploitants.
Les suivantes pourraient être acceptées :
Caisse de secours rendue aux ouvriers, avec contrôle de la
Compagnie.
Installation de chambres chaudes sur les puits.
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Le Petit Issoirien, Samedi 12 Octobre 1902
La Grève générale dans le bassin de Brassac et de
Sainte-Florine.
Brassac, 10 octobre.
Le chômage est complet maintenant, dans les deux centres
houillers de Brassac et de Sainte-Florine.
Aux puits de Bouxhors, de La Taupe, de Grosménil et de
Charbonnier, le travail est tout à fait interrompu. A Cellamines et à la
Basse-Combelle, une trentaine d'ouvriers du dehors et quelques ouvriers du
dedans ont travaillé encore aujourd'hui, mais il paraît que, demain, le chômage
sera absolu.
La région est, d'ailleurs, très calme. La plupart des
grévistes sont occupés aux travaux des champs.
Le Syndicat de Sainte-Florine doit tenir un réunion, ce
soir. D'autre part, une grande réunion aura lieu demain, à 10 heures, à
Auzat-sur-Allier ; dans cette réunion, on désignera six délégués chargés
d'entrer en pourparlers avec la Compagnie de Commentry-Fourchambault.
Comme M. le Préfet du Puy-de-Dôme a pris un arrêté
interdisant les attroupements, conformément à la loi du 7 juin 1848, les mineurs
de Sainte-Florine, ayant l'intention de se rendre nombreux à la réunion
d'Auzat, ont fait demander à M. le Sous-Préfet d'Issoire, par M. Parassols,
l'autorisation de circuler librement sur le territoire du Puy-de-Dôme.
Il leur a été répondu qu'ils pourraient sans difficulté se
rendre à la réunion, à condition d'aller par petits groupes, de 10 à 15 au
plus, et de ne pas pousser d'autres cris que : Vive la grève.
M. Icard, Sous-Préfet d'Issoire, est en permanence à
Brassac, ainsi que M. Barre, Procureur de la République, et M. le Capitaine de
Gendarmerie d'Issoire, sous les ordres de qui sont les gendarmes qu'on a
envoyés dans cette région.
De même, M. le Sous-Préfet de Brioude est en permanence à
Sainte-Florine.
Un détachement de 60 gendarmes a été envoyé à
Sainte-Florine, sous le commandement d'un officier de gendarmerie.
Les mesures d'ordre qu'on a prises dans tout le bassin sont
imposées par les circonstances, mais on est certain que les grévistes
conserveront le calme qu'ils ont montré jusqu'à présent.
Des grévistes avaient fait demander une entrevue à M.
Fayol, directeur des houillères, par M. le sous-préfet. M. Fayol a répondu que
les revendications devaient lui être remises par écrit.
Des réunions ont eu lieu aujourd'hui à Auzat-sur-Allier et
à Sainte-Florine. Elles n'ont donné lieu à aucun incident.
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Archives Nationales, microfilm F7 12 773
Paris
le 18/10/1901
5
h 30 du soir
n° 15.197 Intérieur
(Sûreté)
à
Préfets Rodez, Moulins, Nîmes, Grenoble, St-Étienne,
le
Puy, Montpellier, Arras, Clermont-Ferrand, Mâcon, Albi,
Aurillac,
Guéret, Nevers, Vesoul.
Chiffre
nouveau.
Il importe d'éviter l'envoi dans les centres miniers de
corps de troupes ayant dans leur effectif des soldats originaires de ces
centres. Je vous prie d'en faire l'observation aux autorités militaires pour le
cas où cet inconvénient n'aurait pas été prévu au cours de l'élaboration du
travail de répartition des forces chargées d'assurer le service de protection.
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ADPD 10 M 46
Répartition des troupes dans les centres miniers de la 13e
Région (Puy-de-Dôme), période d'été (du 15 mars au 14 septembre inclus), c. 1900
Plan remis à jour régulièrement au début du siècle (Secret)
Brassac, total de la réquisition commune aux départements
de la Haute-Loire et du Puy-de-Dôme
Infanterie : 4
Compagnies du 86ème de Le Puy
Cavalerie : 3
escadrons du 2&e chasseurs de Limoges
Génie : 165
sapeurs du 2e régiment du Génie à Montpellier
Gendarmerie : 67
gendarmes à pied, 79 gendarmes à cheval
le tout sous le commandement du Lieutenant-Colonel du 8-e
régiment d'infanterie.
A noter qu'en Auvergne, c'est le bassin de Brassac qui avait
le plus fort contingent prévu.
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Le Moniteur du
Puy-de-Dôme, 26 juin 1919
A Sainte-Florine, les ouvriers mineurs réunis salle Régis,
le 20 juin, ont voté l'ordre du jour suivant :
Les ouvriers mineurs et similaires, réunis en assemblée
générale, après avoir entendu le compte rendu de la journée, approuvent leurs
délégués au comité de grève de leur attitude tenue à l'entrevue avec
l'Ingénieur de Clermont-Ferrand ;
D'avoir accordé, après en avoir reçu l'ordre de leur
Fédération, les machinistes, chauffeurs et receveurs demandés par les
exploitants pour l'épuisement des eaux
et la ventilation des galeries ;
Déclarent en outre que si satisfaction au sujet de leurs revendications
n'est pas accordée le jeudi 26 juillet au plus tard, tous les mineurs de
France, nos camarades machinistes et receveurs abandonneront à nouveau le
travail à cette date.
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La Liberté, 13 novembre 1948
La situation dans les mines du bassin du Centre
La situation demeure inchangée dans les mines du bassin du
centre. Un seul centre est encore en grève générale : La
Combelle-Sainte-Florine. Dans les autres centres, la reprise continue. Elle
semble, cependant, moins accélérée à St-Éloy-les-Mines.
A BRASSAC
En fin de matinée, les sirènes des différents puits du
bassin étaient mises en action.
Des renforts comprenant plusieurs camions chargés de
mineurs de différents points de la région se dirigèrent alors vers les mines de
la Haute-Loire. Les bruits les plus fantaisistes circulaient au sujet de cet
appel : notamment l'occupation du puits de Grosménil par les forces de police.
Il s'agissait en réalité de l'arrestation de quelques militants pour la
libération desquels le syndicat cégétiste faisait appel aux mineurs.
On note le débrayage à 11 heures des ouvriers de l'usine
Ducellier auxquels il était fait appel.
A SAINTE-FLORINE
Trois arrestations pour atteinte à la liberté du travail...
A la suite des petits incidents, qui se sont produits au
cours de la grève dans le bassin minier de Ste-Florine, trois mandats d'arrêts
ont été lancés contre Marsura Arthur de Ste-Florine, Louis de
Frugères-les-Mines, et Coutarel de Lempdes.
Ces trois mineurs ont été transférés à la maison d'arrêt du
Puy. A la suite de ces arrestations, le syndicat CGT des mineurs de Ste-Florine
a fait une manifestation hier matin devant la gendarmerie en réclamant la
libération de leurs trois camarades.
M. Klébert Loubert y a pris la parole. Rappelons qu'un
mandat d'amener a été lancé contre lui pour atteinte à la liberté du travail et
sabotage.
Plusieurs escadrons de la Garde Républicaine sont arrivés
hier soir, et sont cantonnés dans la région.
On nous signale que le feu s'est déclaré dans une galerie
d'un puits et qu'il a été fait appel à des volontaires pour le combattre. [...]
Un camion de vivres pour les mineurs de La Combelle
Jeudi 11 novembre, un camion de vivres collecté par les femmes
de l'UFF d'Orléans et convoyé par la secrétaire départementale de l'UFF du
Loiret, Renée Delattre, qui est en même temps responsable syndicale du textile
; Mmes Lucon, Nagels, Regnault, Dupêcher et la camarade Beauteloup,
responsablesde l'Association des Familles de l'UFF, est arrivée à la Maison du
Peuple à 9 heures du matin.
Ces camarades ont été accueillies par Mme Diot et Mlle
Vigouroux, de l'UFF, et Verde, représentant l'Union Départementale des
Syndicats.
Le camion fut dirigé immédiatement sur La Combelle et son
contenu distribué aux mineurs en grève.
Une réunion des femmes de mineurs fut organisée dans
l'après-midi, où prirent la parole Mmes Renée Delattre et Jeanne Diot.
Vingt et un enfants de mineurs sont repartis le soir avec
le camion. A leur passage à Clermoint-Ferrand, une collation leur fut servie au
«Bar des Réunions», place de la Liberté.
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ADHL 20 M 30
Département de la Haute-Loire, Arrondissement de Brioude,
Cabinet
Brioude, le 24 juin 1853
La grève des mineurs de Bouxhors (Haute-Loire) et de La
Combelle (Puy-de-Dôme) qui vous a été signalée dès le 18 par la Gendarmerie,
tandis que j'ai été informé le 21 seulement, par le rapport quotidien du
Brigadier de Brioude est évidemment le résultat d'une coalition formée par les
ouvriers de tous les états.
Leur but serait d'obtenir une augmentation de salaires ;
les prétextes de leur refus de travail sont fondés sur l'impossibilité pour un
chef de famille de suffir aux besoins de la maison avec des prix de journée
trop peu élevés. Le véritable motif se tire en réalité des bruits qui ont couru
depuis quelques mois sur les bénéfices considérables faits par les exploitants
de ces mines, par suite de la plus grande facilité du transport des houilles,
facilité qui résulte de l'élévation exceptionnelle de l'étiage des eaux de la
rivière d'Allier depuis l'automne dernier.
La nouvelle d'un marché considérable que l'on dit avoir été
conclu entre les exploitants de Bouxhors et la grande fabrique de sucres
construite par M. le Comte de Morny dans le département du Puy-de-Dôme, a
contribué encore à surexciter le désir des ouvriers de faire augmenter leurs
salaires.
Lorsqu'on les interroge chacun isolément, ils se bornent à
dire qu'ils ont déjà prévenu depuis longtemps qu'ils ne continueraient pas à
travailler sans augmentation, qu'ils n'ont pas d'autre intention que celle
annoncée aux agents comptables de l'exploitation houillère, de ne pas
travailler aux mines, s'ils ne peuvent espérer trouver dans cette occupation
une rétribution égale à celle qu'ils trouveraient sur les chantiers de l'État
ou chez les particuliers.
Les détails de leurs griefs portent sur l'inégalité des
travaux intérieurs fort légers pour quelques uns, tandis qu'ils sont parfois
excessifs pour les autres, sans être cependant mieux rémunérés ; enfin, ils
demandent qu'on leur fournisse l'huile indispensable aux travaux ainsi que cela
se pratique ailleurs. En résumé, ils demandent par jour environ 2f.50c et la
fourniture d'huile.
La plupart de ces doléances me semblent exagérées et le
petit nombre qui pourrait être sérieux n'est nullement justifié. Ainsi, il
résulte des informations que j'ai prises à des sources sûres et néanmoins
diverses, que les ouvriers les plus faibles et les moins intelligents gagnent
au minimum 70 à 80 f par mois, que la grande majorité tire de son travail
salaire, en moyenne, de 100 francs ; que certains ouvriers gagnent fréquemment
jusqu'à sept ou huit francs par jour, etc ; Que le chauffage et l'éclairage
sont toujours l'objet de conventions particulières entre les maîtres et les
ouvriers ; que l'huile est payée en numéraire à Bouxhors et à La Combelle au
prix de 10 centimes par journée, tandis que comptes faits sur expériences, ils
n'en usent que 8 ou 9 centimes au plus.
Par suite de ces détails, il me semble évident que la
coalition n'a aucune cause plausible et que les exploitants seraient fondés à
réclamer l'intervention de l'autorité pour faire cesser un état de choses
compromettant pour la société. Les concessionnaires gagnent quelqu'argent, il
est vrai, depuis un an ou deux parce qu'ils ont réduit extraordinairement leurs
frais généraux en même temps qu'ils ont cherché des placements pour les
charbons restant jadis invendus, faute de sûreté de placement et de certitude
d'arrivage des expéditions aux acheteurs.
Mais cette réalisations des bénéfices tient à diverses
causes indépendantes de l'action des ouvriers qui ne veulent entrer dans les
détails d'in raisonnement qu'il leur donne complète satisfaction ; ces causes
sont d'ailleurs exceptionnelles, car les autres exploitations du bassin restent
en pure perte tandis que celle-ci réalise des bénéfices.
Il est à peu près certain en effet, que les exploitations
dites du Grosménil, dirigées par M. Collomb, de Mège-Coste par M. Casati ; de
Charbonnier par M. denier, tirent à peine 200 000 hectolitres de charbon alors
que Bouxhors et La Combelle réunies en tirent 400 000 par année.
La proportion contraire était cependant admise dans le pays
avant la constitution de la nouvelle société de ces deux dernières concessions.
La Combelle est en réalité une mine d'exploitation
difficile et coûteuse à cause de la profondeur de ses puits et de la difficulté
de les aérer et de les égouter. Elle ne fournit en outre que des charbons menus
dont le prix est de beaucoup inférieur. Bouxhors passait aussi pour un gîte
épuisé ; le Grosménil, entre autres, était au contraire renommé par la
puissance de ses couches, la pureté de ses charbons, etc...
Quelques hommes intelligents s'étant réunis pour acheter la
mine de Bouxhors mise en licitation, devant le Tribunal de Brioude, ils
cherchèrent, dès le début, à éviter les écarts de leurs prédécesseurs en
adoptant une marche lente, économique et cependant progressive. Ne craignant
pas d'affronter les crises de 1848 ils occupèrent aux prix réduits de cette
époque un assez grand nombre d'ouvriers, faisant ouvrir des puits, prolonger
les galeries, renouveler les machines, etc. Enfin, ils organisèrent avec La
Combelle qui se trouve sur le territoire du Puy-de-Dôme une association dont
les moindres avantages furent de réduire deux administrations somptueuses et
insuffisantes à une seule composée d'un personnel peu nombreux mais actif et
intelligent.
Plus tard ces messieurs prirent à titre de ferme ou achetèrent d'autres concessions
soit pour réduire les concurrences, soit pour étendre leur exploitation
antérieure. C'est dans cette condition que le DEux Décembre trouva cette
société.
Aussitôt que l'industrie et le commerce commencèrent à se
raviver elle conclut des marchés considérables de coke et même de charbon
pouvant ainsi réaliser des bénéfices dans de meilleures conditions que ses compétiteurs parce qu'elle expédiait comme
eux ses gros charbons par eau lorsque la navigation le permettait et que ses
menus subissaient une transformation avantageuse, tandis que que cette dernière
qualité se détériorait sur le carreau des mines de ses voisins, faute par eux
d'avoir imaginé de laver les charbons et de vouloir faire les avances de
construction de fours spéciaux.
Là se trouve le secret de la prospérité de cette
exploitation qui excite peut-être quelques rivalités, quelques passions
mauvaises ; elle occupe en effet deux cents ouvriers au moins tandis que les
autres en occupent ensemble à peine une centaine. Elle a conclu pour de longues
années un marché de 900 000 hectolitres par an tandis que les autres attendent
encore des temps meilleurs ou se réduisent à la consommation locale.
Je pense d'autre part que les sociétaires de Bouxhors
feront sagement d'augmenter leurs prix sous peu s'ils tiennent à éviter
l'abandon complet de leurs chantiers. Je considère enfin comme équitable de
faire participer l'ouvrier aux bénéfices des moments d'activité des industries
puisqu'on le réduit lorsqu'elles chôment.
Néanmoins il serait imprudent je crois de céder devant une
coalition parce qu'on aurait sous peu la main forcée de nouveau et qu'en résumé
la population ouvrière de ces contrées n'est mauvaise ou audacieuse qu'en
raison de la faiblesse des exploitants.
Mon avis serait, en conséquence, de laisser la justice
poursuivre son cours d'information et plus tard de sévérité, sauf à intervenir
ensuite s'il y a lieu dans les questions de salaire, mais alors seulement que
les travaux auront été repris par les ouvriers de tous états sur les chantiers
de la mine.
Je suis avec respect, Monsieur le Préfet, votre très humble
serviteur,
Le sous-préfet.
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ADPD 10 M 62
Extrait d'un rapport de gendarmerie du 19 novembre 1902
Affiches placardées à La Combelle le 18 novembre 1902
Manifeste aux soldats
Soldats ! retenez bien cet arrêt, et faites-en votre profit
!
écoute ceci : il se peut que vos chefs vous donnent l'ordre
d'agir contre les travailleurs en grève, ou des hommes en révolte. Vous aurez
alors, vous aussi à consulter et à écouter votre conscience. Votre conscience
vous dira, jeunes gens, que vous n'avez pas été arrachés à votre famille, à vos
champs, à vos ateliers, à la vie libre, pour marcher contre vos parents, vos
frères de misère, vos camarades de travail.
Écoute soldat
Si jamais l'ordre t'est donné de massacrer tes camarades de
travail, de tirer sur le peuple, tu refuseras, tu dois refuser à ce commandement
d'infâme. On n'ordonnait pas au Colonel de Saint-Rémy de commander le feu sur
des femmes désarmées. Il s'agissait -on l'a bien vu- de crocheter quelques
serrures, d'enfoncer quelques portes.
Toi soldat quand tes chefs te feront marcher contre le
peuple, rappelle-toi Fourmies, Châlon, la Martinique sur des poitrines de
grévistes, las de souffrir de la misère et du joug capitaliste.
Signé : un groupe de jeunes anti-militarisme.
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ADPD 10 M 62
Charbonnier, le 26 novembre
Monsieur le Préfet,
C'est très facheux pour nous autres d'être forcer de vous
écrire pour vous dire que la Compagnie de Charbonnier à l'air de ne vouloir
guère tenir à ses promesses depuis trois jours que nous sommes rentrer nous
nous sommes aperçu que nous sommes très malmener Nous ne savons pas si c'est
Monsieur le directeur ou Monsieur l'ingénieur qui commande a leurs employer de
nous commander de tels sortes ils nous demandent l'impossible pourtant Monsieur
le préfet nous faisons notre travail aussi bien comme nous le faisions avantje
ne vois pas pourquoi il chercherait à nous des misères je ne pense pas que
Monsieur le Prefet pas plus que la Compagnie ont eut a se plaindre de nous
autres
Et bien Monsieur le préfet nous allons vous avertir que si
la Compagnie veux àgir de tel sorte nous agirons autrement alors cette fois là
çà ne sera pas une grêve en paix comme nous avons fait à l'heure actuel mais
cette fois ci çà serait ce que l'on appelle une grève à outrance Mais remarquer bien Monsieur le prefêt nous
sommes loin de vouloir recommencer mais c'est malheureux pour nous autres de
nous traiter de la sorte alors Monsieur le Préfet nous avons une ferme confiance en vous pour dire à la
Compagnie de vouloir dire a ses employer de vouloir bien se calmer un petit peu
et de ne pas déjà menacer les gréviste à leur vouloir faire monter les outils
en leur commandant l'impossible
Nous comptons sur vous Monsieur le Prefet
Agréer Monsieur nos plus sincères et respecteuse
salutations
Un groupe de Mineurs de la mine de Charbonnier
Puy-de-Dôme
Communiqué à Monsieur le sous-Prefetd'Issoire, avec prière
de se rendre sur les lieux, d'aviser et de faire le nécessaire
Clermont, le 28 novembre 1902
Le Préfet
Département du Puy-de-Dôme, Sous-Préfecture d'Issoire,
Cabinet
Issoire, le 2 décembre 1902
Le Sous-Préfet d'Issoire à Monsieur le Préfet du
Puy-de-Dôme
A la suite de renseignements recueillis, j'ai l'honneur de
vous faire connaître qu'il y a lieu de ne donner aucune importance ni d'ajouter
aucune foi à la lettre anonyme signée : un groupe de mineurs de Charbonnier
dont je vous fais retour.
Depuis la reprise du travail la Direction de la mine de
Charbonnier et les agents directs de cette Compagnie s'efforcent dans la plus
large des mesures de traiter avec une égale bienveillance empreinte de justice
les mineurs qui travaillent dans cette concession.
Le Sous-Préfet
ADPD
10 M 62
Ministère
de l'Intérieur, Direction de la Sûreté Générale, Commissariat spécial sur les
Chemins de Fer.
Personnelle
et confidentielle.
Brassac,
le 16 novembre 1902
Le stratagème ou combinaison dont je vous ai entretenu
verbalement Monsieur le Préfet consiste à créer une scission entre les ouvriers
de la Cne de Brassac, au nombre de 350
environ et dont un tiers au moins appartient au groupe radical-socialiste de
cette ville, et ceux de Ste-Florine où l'élément socialiste révolutionnaire
domine.
J'espère par là amener les premiers à négocier directement
avec les compagnies et les dégager de la tutelle de M. Parassol.
Ce projet a reçu un commencement d'exécution : à une
réunion du Comité Radical-Socialiste de Brassac, tenue ce soir à la Mairie,
l'exclusion du chef révolutionnaire a été prononcée à une immense majorité ; ce
qu'indique que les ouvriers d'ici veulent se séparer des violents.
Le
Commissaire spécial
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ADHL
S 632
Mine
de Bouxhors
Rapport
concluant au refus de l'annexion de cette concession à celle du Grosménil (Cie
des houillères de la Haute-Loire)
présenté par la Ligue pour la défense des Droits de l'Homme
et du Citoyen, Section d'Arvant, et par le Comité socialiste révolutionnaire de
Sainte-Florine, contre l'annexion de la Concession de Bouxhors (Cie de
Commentry-Fourchambault), à celle du Grosménil (Cie des Houillères de la
Haute-Loire)
L'an mil neuf cent cinq, et le dix sept du mois de
septembre, à cinq heures du soir, la Section d'Arvant de la Ligue des Droits de
l'Homme et du Citoyen, s'est réunie en assemblée extraordinaire sous la
présidence du citoyen Cortial, Maire de Frugières-les-mines.
Étaient convoqués à cette réunion : Tous les membres de la
Section, les citoyens faisant partie du Comité socialiste révolutionnaire de Sainte-Florine,
ainsi que tous ceux qui de près ou de loin ont intérêt à soutenir et défendre
la cause ouvrière.
La séance ouverte, le Président donne connaissance à
l'assemblée d'une entrevue qu'il eut, sur convocation, le trois septembre
dernier, à la Préfecture de la Haute-Loire, avec le secrétaire général
remplaçant Monsieur le Préfet, au sujet de la délibération prise par la Section
le 9 juillet 1905, contre l'annexion de la concession de Bouxhors à celle du
Grosménil.
De cette entrevue, il appert que Monsieur le Ministre des
Travaux Publics demande un rapport détaillé à l'appui des protestations qui lui
sont parvenues contre l'annexion ci-dessus mentionnée. Ce rapport, dit-il, sera
examiné avec la plus grande bienveillance, et si les conclusions en sont
reconnues fondées il y sera donné suite dans la mesure du possible.
Sur cela, le citoyen Cortial, après avoir pris connaissance
de la note explicative de Monsieur le Ministre, a demandé un certain délai pour
étudier la question, élaborer le rapport demandé, et convoquer les membres de
la Section d'Arvant, en y joignant ceux des groupes protestataires du bassin.
Le citoyen Bayard, secrétaire du Comité socialiste
révolutionnaire de Sainte-Florine déclare que lui aussi fut mandé à la
Préfecture le même jour que le citoyen Cortial et pour le même motif. En
conséquence, en vue de faire action commune avec la Section d'Arvant de la
Ligue des Droits de l'Homme et du Citoyen, le Comité socialiste révolutionnaire
de Sainte-Florine s'est joint à ladite Section pour exprimer avec elle les
mêmes revendications.
1° Pas de Fusion de Concessions
I- Le Grosménil a de la houille. - La compagnie des
houillères de la Haute-Loire a fait valoir comme motif de fusion ou d'annexion
que les couches de houille comprises dans ses concessions sont sur le point
d'être épuisées, et que par suite, elle se verra dans la nécessité de renvoyer
un nombre considérable de ses ouvriers.
A cette objection, les membres des groupes protestataires ci-dessus
dénommés, osent répondre et certifier à Monsieur le Ministre que les gisements
et les couches des concessions du Grosménil et de La Taupe, loin d'être
épuisées sont en pleine activité et plein produit. Depuis peu, et à sa grande
surprise, la compagnie a découvert dans ses concessions de nouvelles couches
qu'elle exploite actuellement. L'exploitation de ces dernières couches, jointe
à celle des anciennes, donne une plus-value considérable à la concession du
Grosménil. En conséquence, l'annexion de Bouxhors sollicitée par la compagnie
du Grosménil deviendrait superflue, attendu que cette compagnie possède des
couches plus que suffisantes, et qu'elle en garde en réserve plusieurs qui
dorment dans l'inactivité.
Donc le manque de charbon ne peut plus être invoqué.
De plus, les membres protestataires, connaissant depuis
longtemps, par la pratique et l'expérience, la manière de procéder de la
Compagnie des houillères de la Haute-Loire, ont l'honneur de déclarer à
Monsieur le Ministre que la fusion de Bouxhors au Grosménil n'augmenterait pas
le nombre des ouvriers du bassin. La concession de Bouxhors serait sûrement
exploitée avec les mêmes puits et par les mêmes ouvriers en fonction au
Grosménil.
II.- Mauvaise administration de Bouxhors. - Si
l'exploitation de la mine de Bouxhors ne produisait aucuns bénéfices à la
compagnie Commentry-Fourchambault, elle le devait à son mode défectueux
d'exploitation et à son trop grand nombre d'employés de bureau. Ces employés,
pour la plupart inutiles emportaient à eux seuls une partie considérable du
produit de ladite Mine. De reste, les compagnies ayant précédemment exploité
Bouxhors, n'y avaient jamais essuyé aucun déficit.
Une des raisons majeures qui milite encore en faveur de la
concession de Bouxhors, c'est que si la Compagnie des Houillères de la
Haute-Loire pensait y faire des pertes, pourquoi mettrait-elle tant de ténacité
à posséder cette Mine ou cette concession ? La compagnie du Grosménil est trop
proche de ses intérêts, et les gère avec trop de parcimonie, surtout en ce qui
concerne la rémunération de ses ouvriers, pour s'engager dans une entreprise
dont elle saurait d'avance ne retirer que des pertes.
La Compagnie du Grosménil est assurée d'avance que
l'annexion de Bouxhors serait pour elle une source de gros intérêts.
2° Demande de la déchéance de la Cie
Commentry-Fourchambault.
Cette concession de Bouxhors demeure, depuis des années
déjà, inactive et inexploitée ; de ce fait plusieurs familles ont été obligées
de quitter le pays, par suite du manque de travail ; le sort d'un grand nombre
d'ouvriers et même l'aisance des communes environnantes dorment ainsi dans les
entrailles de la terre par le fait du mauvais vouloir de la Cie propriétaire.
De plus, les ouvriers occupés actuellement au Grosménil
supportent péniblement, et sans pouvoir se plaindre, les pauvres malheureux,
les funestes effets de l'arrêt de Bouxhors : les salaires sont diminués et le
surmenage de l'ouvrier est pratiqué sur une grande échelle.
Conséquemment, puisque la Compagnie Commentry-Fourchambault
a suspendu l'exploitation de la concession de Bouxhors, les membres des groupes
protestataires dont la désignation est exposée ci-dessus, demandent à ce que
ladite Compagnie soit mise en demeure de reprendre au plus tôt l'exploitation
de sa concession, interrompue par le fait de son gré, ou si non, en cas de
refus de sa part, qu'elle soit déclarée déchue de sa concession.
3° Demande d'une mine ouvrière.
Si la déchéance vient à être prononcée, les groupes
protestataires du Bassin demandent à Monsieur le Ministre que la concession de
Bouxhors soit mise à la disposition des ouvriers pour en constituer une mine
ouvrière. Les ouvriers anciens du pays, connaissant à fond par une longue
expérience la Mine de Bouxhors, prétendent et osent affirmer à Monsieur le
Ministre qu'une administration et une exploitation sérieuses de ladite Mine ne
pourraient donner lieu à aucun déficit ; au contraire, il en résulterait
sûrement de sérieux avantages pour le pays, tout en procurant des bénéfices
assez considérables à l'administration.
Conclusions
Si la fusion ou l'annexion de Bouxhors au Grosménil était
accordée, le prix de la houille deviendrait tout à fait arbitraire dans le
pays, attendu qu'il dépendrait exclusivement des caprices du même exploitant.
De plus, la Cie des houillères de la Haute-Loire n'a pas
seulement en vue la question économique mais encore et surtout la question
politique. Elle entend mettre et tenir sous son joug tyrannique de politique
rétrograde, la démocratie prolétarienne. Cet accaparement, comme beaucoup
d'autres, est une preuve indéniable de son désir de domination, ce à quoi tout
gouvernement républicain et démocratique, soucieux de l'amélioration du sort
des travailleurs ne saurait s'associer.
Pour ces motifs, les Membres des groupes protestataires
prient Monsieur le Ministre de refuser la fusion ou l'annexion de Bouxhors au
Grosménil, et de revenir sur l'arrêté autorisant la vente de ladite concession.
Si satisfaction est accordée aux réclamants, la situation
morale et matérielle des ouvriers s'améliorera dans de notables proportions,
surtout si l'exploitation de Bouxhors se fait par toutes autres mains que par
celles de la Cie des houillères de la Haute-Loire. L'ouvrier mineur aura plus
de facilité pour se procurer du travail, et ne sera plus réduit à la merci
despotique du même maître, pour ne pas s'exposer à traverser la France entière,
lui et les siens, afin de se procurer du pain.
L'industrie extractive sera augmentée, et par suite le
commerce en ressentira les heureux effets. La propriété reprendra sa valeur
première et la tranquillité et le bien-être renaîtront au foyer domestique.
Les Membres des groupes protestataires d'Arvant et de
Sainte-Florine, prient donc toutes les administrations de vouloir bien se
joindre à la population ouvrière du pays, à l'effet d'intervenir auprès de
Monsieur le Ministre pour que la présente supplique soit prise en
considération, et que satisfaction soit accordée aux intéressés.
Dans le cas où Monsieur le Ministre considèrait encore
comme insuffisants les motifs exposés dans le présent rapport, les groupes
protestataires ci-dessus dénommés demandent à Monsieur le Ministre de vouloir
bien nommer une commission pour venir se renseigner sur les lieux, et se
convaincre de la vérité.
En outre, une délégation d'ouvriers du bassin, s'offre de
se rendre, sur convocation, auprès de Mr. le Ministre, pour l'entretenir
verbalement de leurs revendications et lui fournir de plus amples détails.
Dans l'espoir que le présent rapport sera pris en considération
les groupes protestataires d'Arvant et de Ste-Florine assurent Mr. le Ministre
de leur profond attachement à la République.
Le Secrétaire du Comité socialiste révolutionnaire de
Sainte-Florine.
Le Président de la Ligue des Droits de l'homme de la
Section d'Arvant.
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La Démocratie Socialiste du Puy-de-Dôme, organe des travailleurs du Puy-de-Dôme, de la Haute-Loire
et du Gard.
Avachie
Avachie, c'est bien le terme qui convient à la population
de Ste-Florine.
Sans souci de leurs intérêts, par torpeur, par
indifférence, par crainte aussi, nos concitoyens se désintéressent de toutes
les questions qui devraient les intéresser.
Nous savons, certes, que la majorité de la population est
en communion d'idées avec le groupe socialiste du Conseil Municipal, et qu'une
nouvelle consultation électorale ne pourrait que nous amener d'une façon plus
précise et surtout plus décisive à la victoire complète.
D'ailleurs, si nos adversaires en doutent, nous leur
renouvellons ici, publiquement, une proposition : que la municipalité donne sa
démission. Nous nous engageons à les suivre dans leur retraite et à nous
représenter en même temps qu'eux devant le corps électoral.
C'est une occasion qui leur est offerte de faire
disparaître la minorité du Conseil.
Nous sommes certains par avance du verdict que
prononceraient les électeurs ; c'est sans crainte que nous nous représenterions
devant eux.
Malheureusement, l'occasion ne nous en sera pas donnée. Nos
adversaires, sachant ce qui les attend, se cramponnent à leurs banquettes, ils
préfèrent japper de loin que de s'expliquer franchement devant ceux dont ils
ont trahi les intérêts.
Mais il ne suffit pas qu'une population marche unie aux
urnes et assure le triomphe des candidats socialistes, il faut aussi qu'ils ne
désintéressent pas de ce que font ses élus, de ce qui se passe, de ce qui, pour
eux, doit être d'un intérêt de premier ordre.
Eh bien, c'est ce qu'on ne fait pas à Sainte-Florine. On
vote et puis on va s'endormir jusqu'à la nouvelle consultation électorale.
C'est là une attitude d'avachis, d'émasculés.
En se désintéressant de tout on perd le droit de se
plaindre, car on n'a rien fait pour conjurer le péril, pour empêcher le Maître
de devenir tout puissant.
Vous vous plaignez, mineurs, que vos exploiteurs, les
Rénié, les Fayolles, vous serrent de plus en plus la vis.
Vous trouvez, verriers, que le jeune Chenet devient de plus
en plus insupportable.
Vous protestez, cultivateurs, contre les droits et les
impôts qui vont chaque jour croissants et qui vous mettent dans l'impossibilité
de vous retourner.
A qui la faute, si non à vous ?
Vos exploiteurs, vos maîtres, du bas en haut de l'échelle, sont
dans leur rôle, leur classe privilégiée est l'ennemie déclarée de la vôtre, ils
profitent de leurs avantages pour vous faire sentir de plus en plus leur
omnipotence. Ils auraient bien tort de se gêner. Vous êtes si consciencieux, si
bons enfants. Vous tendez l'échine avec tant de complaisance sous le fouet, que
vraiment ce serait dommage de ne pas vous donner la fessée.
Eh bien non ! ce n'est pas là l'attitude d'hommes. Vous
vous courbez comme des esclaves sous la trique du maître. Il n'a qu'à souhaiter
pour que vous obéissiez. Avant même de commander, il est obéi.
Si vous aviez cnscience de votre force, si vous vous
groupiez, si vous vous occupiez un peu plus sciemment de vos intérêts, vous
n'en seriez pas aux posture humiliées et avachies.
Allons, redressez-vous que diable. Ce n'est pas du sang de
gaulois qui coule dans vos veines, mais bien du jus d'esclave. Venez au
syndicat, venez aux réunions d'intérêts local que donnent vos élus. C'est votre
intérêt qui est en jeu et non le leur.
Quand, par votre indifférence, votre lâcheté vous aurez
permis à la majorité opportuniste et renégate du Conseil Municipal de vous
frapper d'impôts nouveaux, quand le mal irréparable sera fait, alors seulement
vous trouverez peut-être en vous la force de protester. Vous paierez en
maugréant, mais vous ne voudrez peut-être pas reconnaître que tout cela est
uniquement de votre faute.
Allons camarades, haut les coeurs, ressaisissez-vous,
n'écoutez pas les rodomontades des mouchards vendus aux Compagnies, d'individus
traîtres à leurs engagements, traîtres à leur parole jurée, dont le rôle odieux
est de vous pousser de plus en plus dans l'esclavage.
Redevenez des hommes et n'oubliez pas qu'«un peuple n'a que
le gouvernement qu'il mérite».
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Affiche
de propagande en faveur de la commune saisie à Jumeaux
AD M
0223
Affiche
attribuée par la gendarmerie à un certain Feuillatre, instituteur révoqué. Le
texte conservé n'en est qu'une mauvaise copie.
Le travailleur de Paris,
au travailleur de[s] campagnes.
Frère, on te trompe, nos intérêts sont les mêmes ; ce que
je demande, tu le veux aussi ; l'affranchissement que je réclame, c'est le tien
; qu'importe si c'est à la ville ou à la campagne que le pain, le vêtezment,
l'abri, le secours manquent à celui qui produit la richesse de ce monde ;
qu'importe que l'oppresseur ait nom : gros propriétaire ou industriel. Chez toi
comme chez nous, la journée est longue et rude, et ne rapporte pas même ce
qu'il faut au besoin du corps. A toi comme à moi, la liberté, le loisir, la vie
de l'esprit et du cour manquent. Nous sommes encore et toujours, toi et moi,
les vassaux de la misère.
Voilà près d'un siècle, paysans, pauvre journalier, qu'on
te répète que la propriété [est] le [fr]uit sacré du travail et tu le crois.
Mais ouvre donc les yeux et regarde autour de toi, regarde toi toi-même, et tu
verras que c'est un mensonge. Te voilà vieux, tu as toujours travaillé, tous
tes jours se sont passé, la bêche ou la faucille à la main, de l'aube à la
nuit, et tu n'es pas riche cependant, et tu n'as même pas un morceau de pain
pour ta veillesse. Tous tes grains [lire : gains] ont passé à élever
péniblement des enfants que la conscription va te prendre ou qui, se mariant à
leur tour, mèneront la même vie de bête de somme que tu as menée, et finiront,
comme tu vas finir, misérablement, car la vigueur de tes membres s'étant
épuisés, tu ne trouveras plus guère de travail, tu chagrineras tes enfants du
poid de ta veillesseet te verra bientôt obligé, le bissac sur le dos et
courbant la tête, d'aller mendier de porte en porte l'aumône méprisante et
sèche. Cela n'est pas juste, frère paysans, ne le sens-tu pas ? Tu voi donc
bien que l'on te trompe, car s'il était vrai que la propriété est le fruit du
travail, tu serais propriétaire, toi qui as tant travaillé, tu possèderais
cette petite maison avec un jardin et un enclos, qui a été le rêve, le but, la
passion de toute ta vie, mais qu'il t'a été impossible d'acquérir ou que tu
n'as acquise peut-être, malheureux, qu'en contractant une dette qui t'épuise,
te ronge et vas forcer tes enfants à vendre aussitôt que tu seras mort,
peut-être avant, ce toit qui t'a déjà tenp [tant] couté. Non, frère, le travail
me donne pas la propriété. Elle se transmet par hasard ou se gagne par ruse.
Les riches sont des oisifs ; les travailleurs sont des
pauvres et restent pauvres. Ces la règle, le reste n'est que l'exception ; cela
n'est pas juste et voilà pourquoi Paris, que tu accuses sur la foi des gens
interressés à te tromper, voilà pourquoi Paris s'agite, réclame, se soulève et
veut changer les lois qui donnent tous pouvoirs aux riches sur les
travailleurs... [ici court passage non transcrit car incompréhensible]
[L'ais]ance humaine est le bien commun de tous les hommes et n'est pas moin
utile pour se conduire dans la vie que les yeux pour voir.
Paris veut qu'il n'y est plus de roi qui reçoive 80
millions de l'argent du peuple et qui engraisse de plus sa famille, ses
favoris.
Paris veut que cette grosse dépense n'étant plus à faire,
l'impôt diminue grandement. Paris demande qu'il n'y ait plus de fraction payées
20 000 - 50 000 - 100 000 francs donnant à manger à un homme, aucune [en une]
seule année, la fortune de plusieurs familles, et qu'avec cette économie on
établisse des asiles pour la veillesse des travailleurs. Paris demande que tout
homme qui n'est pas propriétaire ne paye pas un sou d'impôt, que celui qui ne
possède qu'une maison et son jardin ne paye rien encore, que les petites
fortunes soient imposées légèrement, et que tous le poid de l'impôt tombe sur
les richards.
Paris demande que ce soient les députés, les sénateurs et
les bonapartistes, auteurs de la guerre, qui payent les Cinq milliards à la Prusse,
et qu'on vende pour cela leurs propriétés avec ce qu'on appelle les biens de la
couronne dont il n'est plus besoin en France.
Paris demande que la justice ne coute plus rien à ceux qui
en ont besoin, et que ce soit le peuple lui-même qui choisse les juges parmis
les honnêtes gens du canton.
Paris veut enfin, écoute bien ceci, travailleur des
campagnes, pauvre journalier, petit propriétaire que ronge l'usure, boidier
[petit métayer], fermier, vous tous qui semez, récoltez, suez, pour que le plus
clair de vos produits aille à quelqu'un qui ne fait rien, ce que Paris veut, en
fin de comptes, c'est la terre au paysans, l'outhi à l'ouvrier, le travail pour
tous.
La guerre que fait Paris en ce moment, c'est la guerre à
l'usure, au mensonges et à la paresse. On vous dit : les Parisiens, les
socialistes, sont des partageurs. Eh ! bonnes gens, ne voyez-vous pas qui vous
dit cela ; ne sont-ils pas des partageurs ceux qui, ne faisant rien, vivent
grassement du travail des autres ; n'avez-vous jamais entendu les voleurs, pour
donner le change, écrier un voleur [s'écrier «Au voleur !»] et détaler tandis
qu'on arrête le volé.
Oui, les fruits de la terre à ceux qui la cultive. A chaqun
le sien, le travail pour tous. Plus de très riches, ni de très pauvres. Plus de
travail sans repos, plus de repos sans travail. Cela se peut ; car il vaudrait
mieux ne croire à rien que de croire que la justice ne soit pas possible.
Il ne faut pour cela que de bonnes lois qui se feront quand
les travailleurs cesseront de vouloir être députés [être représentés, avoir
comme députés] par les oisifs.
Et dans ce temps-là croiyez le bie, frères cultivateurs,
les foires et marchés seront meilleurs pour qui produit le blé et la viande, et
plus abondant pour tous, qu'ils ne furent jamais sous aucun empereur ou roi.
Car alors, le travailleur sera fort, et bien nouris et le travail sera libre
[des] gros impôts, des patentes, de redevances que la Grande révolution n'a pas
toutes emportées comme il parait bien.
Donc habitants des campagnes, vous le voyez, la cause de
Paris est la vôtre et c'est pour vous qu'il travail en même temps que pour
l'ouvrier. Ces généraux qui l'attaquent en ce moment, se sont les généraux qui
ont trahi la France. Ces députés que vous avez nommés sans les connaîtres,
veulent ramener Henri V. Si Paris tombe, le jou de misère restera sur votre cou
et passera sur celui de vos enfants. Aidez-le donc à triompher, et quoi qu'il
arrive, rappelez vous bien ces paroles, car il y aura des révolutions dans le
monde jusqu'à ce qu'elles soient accomplies :
La terre au paysans, l'outil à l'ouvrier, le travail pour
tous.
Les travailleurs de Paris.
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