Les métiers de la mine

 

A Le fond

A Le jour

A Les installations du puits de Cellamines (Photographies)

A Les emplois induits

 

 

La mine, d’un point de vue technique, est un ensemble extraordinairement complexe. Pour extraire du charbon, et l’amener dans les hauts-fourneaux ou dans les chaudières des maisons individuelles, différents métiers doivent s’allier.

 

Il y a une première division entre le travail souterrain –le fond- et le travail de la surface –le jour.

 

Le fond

 

Les piqueurs : Face au front de taille –là où se trouve le charbon-, ils manient d’abord le pic, puis le marteau-mineur, forme adaptée du marteau-piqueur. Faisant un travail exténuant, dangereux, ils sont les mineurs au sens strict du terme.

Selon l’épaisseur de la couche de charbon, ils peuvent travailler couché –c’est le travail « à col tordu » décrit dans Germinal de Zola-, accroupi ou debout quand ils ont de la chance.

Ils doivent non seulement abattre le minerai, le plus possible –ils sont payés au nombre de wagonnets sortant du chantier-, mais aussi assurer la sécurité en prévenant le danger : empêcher les éboulements en assurant le boisage, surveiller l’apparition du grisou qui peut exploser à la moindre étincelle, ou du gaz carbonique qui asphyxie.

 

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Convoyeur à bande, amenant le charbon jusqu’à la galerie principale

 

Piqueurs face au front de taille

 

Les aides du piqueurs : les herscheurs de Germinal ramassent le charbon à la pelle et en chargent les wagonnets –les berlines-, qu’ils amènent ensuite –à la main-, dans les galeries principales. Quand l’air comprimé révolutionnera le travail, des tapis roulants les remplaceront dans cette tâche.

De là, des jeunes mineurs forment des trains de berlines, y attellent des chevaux ou des ânes. Ces trains –l’essentiel des techniques ferroviaires apparut dans les mines- vont ensuite vers la recette du puits, pour y être montés à la surface.

 

 

Pour permettre ce travail, se côtoient dans les galeries :

 

Les boiseurs : Toujours de vieux mineurs, qui finissent ainsi leur carrière au fond, ils entretiennent le boisage, c’est-à-dire de l’assemblage de planches et de rondins de sapins qui soutiennent les galeries.

 

Les ouvriers au rocher : Ils creusent les travers-bancs, les galeries à travers les bancs de rocher. Leur travail est au moins aussi exténuant et dangereux que celui du piqueur. Attaquant le rocher au pic, à la barre à mine, puis à la dynamite, ils respirent à pleins poumons une poussière particulièrement nocive  : la silicose vient de la silice, c’est-à-dire la roche.

Les ouvriers au rocher exécutent également le fonçage -le creusement- du puits.

 

Les boutefeux : Pour aller plus vite, on creuse dans le front de taille ou dans la roche des trous de mine, que l’on bourre d’explosifs spéciaux. Le boutefeux place les mèches et déclenche l’explosion, après bien évacuation du chantier, de l’étage, voire de la mine entière quand le danger paraît trop grand. La plupart, pour limiter les risques, les coups de mines sont tirés de nuit, quand les mineurs dorment.

Quand tout se passe bien, pas de problème. Mais quand une charge « ne part pas », il faut aller la défaire, et l’explosion peut se produire à ce moment...

 

Les freinteurs :  Entre deux étages de galeries, des plans inclinés permettaient les déplacements des bois, des bennes vides, du charbon. Ces plans inclinés fonctionnaient à l’aide de treuils actionnés par l’air comprimé. Le freinteur était le conducteur de ces treuils.

De même, il existait des puits intérieurs -les bures- qui fonctionnaient entre deux étages, c’est-à-dire approximativement 100 m. (à la Taupe).

 

Les receveurs : Placés à la porte -la recette- de « l’ascenseur » du puits, ils règlent la circulation des cages.

 

Les écuries : Les chevaux restent au fond. Pour les soigner, les nourrir, il faut des palefreniers.

 

L’évolution technique amènera ensuite des électriciens, responsables de l’éclairage, des techniques pour entretenir les conduites d’air comprimé.

L’air comprimé, c’est la vie. Il amène l’air frais dans les chantiers reculés -ailleurs, ce sont d’énormes ventilateurs qui s’en chargent-, actionne les marteaux-mineurs, les tapis roulants, les cages d’ascenseurs des puits intérieurs -qui n’aboutissent pas au jour.

 

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Les Graves

1966

Les Grave

1972

Les Graves

1973

 

Mine école

1946

Machiniste de Bayard, 1968

 

 

Le jour

 

Les receveurs : complémentaires de leurs collègues du fond, ils aident les machinistes.

 

Le machiniste : Chargé de la conduite de la machine qui monte et descend les cages, il tient la vie des hommes entre ses mains. Il doit arrêter la cage, sans la voir, exactement au niveau requis. S’il se trompe, les wagonnets ne peuvent sortir, et les hommes restent enfermés.

Le matériel ou le minerai circule beaucoup plus vite que les hommes. Avant le démarrage, une sonnerie l’informe du contenu de la cage : elle est différente suivant les niveaux de provenance ou de destination des cages, et suivant ce qu’elles transportent. Que le receveur actionnant cette sonnerie se trompe, ou que le machiniste l’interprète mal, on imagine le résultat : les hommes ou le matériel n’arrivent pas au bon niveau, ou, si des hommes montent ou descendent à la vitesse prévue pour les wagonnets, le choc qu’ils subissent peut leur être fatal.

 

Les machines du Puits Bayard

 

AChaudières, machines, turbines

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ALes tambours des câbles

 

Le triage : Quand le minerai de charbon est au jour, il faut le trier, c’est-à-dire enlever la roche à laquelle il est mêlé.

Au début de l’industrialisation, des femmes renversaient les wagonnets, fournissant ainsi un effort musculaire parfois supérieur à celui fournit par les hommes face au front de taille.

Le minerai partait ensuite sur des tapis roulant. De chaque côté de ce tapis, des femmes -des veuves de mineurs tués-, des jeunes adolescents en attente de leur première descente au fond, des jeunes filles en attente de mariage, enlevaient les rochers.

Quand le minerai était bien sec, la poussière dégagée empêchait de se voir d’un côté à l’autre du tapis. Au triage aussi, la silicose a frappé.

L’évolution technique va, là-aussi, révolutionner le travail.

Le renversement des berlines est d’abord automatisé.

Vers les années 1950, le triage se fera par lavage et décantation. La roche tombe au fond d’un bassin, le charbon flotte.

Ce système produira un nouveau sous-produit : les schlams. La boue résultant de ce lavage est fortement chargé de charbon. Par séchage, on obtient un combustible qui est donné aux ouvriers. Difficile à allumer -il reste de la roche, et la schlam n’est pas séchée complètement-, il est cependant bien apprécié.

 

La machinerie du triage était colossale

 

Voici des planches extraites des Annales des Mines de 1859, montrant les installation des mines de Brassac.

 

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Mais, même avec cette machinerie, il fallait des hommes ! Et même des enfants…

 

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Comme dans toute activité industrielle, il faut des services d’entretien.

 

La forge : Le matériel s’usait vite. Les pics, les berlines, les rails demandait un entretien régulier.

 

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Extrait du Manuel Bickford (1933)

 

La lampisterie : Premier rendez-vous du mineur avec son travail. Il prends une lampe, et donne un jeton numéroté, qu’il reprend le soir en rendant la lampe. S’il manque un jeton, c’est que le mineur a eu un accident.

Dans ce monde souterrain, voir est vital. Les lampes de sûreté, dont la flamme ne peut enflammer le grisou, doivent être nettoyées, vérifiées, regarnies quotidiennement.

 

Les bureaux : comme dans toute activité industrielle.

 

L’infirmerie : Inexistantes au début de l’exploitation minière, elles deviennent incontournables.

 

Les cantines : Les mineurs du fond mangent un repas tiré du sac[1] au fond. Ceux du jour vont à la cantine ou chez eux.

 

La gestion des rebuts de la mine : Une fois le charbon trié, les roches et schistes bitumineux partent vers le terril. Une voie ferrée spéciale les y amène.

 

L’expédition des produits : Enfin, le charbon part. Il faut donc des parcs de stockage, des bascules pour wagons et camions, des installations ferroviaires branchées sur le réseau national des chemins de fer.

 

A Puits St-Alexandre

 

A Transporteur aérien reliant Charbonnier à la gare de Brassac-les-Mines

 

Installations de surface de Charbonnier

(Puy-de-Dôme)

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La fabrication des boulets : Une fois le charbon trié, on a des blocs, gros ou petits, et du menu : des blocs trop petits pour la commercialisation, quand ce n’est pas de la poussière de charbon. Pour le valoriser, on fabrique des boulets.

La mine importe du brai -sous-produits de raffinerie pétrolière. Des ouvriers spécialisés le mélangent au menu charbon dans des fours.

 

Naturellement, pour faire tourner cet univers, il faut une  hiérarchie.

 

Les maîtres-mineurs -gouverneurs à Saint-Étienne, porions dans le Nord-, souvent d’anciens mineurs de base, ont suivi des cours de formation aux Écoles des Mines de Saint-Étienne ou d’Alès. Ils assurent la direction directe des travaux.

 

 

Les chefs de poste -il y a trois postes, trois cycles de travail par jour : celui du matin, celui du jour, celui de nuit- dirigent l’ensemble des ouvriers, fond et jour, à l’appel de la sirène rythmant la journée.

Les ingénieurs dirigent l’exploitation. Les géomètres tracent les plans des travaux.

 

A Les installations du puits de Cellamines (Photographies)

 

Les emplois induits

 

La présence en un seul secteur d’une importante communauté ouvrière permet bien sûr l’apparition de secteurs d’activités induits.

Par exemple, il faut du bois, beaucoup, pour assurer le boisage et la sécurité au fond. Les paysans des environs, côté Brivadois ou Cézallier, y trouvent un débouché et une source de revenus non négligeable.

Plusieurs milliers de familles font beaucoup d’enfants, qu’il faut scolariser. Le groupe scolaire de La Combelle, 4 classes aujourd’hui, en avait une dizaine lors de sa création en 1934.

L’administration de l’État doit suivre : perceptions, gendarmeries -deux sur le seul canton de Brassac !

Les ouvriers, même si leurs salaires pourraient être meilleurs, ont des liquidités monétaires : ils consomment. Comme ils sont nombreux, le commerce local prospère. Le marché sur la Grande Place de La Combelle draine toute la population des environs, il y a plusieurs épiceries, boulangeries, boucheries, cafés, restaurant etc.

Toutes ces activités seront durement touchées lors de la reconversion ratée. Moins de consommateurs, cela signifie aussi moins d’emplois pour satisfaire ces consommateurs. Le coût de cette reconversion est énorme.

 

La Centrale électrique de La Taupe, construite pour utiliser les charbons de la mine voisine, fut ouverte, malheureusement, juste après sa fermeture en 1954. Elle permit à beaucoup de mineurs de finir leur carrière professionnelle.

 

A Salle des machines de la Centrale de La Taupe

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D’autres industries apparurent au fil des années. Pomel et Ducellier, déjà citées, contribuèrent à amortir le choc. D’autres tentatives, plus limitées, subirent bien des vicissitudes. Aucune ne réussit vraiment à régler le problème.

Ducellier, notamment, malgré des luttes ouvrières très dures, régressa continuellement, et n’existe plus. Il survit avec Valéo et Johnson Control, mais pour combien de temps ?

 

 

 

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[1] La musette, de fabrication maison. Constituée d’une forte toile bleue ou noire. Fermant au moyen d’un cordon coulissant dans l’ourlet supérieur et attaché par un nœud coulant emprisonnant un bouchon dans l’angle inférieur du sac. Elle se portait sur l’épaule ou en bandoulière pour le possesseur de vélo.